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Agréer les assistantes maternelles - pour quoi ? comment ?

Bernard RUHAUD, conseiller socio-éducatif - Conseil Général de la Charente-Maritime, aide sociale à l’enfance

Qu’attend-on des assistantes maternelles ? Pourquoi le législateur a-t-il rédigé, en moins de 15 ans, un premier, puis un second statut ? Qu’en attendent les services qui délivrent l’agrément ? Qu’en attendent les employeurs ?

Observons rapidement dans l’histoire les raisons pour lesquelles il a été recouru à ce que l’on appelle aujourd’hui l’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). . Nous constatons que si les moyens, les conditions d’accueil et les objectifs ne sont pas comparables, les raisons, elles, n’ont pas changé.

De tout temps des enfants ont été confiés à d’autres familles. Mais il faut distinguer le placement qui relève d’un mode d’éducation ordinaire de celui qui concerne des enfants sans parents ou dont les parents sont en difficulté. Sous l’Ancien Régime, la pratique faisait que, dans toutes les couches de la société, les enfants étaient élevés par d’autres personnes que leurs parents, au moins pendant leurs premières années. Aujourd’hui, les parents qui travaillent confient leurs enfants pendant la journée à des assistantes maternelles non permanentes ou à des crèches. L’accueil familial diffère de ce type de prise en charge en ce qu’il concerne des enfants dont les parents sont inexistants ou défaillants.

Les enfants abandonnés ou orphelins ont d’abord été accueillis dans les hospices. Leur placement dans des familles ne remonte qu’à un peu plus de deux siècles. A Paris notamment, à la veille de la Révolution, le nombre d’abandons atteignait 30% de l’ensemble des naissances. Vieillards, mendiants et enfants abandonnés étaient accueillis dans les hospices où la mortalité frappait 90 à 95% de ces derniers. C’est afin d’endiguer cette mortalité que l’hospice des enfants trouvés modifia en 1761 son règlement intérieur pour organiser l’accueil dans des familles rurales. Puis, la République fit de la prise en charge de ces enfants un devoir d’État. À la charité privée se substitua l’assistance publique. Les enfants orphelins ou abandonnés furent placés à la campagne, dans des familles rémunérées. Les autorités exercèrent un contrôle de cette activité.

Depuis, l’abandon est devenu un phénomène très limité. Les grands fléaux ont été vaincus. Des institutions modernes, disposant d’un personnel qualifié et de conditions d’accueil confortables, ont succédé aux hospices. Pourtant, c’est toujours pour des questions de moyens et de qualité d’accueil que le métier d’assistante maternelle a été créé il y 21 ans.

Exposant les motifs ayant présidé à la modification du statut des assistantes maternelles en 1992, Nelly Rodi, rapporteur du projet de loi en première lecture devant le Sénat, déclare : "... nous avons conscience de la nécessité d’encourager la profession d’assistante maternelle, tant pour renforcer la qualité de l’accueil des enfants que pour éviter que, faute d’un recrutement suffisant, on ne soit amené à développer les placements dans les établissements dont ni les conditions d’accueil ni le coût ne sont comparables." Telles sont les raisons pour lesquelles le législateur a créé la profession d’assistante maternelle en France, premier pays à l’avoir fait.

Au 31/12/92, un peu plus de la moitié des enfants séparés de leur famille reste accueillie en établissement malgré un coût moyen trois fois plus élevé. Ce ne sont donc pas uniquement les préoccupations budgétaires qui motivent les pouvoirs publics pour promouvoir l’accueil familial, mais aussi la qualité de l’accueil. Ils reconnaissent ainsi que, pour près de la moitié des enfants, l’accueil dans le milieu ordinaire d’une autre famille est satisfaisant, sinon préférable.

Voyons ce qu’en pensent les services chargés de l’agrément et ceux qui emploient les assistantes maternelles. Le recul de six années d’application du nouveau statut laisse apparaître des avis nuancés, sinon contraires, sur les critères d’agrément. Il n’est pas rare d’entendre qu’ils sont trop légers, qu’ainsi rédigés ils permettent d’agréer tout le monde. Chacun admet volontiers que ce qui est demandé aux assistantes maternelles est bien supérieur à ce que fixent des critères d’agrément prévus pour une éducation ordinaire.

