Famidac.fr

Famidac, l'association des accueillants familiaux
et de leurs partenaires

Version imprimable de cet article Version imprimable

2014 : La réhabilitation psychosociale de patients psychotiques

Rôle et intérêt de l’ergothérapeute au sein d’un service d’accueil familial thérapeutique.

Auteur : Caroline QUESNAY, Institut de Formation en Ergothérapie, Montpellier -
juin 2012

En janvier 2012, Caroline QUESNAY nous écrivait :

"Bonjour, je suis actuellement étudiante en 3ème année à l’institut de formation en ergothérapie de Montpellier.

Au cours de mes différents stages en psychiatrie, j’ai été interpellée par l’accumulation des hospitalisations à court terme, particulièrement en ce qui concerne certaines pathologies psychotiques, induisant un retour rapide à la société avec un suivi médico-social aléatoire. Ce phénomène, communément appelé « le syndrome de la porte tournante », semblait alors être un frein à la réhabilitation psychosociale du patient.

Suite à ce constat, je me suis intéressée à la pratique de l’ergothérapeute dans le domaine de la réhabilitation de patients psychotiques. (...) mon intérêt s’est porté sur cette pratique encore peu (re)connue qu’est l’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). thérapeutique."

La réhabilitation psychosociale de patients psychotiques
Rôle et intérêt de l’ergothérapeute au sein d’un service d’accueil familial thérapeutique

Caroline a "bouclé" son mémoire, nous l’a envoyé et nous a autorisé à le mettre ici à votre disposition. Je l’ai imprimé, lu d’un trait, coché plein de pages, surligné un paquet de paragraphes... car elle a fait un boulot formidable !!! (et c’est un mot que j’emploie très rarement).

Je ne suis pas spécialement "novice" en matière d’AFT AFT
Accueil Familial Thérapeutique
Des personnes souffrant de troubles mentaux peuvent être prises en charge au domicile de particuliers formés, agréés et employés par des établissements psychiatriques.
. Mais là, Caroline réussi à rendre limpide un sujet particulièrement aride. Chapeau !

Je me représentais jusqu’ici les ergothérapeutes simplement armées d’un mètre, de plans et d’un catalogue d’équipement "matériel" : ce mémoire et son analyse systémique m’ont permis de reconsidérer cette vision réductrice. Il était temps !

Vous pouvez le télécharger ici

Bravo et Merci, Caroline :-)
Famidaquement, Étienne Frommelt

PS : Caroline nous précise : "je suis disposée à répondre à d’éventuelles questions sur mon travail.
Mon adresse mail : carolinequesnay(arobase)yahoo.fr

Résumé

Dans un contexte important d’évolution de la psychiatrie, les structures de soins extra-hospitalières se sont largement développées en France. Malgré cela, toutes ne permettent pas une réhabilitation psychosociale de la personne.

Le placement en famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! thérapeutique est une alternative à l’hospitalisation s’inscrivant comme un projet de soin à part entière pour des patients présentant un handicap psychique. Il ouvre des perspectives d’insertion dans la société tout en préservant un suivi et un accompagnement médico-social. Cette étude cible et tend à montrer la place, le rôle et l’intérêt de l’ergothérapeute au sein d’un service d’accueil familial thérapeutique.


Extraits

  • Les indications

Elles se réfèrent plus à la trajectoire personnelle du malade, à la teneur du projet de soins et de réinsertion qu’à des critères catégoriels diagnostiques.
Les personnes suivies en AFT présentent en commun une incapacité (momentanée ou durable), liée à leurs troubles psychiques, à gérer seuls leur vie quotidienne. Le patient doit avoir une capacité d’échange et de communication, il doit pouvoir tolérer la création et l’existence de relations entre individus.

L’AFT n’a aucun critère de durée de séjour prédéfini. On trouve donc des séjours de très courte durée, sur du long terme, ou encore des intermédiaires tels que des séjours séquentiels ou à temps partiel.

L’indication d’un placement en famille d’accueil se détermine en fonction de la politique de soin de l’équipe, pour un patient donné, à un temps précis de son évolution personnelle, en examinant avec lui si d’autres orientations thérapeutiques seraient plus adaptées. C’est à l’équipe d’encadrement d’évaluer la situation et les enjeux, de ne pas induire de danger potentiel, et de savoir entendre, au fil de temps, comment l’accueil évolue.

Les contres-indications à ce type de prise en charge sont propres à chaque équipe d’AFT et dépendent donc des modalités de fonctionnement des services, déterminées a posteriori par l’établissement. Néanmoins, certaines contre-indications se dégagent clairement et ce, de façon unanime, correspondant aux pathologies paranoïaques, aux fonctionnements pervers, et aux états d’instabilité et de non-compliance aux soins qui risqueraient de compromettre la sécurité de la famille d’accueil elle-même.

A noter également que « les malades hospitalisés sans leur consentement, d’office ou sur demande d’un tiers, ne peuvent faire l’objet d’un accueil familial thérapeutique » (arrêté du 1er octobre 1990, art.3).

L’AFT n’est pas une fin en soi : comme tous les autres processus de soins psychiatriques, il n’a de sens que dans le cadre d’un projet de soin qui se réactualise sans cesse en fonction des besoins, attentes et évolutions du patient et de la famille d’accueil.

La pyramide de Maslow

Lien avec mon étude

Partant de ce principe, où l’homme doit satisfaire ses besoins élémentaires afin de parvenir à un accomplissement personnel, il semble intéressant de se poser la question du devenir et des possibilités d’accomplissement en ce qui concerne une personne atteinte de troubles mentaux. En effet comme je l’ai précédemment évoqué dans la problématique pratique, un sujet psychotique doit faire face au quotidien, à de nombreuses difficultés induites par ses troubles.

Le parcours vers une réhabilitation psychosociale peut alors se trouver perturbé par un manque de cadre familial, affectif, des hospitalisations prolongées ou récurrentes, une instabilité qui ne saurait procurer les besoins dont parle Maslow.

Ainsi, la famille d’accueil et l’équipe de soin d’un service d’accueil familial thérapeutique sont-elles à même d’aider le patient vers un accomplissement personnel lui permettant cette réhabilitation dans la société ?

  • En terme de besoins physiologiques, la famille d’accueil assure un toit, de la nourriture, un lit au patient, qui peut ainsi satisfaire ses besoins élémentaires. De plus, le patient est assuré en famille d’accueil de pouvoir vivre dans un environnement confortable (chauffage, eau chaude…) ce qui préserve sa santé physique. Toutes les conditions sont donc réunies pour accéder à l’étage supérieur.
  • Les besoins psychologiques sont ici assurés par le cadre protecteur qu’induit un environnement familial. Les besoins de sécurité physique sont d’une part comblés par le logement stable dont dispose le patient, la sécurité des revenus et des ressources. D’autre part, la sécurité psychologique est assurée par l’espace de vie familiale protecteur et idéalement accompagné d’une sécurité affective dénuée de tout jugement de valeur. L’équipe de soin aura ici également un rôle important à jouer puisqu’il lui incombera de déceler et d’aider à remédier aux difficultés, aux incertitudes, aux angoisses et problèmes qui peuvent survenir au quotidien chez le patient ou la famille d’accueil.
  • Les besoins sociaux et d’appartenance peuvent ici clairement être apportés par la famille d’accueil. La notion même de « famille » prend ici tout son sens puisqu’elle inclut le patient dans ce groupe restreint vivant sous le même toit et partageant leur quotidien. La proximité de l’entourage, des voisins, amis de la famille, confère au patient une possibilité d’intégration sociale qu’il ne pourrait pas forcement avoir au sein d’une institution.
  • Le besoin d’estime prolonge le besoin d’appartenance. Le soutien que confère la famille peut ici être primordial à l’évolution du patient. La famille doit donc veiller à avoir la « bonne place » auprès du patient afin de lui permettre de conserver ou recouvrer son identité, son autonomie. Malheureusement il est parfois difficile de trouver la juste distance pour ces familles qui ne sont en aucun cas des soignants ou professionnels de la santé. Elles agissent donc avec simplicité et neutralité, c’est ce qui fait la force de cette prise en charge, mais aussi parfois sa faiblesse. Le rôle de l’équipe pourra être ici important, afin de permettre aux familles de situer les objectifs, les tenants et aboutissants du projet du patient pour l’accompagner au mieux dans son processus de réhabilitation, d’évolution, d’accomplissement de soi.
  • Le besoin de s’accomplir : Hors les murs de l’hôpital, la personne aura plus facilement accès à son épanouissement personnel, à la réalisation de soi et à la découverte de ses compétences. Cet ancrage au sein de la société via une famille qui supporte, aide, stimule la personne lui permettra de se faire une place : ne plus être considéré comme patient mais comme individu à part entière, évoluant au sein d’un groupe.