L’activité demandée aux assistantes maternelles permanentes relève-t-elle d’une éducation ordinaire ou spécialisée ? Si l’on définit la seconde comme un accompagnement nécessaire de l’enfant lorsque, pour des raisons plus ou moins graves, son éducation ne peut être assurée normalement par les personnes qui en le droit et le devoir, l’accueil familial relève de ce type d’intervention. Mais, l’instrument de travail que constitue le milieu familial de l’assistante maternelle peut-il répondre à de telles exigences ?

Certains symptômes, supportables en milieu spécialisé, sont difficilement tolérables dans une famille. Pourtant, malgré ces difficultés dont l’importance échappe généralement à quiconque ne connaît pas de près cette activité, nous avons tous les jours des exemples dans lesquels le travail accompli auprès de l’enfant par des assistantes maternelles aboutit à des résultats étonnants qui n’auraient peut-être pas été atteints en établissement spécialisé.

Cette particularité de l’accueil familial est renforcée par le fait que la population d’enfants accueillis a changé. Aux pupilles, abandonnés ou orphelins, a succédé une majorité d’enfants dont les parents existent. Dans les services d’aide sociale à l’enfance, 62% des enfants confiés à des familles d’accueil font l’objet d’une mesure judiciaire, c’est à dire qu’ils ont été et sont encore en danger dans leur milieu. Tous n’en sont pas gravement perturbés, mais tous ont à faire l’expérience d’un partage entre deux types de parentalité, avec les mouvements intérieurs souvent bruyants et toujours complexes que cela provoque.

L’accueil familial ne consiste plus à élever un enfant comme si c’était le sien. L’assistante maternelle n’accueille d’ailleurs pas seulement l’enfant, elle reçoit avec lui tout une histoire familiale, et parfois les parents eux-mêmes. Les rapports directs ou indirects qu’elle entretient nécessairement avec des parents qui conservent l’autorité parentale et "en exercent tous les attributs qui ne sont pas incompatibles avec l’application de la mesure" sont toujours délicats. Quelle que soit la position que l’on adopte sur le maintien des liens, nul ne peut ignorer combien il est difficile à celle qui entoure l’enfant d’accepter qu’il retourne régulièrement séjourner dans des conditions généralement moins bonnes. Tout cela complique sensiblement un accueil familial par des exigences dont les critères d’agrément ne sont pas le reflet.

D’autres obligations accroissent la difficulté de cette activité. Depuis 1958, l’objectif de l’assistance éducative n’est pas seulement de protéger l’enfant, mais de le faire dans la perspective d’un retour dans son milieu. Chacun sait combien l’assistante maternelle est déchirée par l’attachement nécessaire et inévitable qui s’est créé avec l’enfant. Or, l’attente du législateur est sans ambiguïté sur ce point. Les sénateurs ont tranché sur des termes qui ne sont pas anodins en rejetant un amendement qui proposait de substituer "assistant parental" à "assistante maternelle". La raison de ce choix tient notamment à ce qu’ils ont voulu éviter que l’appellation d’assistant parental soit interprétée comme un transfert de l’autorité parentale sur la famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! . Ceci indique qu’ils attendent de l’assistante maternelle qu’elle ne se substitue pas aux parents.

On retrouve ce souci dans la transformation du "placement familial" en "accueil familial". Le placement est le fait de mettre quelqu’un ou quelque chose à sa place alors que l’accueil consiste à admettre quelqu’un au sein d’un groupe, d’une famille, d’une assemblée. La nouveauté du terme indique bien qu’il s’agit d’apporter ce qui manque à l’enfant dans sa famille, c’est à dire d’y suppléer et non de s’y substituer, en attendant qu’il puisse reprendre sa place, c’est à dire de faire en sorte que ceux qui ont conservé l’autorité parentale en recouvrent le plein exercice.

Alors, la loi est-elle mal faite ? En établissant des critères d’agrément aussi simples, les élus n’ont-ils pas sous-estimé, par méconnaissance, le travail réel demandé aux assistantes maternelles ? N’aurait-il pas été nécessaire d’établir des critères plus exigeants ? C’est un point de vue défendable. Un autre point de vue peut considérer qu’il s’agit, au contraire, de préserver la possibilité d’accueillir des enfants dans un milieu non spécialisé, pour des raisons financières mais aussi pour ne pas aggraver la marginalisation dont ils sont victimes en raison de leur histoire. Ou encore, on peut considérer qu’il serait dommageable de dénaturer, par des exigences élevées, un type d’accueil en famille ordinaire dont les résultats sont satisfaisants, sinon probants.