Il ne faut pas oublier non plus que la famille d’accueil sera dans la plupart des cas un tremplin vers un autre projet, d’autres perspectives de réinsertion socioprofessionnelle. Bien sûr, chaque personne est différente, chaque projet singulier. De ce fait, il parait important de situer la personne dans sa globalité, de s’attacher à son parcours, son identité, son environnement et ses habitudes de vie. Ainsi j’aborderai ici un tout autre modèle, prenant en compte ces facteurs : Le processus de production du handicap.

(...)

DISCUSSION

En me basant sur ces expériences concrètes face à l’accueil familial thérapeutique, je peux désormais essayer de cibler les objectifs d’une telle prise en charge en termes de réhabilitation psychosociale du patient psychotique. Les compétences de l’ergothérapeute peuvent-elle être mises à profit dans ce type d’accompagnement ? Si oui, de quelle manière et par quels moyens ?

Pour tenter de répondre à ces questions, j’ai fait le choix d’organiser ma discussion en suivant l’ordre de la prise en charge du patient. Cela permet ainsi d’orienter ma réflexion afin que puisse être établie la démarche de l’ergothérapeute à chaque étape-clé de l’accompagnement du patient.

L’indication du placement

Par le biais des entretiens, on observe que les patients sont orientés vers cette alternative à l’hospitalisation par l’équipe de leur établissement d’origine. On suppose donc qu’un projet en faveur du patient est déterminé en amont du placement, par l’équipe « adresseuse. »

Néanmoins la décision finale en revient à l’équipe du service d’accueil familial thérapeutique. Pour cela il convient donc de déterminer les critères favorables à ce type de placement pour un patient donné lors d’un moment précis de son histoire personnelle.

Les patients indiqués en AFT présentent pour la plupart des difficultés ou incapacités liées à leurs troubles psychiques à gérer seuls leur vie quotidienne. L’ensemble de ces difficultés ralentit ou empêche une prise en charge traditionnelle et motive donc un changement stratégique de mode de soin.

C’est à l’équipe de soin d’évaluer les motivations du patient en rapport avec son projet de vie afin de cibler les enjeux de cet accompagnement. L’unité d’accueil abordée dans les entretiens a, entre autres, cette vocation. L’ergothérapeute pourra donc, au sein de l’équipe pluridisciplinaire, via des mises en situations écologiques, des évaluations, apporter des compétences spécifiques en ce qui concerne l’impact des déficits liés à la pathologie mentale pour un patient donné.

Suite à cela et dans un premier temps, un projet de soin personnalisé et propre aux objectifs de l’accueil familial thérapeutique pourra être déterminé par le patient et par l’équipe. Ce projet sera établi en fonction des aptitudes, facteurs personnels, motivations, autonomie, capacités et incapacités du patient, préalablement évalués par l’ergothérapeute en collaboration avec l’équipe.

Une fois le projet érigé, l’équipe devra opter pour une orientation précise de ce patient. Le choix de la famille peut donc être déterminant. Elle doit en effet prétendre à satisfaire au mieux les exigences du projet de soin mais également les valeurs et motivations du patient, auparavant évaluées.

Pour illustrer ces propos, prenons l’exemple d’un patient pour lequel les évaluations au sein de l’unité d’accueil ont montré des difficultés importantes d’adaptation. Ces facteurs seront à prendre en compte en ce qui concerne le choix de la famille. En effet, comme stipulé lors de l’analyse des résultats, des habitudes de vie différentes entre le patient et la famille pourraient constituer un obstacle à son adaptation au sein du foyer. Dans ce cas, les habitudes de vie antérieures du patient, ainsi que des familles doivent donc être évaluées afin de proposer dans un premier temps, un accueil qui concorderait avec les aptitudes du patient.

Tous les facteurs doivent donc être pris en compte, tant au niveau de l’environnement humain, matériel (milieu rural ou urbain, présence d’enfants, sexe de l’accueillant, culture …), qu’au niveau des facteurs personnels et habitudes de vie du patient, et de la famille. L’ergothérapeute de par sa vision holistique pourra contribuer à cette décision.

Pour résumer, les objectifs ergothérapiques et pluridisciplinaires à court terme, correspondant à l’indication du patient dans une famille donnée pourront être :

  • D’évaluer les motivations du patient et de déterminer avec lui ses attentes quant à l’accueil familial thérapeutique
  • D’évaluer en unité d’accueil les capacités/ incapacités du patient, de ses habitudes de vie antérieures, son autonomie au quotidien, ses facultés d’apprentissage…
  • De mettre en place le projet de soin en accord avec l’équipe pluridisciplinaire, le patient, sa famille d’origine éventuellement.
  • D’évaluer les familles disponibles : selon les motivations, les habitudes de vie, la prise en considération du lieu de vie et des membres de la famille, des exigences du quotidien (tâches ménagères, repas…)
  • D’orienter le patient vers une famille correspondant aux attentes, aux évaluations.

Le suivi

Comme l’ont souligné les professionnels interrogés, le suivi du patient s’effectuera au cas par cas. Chaque situation, chaque patient, chaque famille étant unique, un protocole précis n’est donc pas établit. Cependant, lors du début de chaque placement, il fait état d’une réunion triangulaire. Cette notion parait intéressante à développer dans le contexte ergothérapique. En effet, elle rassemble les trois acteurs de la prise en charge, dans un climat de confiance et de collaboration prenant ainsi en considération les différents points de vue et permettant un échange réciproque. Les objectifs du placement seront ici rappelés et approfondis, si besoin, afin que chacun puisse déterminer son rôle dans ce parcours particulier.

Par conséquent, le début du placement se trouve être un moment clé de la prise en charge. C’est l’adaptation du patient et de la famille, où chacun se positionne par rapport à l’autre, où l’on apprend à se connaitre, à vivre ensemble. Ces instants sont parfois délicats mais déterminants pour la suite. L’équipe doit donc montrer sa collaboration et son entière disponibilité aussi bien avec la famille qu’avec le patient. Dans cette optique, on pourrait envisager des visites à domicile régulières au début du placement, où seront abordées les difficultés du quotidien mais également les facteurs pouvant être facilitateurs dans l’accompagnement.

Cette communication, indispensable, pourra permettre par la suite à la famille de repérer les difficultés, de mettre en place des stratégies pour les résoudre ou faire appel à l’équipe si besoin.

L’ergothérapeute pourra ainsi traduire les comportements au quotidien du patient en capacités, incapacités ou situation de handicap afin qu’il n’y ait pas de mauvaise interprétation de la part de la famille.

Des explications sur les retentissements de ces troubles dans les actes de la vie quotidienne pourront s’avérer nécessaire afin d’aider la famille à mieux comprendre et appréhender les comportements du patient et ainsi s’inscrire au mieux dans le projet de soin.

Par exemple, si un patient fait preuve d’apragmatisme (incapacité à entreprendre des actions), il sera important d’informer la famille sur ce symptôme afin qu’elle ne l’interprète pas comme une non-implication du patient. A court terme cette explication permettra à la famille de comprendre les comportements du patient. Puis, il conviendra de donner les clefs à la famille pour qu’elle puisse, dans un second temps, aider à désamorcer l’apragmatisme en répétant les actions, pour permettre au patient d’acquérir un automatisme sur certaines tâches de la vie quotidienne.

Il y a nécessité que le patient, autant que la famille, se place en tant qu’acteur dans la prise en charge. Pour cela, il parait indispensable de fournir les informations nécessaires à la famille et au patient et comme je le dis précédemment, de rappeler et re-situer les objectifs, de les modifier si besoin, en accord avec la réalité quotidienne décrite par la famille. Ainsi, un consensus se fait entre famille, patient et équipe qui agissent donc simultanément, avec des moyens différents mais dans un objectif commun.

L’ergothérapeute pourra donc être amené à interagir avec la famille ou le patient, séparément, selon les difficultés ou dysfonctionnements abordés afin de s’assurer de la compréhension du message, d’apporter des précisions quand cela est nécessaire et de permettre au patient de compenser ces dysfonctionnements.

Cela permettra également à l’ergothérapeute et à l’équipe de cibler les priorités du traitement et d’envisager si besoin une prise en charge extra-hospitalière afin de travailler les habiletés, l’autonomie et les capacités du patient. Dans cette démarche, un travail avec la famille d’accueil est tout aussi essentiel afin de lui permettre de cibler les tenants et aboutissants de ces activités, s’inscrivant pleinement dans une perspective de réhabilitation psychosociale du patient.