Quelle que soit la rigueur des critères d’agrément, auraient-ils d’ailleurs permis d’anticiper les qualités nécessaires à telle ou telle rencontre entre une famille et un enfant ? Ce n’est pas certain. Aussi simples soient-ils, les critères établis par la loi de 1992 ont le mérite d’avoir fait disparaître l’usage antérieur de critères de "motivation", de "non-appropriation de l’enfant", voire de "non-attachement" dont les fondements étaient aussi douteux que l’efficacité.

Voyons enfin le problème posé par le fait que, dans la plupart des cas, le même service délivre l’agrément et emploie l’assistante maternelle. Sur 40 000 assistantes maternelles agréées à titre permanent, 36 000 sont employées par les services d’aide sociale à l’enfance. Le fait que la délivrance des agréments relève de services départementaux qui sont les plus grands employeurs d’assistantes maternelles n’entraîne-t-il pas une confusion entre agrément et emploi ? Si ce qui est demandé aux assistantes maternelles est supérieur à ce que prévoient les textes, n’y a-t-il pas alors, de la part de l’employeur qui délivre l’agrément, une surenchère de critères ?

On peut considérer qu’une adéquation entre critères d’agrément et critères d’emploi permet de mieux adapter l’agrément à l’emploi. Mais ce serait alors au détriment d’un statut qui n’aurait, de fait, plus de consistance. Chacun, attaché ou travailleur social, pourrait créer un statut à sa mesure, selon sa propre conception de l’accueil familial, voire selon ses valeurs personnelles. Ainsi - cela s’est vu - untel, considérant qu’un homme est nécessaire à la maison, refuse l’agrément à une candidate dont le mari, routier, n’est présent que le week-end. Un autre, tenant à ce que chaque enfant ait sa chambre, refoule la candidate ou lui fait engager des frais importants pour un emploi hypothétique. Pour un autre, il est difficile d’exercer ce métier au-delà d’un certain âge.

Il se peut (c’est discutable) que, pour tel enfant, l’âge de l’assistante maternelle doive être pris en compte. Mais ceci ne relève pas des critères d’agrément qui ne fixent aucune condition d’âge, sinon (mais il s’agit d’un critère d’emploi) un écart minimum de dix ans entre accueilli et accueillant. Des services, craignant que les assistantes maternelles ne s’approprient les enfants, refusent l’agrément au prétexte que la candidate sera vieille quand il sera grand. Ici, n’est-ce pas le service qui s’approprie l’enfant en s’organisant d’emblée pour un placement qui dure ?

Certes, on peut supposer que la présence régulière d’un mari, ou une chambre réservée à l’enfant soient utiles. Peut-on en conclure que cela est nécessaire à tous les enfants et que l’absence de ces conditions ne garantit pas la santé, la sécurité et l’épanouissement ?

Ce dont il s’agit, c’est de recruter parmi les assistantes maternelles celle qui dispose des conditions qui semblent les plus propices à l’accueil de tel enfant, et non de modeler tous les agréments et toutes les assistantes maternelles sur un enfant-type qui n’existe pas. L’alchimie des relations qui se produit lors d’un placement échappe d’ailleurs à toute prévision, si utile et sérieuse soit-elle. Certes, il est nécessaire de réfléchir, lors de la préparation du placement, au type d’assistante maternelle et de famille qui serait le mieux approprié à l’accueil de tel enfant. Mais l’avenir nous réserve souvent des surprises. Celle-ci, qui semblait correspondre aux prévisions, rencontre des difficultés ; telle autre, à laquelle nous n’aurions pas délivré l’agrément, permet à l’enfant d’évoluer de façon satisfaisante.

Tout employeur a le droit, dans la limite des règles énoncées par le code du travail, d’avoir des critères de recrutement supérieurs aux critères d’agrément. Par exemple, prévoyant des déplacements fréquents, il peut exiger que l’assistante maternelle dispose du permis de conduire et d’un véhicule. Mais cela ne constitue pas un critère d’agrément, sauf à démontrer que la santé, la sécurité et l’épanouissement du mineur accueilli ne sont pas garantis si la candidate n’a pas le permis de conduire. Outre qu’elle empêche des candidates d’exercer cette profession, la confusion entre agrément et emploi prive les services de personnes dont rien ne dit qu’elles soient incompétentes, sinon des exigences et des à priori contraires au droit.