Des activités mettant en situation le patient pourront donc lui être proposées en ergothérapie pour cibler les difficultés, les réduire, les compenser ou y remédier. Par exemple, si la famille exprime le fait qu’un patient ne soit pas impliqué dans les tâches ménagères ou la cuisine, il pourra être entrepris de le mettre en situation en atelier d’ergothérapie pour ces activités. L’ergothérapeute pourra alors traduire les causes des difficultés du patient (troubles exécutifs, apragmatisme, difficulté de planification des tâches…) et entreprendre par la suite une aide et une prise en charge personnalisée. Si les habiletés sont de nouveau acquises par le patient, il faudra s’assurer que ces acquis en atelier soient restitués dans l’environnement de vie, à savoir, la famille d’accueil.

Les visites à domicile peuvent également être un moyen pour l’équipe d’évaluer si les objectifs fixés sont atteints, de réadapter le projet si besoin, et d’évaluer l’impact de l’accueil familial sur les comportements et aptitudes du patient.

Enfin, l’ergothérapeute renvoie, comme les autres intervenants, la famille d’accueil ou le patient vers l’interlocuteur concerné par le questionnement (psychiatre, assistante sociale, infirmière…).

En résumé, à moyen terme, les objectifs thérapeutiques en ergothérapie et au sein de l’équipe pluridisciplinaire, pourront être :

  • La participation à la réunion triangulaire au tout début du placement : rappeler les objectifs de l’AFT, cibler les attentes de chaque intervenant, établir le cadre.
  • Les visites à domicile régulières en début de placement : aborder les difficultés, les obstacles, les éléments facilitateurs au quotidien
  • L’explication du retentissement des troubles sur les actes de la vie quotidienne.
  • De permettre à la famille de mettre en place des stratégies compensatoires.
  • De cibler les priorités du traitement, de proposer une prise en charge extra-hospitalière en ergothérapie visant à travailler en amont les difficultés du quotidien.
  • De restituer les acquis de l’atelier dans l’environnement de vie
  • L’évaluation du patient, (de son quotidien, de son implication sociale…) permettant de vérifier si les objectifs fixés sont atteints.

Les évolutions et perspectives

Parallèlement au projet relatif à l’accueil familial thérapeutique, le projet de vie du patient, concernant ses perspectives de réhabilitation, devra être abordé par l’équipe, la famille et le patient. Cela permet d’inscrire ce type de prise en charge comme un projet transitoire afin de limiter les risques de chronicisation du placement. Il y a alors ici nécessité d’un cadre préétabli, afin que le patient voie en cette prise en charge des perspectives de sorties, d’évolutions de son projet de vie et puisse s’investir pleinement dans cette optique.

L’idée que propose le ME lors de l’entretien en ce qui concerne une durée de prise en charge préétablie à l’avance dans le projet de soin peut être intéressante. Elle permet en effet de statuer des objectifs précis en un temps donné avec des moyens divers, qui pourront être adaptés au fil de l’accompagnement du patient selon son évolution.

Ainsi, au terme du temps imparti, un bilan permettant d’évaluer l’atteinte des objectifs pourra être réalisé par l’équipe et l’ergothérapeute. Dans le cas où aucun avancement dans le projet du patient ne saurait être attendu du fait d’obstacle humains ou environnementaux, il serait alors envisageable de faire appel à une autre famille d’accueil, celle-ci pouvant permettre à terme, par une approche différente, la réalisation du projet.

Là encore, cela requiert une évaluation des compétences, valeurs, motivations et capacités de la famille dans l’accompagnement du patient afin d’apprécier si elles seraient à même d’aider à la réalisation de ces objectifs.

Si au terme du contrat, les objectifs sont atteints, les moyens seront mis en place afin d’aider le patient dans la réalisation de son futur projet. Tous les facteurs sont donc à prendre en compte. De plus, les objectifs du projet de vie doivent être en lien avec la réalité présente des capacités du patient.

En résumé, à plus long terme, les objectifs thérapeutiques en ergothérapie et au sein de l’équipe pluridisciplinaire, pourront être :

  • Etablir le projet de vie (au début du placement)
  • Evaluer les objectifs, l’évolution du patient, ses attentes pour la suite.
  • Modifier du projet si besoin : rediriger vers une autre structure ou une autre famille d’accueil
  • Evaluer les capacités de la famille à atteindre des objectifs fixés
  • Déterminer les critères de fin de placement : projet de soin accompli, opportunité de réinsertion professionnelle, sociale etc.

Un parcours en AFT demande une adaptation continuelle du projet, une collaboration étroite des différents intervenants. Le projet de soin du patient, qu’est l’accueil familial thérapeutique pourra prétendre à maintenir un équilibre dans un environnement adapté, à développer ses capacités. Tout cela ayant pour objectif d’aboutir à terme à son autonomisation, dans les domaines qu’il aura choisis d’investir et de parvenir à l’accomplissement du projet de vie.

L’ergothérapeute se situe de manière générale au cœur de la réhabilitation psychosociale du patient. De mon point de vue, l’accueil familial thérapeutique serait alors un moyen de parvenir à cette réhabilitation. D’une part, lorsque cette alternative est indiquée dans une prise en charge à court terme, dans le but de réengager la poursuite du traitement dans un espace social démédicalisé, qui favoriserait une évolution thérapeutique positive. L’ergothérapeute sera alors un intervenant privilégié de par la nécessité d’adapter sans cesse le projet, la prise en charge, les évaluations qu’elle implique, la prise en considération de l’environnement humain, matériel, des habitudes de vie etc.

D’autre part, on pourrait envisager ce type d’accompagnement lorsque les perspectives de réhabilitation sont limitées car la pathologie induit un dysfonctionnement trop important dans les activités de la vie quotidienne. Dans ce cas, la prise en charge serait abordée à long terme afin de permettre une socialisation du patient, une évolution au sein du cadre structurant d’une famille. On parlera alors d’accueil familial social et non thérapeutique.

(...)

CONCLUSION

Dans le cadre d’une démarche de soins axée sur la réhabilitation, l’établissement d’un projet de vie avec les patients atteints de psychoses permet l’élaboration d’objectifs et de moyens de prise en charge adaptés aux aptitudes, aux habitudes de vie, à l’environnement, et aux attentes de ces patients. Dans cette optique, le travail de l’équipe sera d’orienter le patient vers une prise en charge la plus adaptée possible et permettant l’accomplissement de son projet de vie.

L’accueil familial thérapeutique (AFT), peut s’inscrire dans cette démarche comme étant un outil de soin spécifique, en allant ainsi au-delà de ce que les textes de loi appellent « une alternative à l’hospitalisation ».

Ce type de soin pourra ainsi être indiqué afin de faire évoluer des patients hospitalisés vers une plus grande autonomisation et, à plus ou moins long terme, d’accéder à une réinsertion sociale susceptible de réduire, autant que possible, une dépendance avec l’institution hospitalière.

Les pathologies psychiatriques impliquant souvent des troubles complexes altérant les activités de la vie quotidienne, les interactions sociales et les comportements, l’AFT se doit d’instaurer un suivi personnalisé par une équipe de professionnels qui devra prendre en compte tous les facteurs afin d’adapter au mieux l’accompagnement du patient.

J’ai pu à travers les recherches bibliographiques et les entretiens, cibler les enjeux et attentes de l’AFT et vérifier si les compétences de l’ergothérapeute pouvaient s’inscrire dans cette prise en charge.

Par ses moyens d’action diversifiés, l’ergothérapeute apporte des compétences spécifiques pour diminuer l’impact des déficits sur les rôles sociaux, les habitudes de vie d’un individu, à l’intérieur de son environnement.

Sa démarche d’évaluation globale, permet de cibler les capacités et incapacités du patient afin d’établir un plan d’accompagnement individualisé, en accord avec le projet de vie. Les visites au domicile de l’accueil, les mises en situation et en activités pourront ensuite permettre de compenser les difficultés, de restaurer ou d’acquérir une autonomie au quotidien. Il apparait alors que l’ergothérapeute pourrait entrer clairement dans les champs d’actions de l’AFT et s’imposer comme un acteur-clé dans la réhabilitation psychosociale du patient. Or, d’après mes recherches, très peu d’ergothérapeute travaillent au sein de services d’AFT.


Pour en savoir (beaucoup) plus : consultez la version intégrale de ce mémoire !!!

La réhabilitation psychosociale de patients psychotiques
Rôle et intérêt de l’ergothérapeute au sein d’un service d’accueil familial thérapeutique

P.-S.

Voir également cette présentation du Dr François Petitjean, Psychiatre Clinicien Hospitalier à Ainay-le-Château) - Conférence sur l’Accueil familial Thérapeutique, Lyon, Service universitaire de Réhabilitation, 22 octobre 2013.