Certes, il reste toujours aux candidates refoulées abusivement la possibilité de saisir la commission consultative paritaire départementale, voire le tribunal administratif. Mais, même si elle est assez instruite de ces possibilités de recours, assez adroite pour faire valoir ses droits, et assez patiente pour engager ces démarches, je ne donne pas cher de l’emploi d’une assistante maternelle qui aurait imposé son agrément au principal service susceptible de l’employer !

La loi de 1992 n’a pas permis de résoudre cette difficulté. Or, cette confusion avec le recrutement constitue la principale source de problèmes et de divergences qui s’attachent à la question de l’agrément. À défaut de pouvoir confier l’agrément à des services autres que les départements-employeurs, il serait judicieux de réserver cette tâche à des personnels connaissant bien le statut et la profession, mais qui n’accompagnent pas les situations de placement.

Que resterait-il alors aux employeurs, aux équipes et aux assistantes maternelles pour mettre en adéquation des critères d’agrément très souples et les exigences de cette profession difficile ?

Il ne s’agit pas de coopter des personnes, mais d’accompagner des situations toutes différentes et de former des gens dont les ressources ne peuvent apparaître avant l’emploi. Une politique judicieuse, visant à utiliser des conditions familiales ordinaires comme instrument efficace pour l’accueil d’enfants en difficulté, consiste à substituer à la rigueur des sélections une formation de qualité et un accompagnement soutenu. D’ailleurs, nous n’avons pas le choix. La réglementation ne permet pas cette orientation, elle nous oblige à l’appliquer. Encore convient-il de la respecter...

Pas clair ???


Pour terminer, examinons quelques exemples d’application des textes.

L’article 123.1 du Code de la Famille et de l’Aide Sociale stipule que "la personne qui accueille habituellement des mineurs à son domicile moyennant rémunération doit être préalablement agréée comme assistante maternelle par le président du conseil général du département où elle réside." Le second alinéa fixe les critères d’agrément qui doivent garantir la santé, la sécurité et l’épanouissement des mineurs accueillis. L’article 2 du décret du 29/09/92 relatif à l’agrément est plus précis : le candidat doit "présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif." Un examen médical est exigé qui doit vérifier la possibilité d’accueillir habituellement des mineurs. Enfin, l’état, les dimensions et l’environnement du logement doivent permettre d’assurer le bien-être physique et la sécurité du mineur en tenant compte de son âge.

Tels sont tous et les seuls critères en fonction desquels l’agrément peut être accordé ou refusé. Voyons en quoi leur interprétation pose éventuellement problème.

Selon l’article 123.1, c’est à son domicile que l’assistante maternelle exerce sa profession. Permis de conduire et moyens de transport ne sont donc pas des critères d’agrément, sauf si la personne est à ce point isolée que cela ne permet pas d’offrir les garanties prévues. L’employeur peut exiger cette condition. Dans ce cas, il est logique que cela figure au contrat de travail, et que la nature et le rythme des déplacements soient mentionnés dans le contrat d’accueil.

L’adverbe "habituellement" est précisé par l’article 123.4 qui exclut de l’obligation d’agrément un accueil prévu pendant les vacances scolaires, les congés professionnels, les loisirs. Une personne peut donc accueillir des enfants et être payée pour cela pendant les congés des enfants. Mais il est probable que cette activité soit encadrée par d’autres dispositions réglementaires.

Concernant le lien de parenté, cet article dispense de l’agrément les personnes employées par des particuliers. Les personnes employées par l’aide sociale à l’enfance ou des services privés doivent donc toujours être agréées, même pour l’accueil d’un petit-fils, d’un neveu, d’un cousin.

Une décision de justice récente illustre l’interprétation qui doit être faite des termes "moyennant rémunération". Un assistant maternel, agréé pour l’accueil de trois enfants, accueillait en plus, mais sans rémunération, en qualité de tiers digne de confiance, deux mineurs confiés par le juge des enfants. Considérant que cela n’était pas possible, le département a réduit l’agrément de trois à un. Saisi par l’assistant maternel, le tribunal administratif lui a donné raison. Une assistante maternelle peut donc accueillir un nombre de mineurs supérieur à celui prévu dans son agrément, à condition qu’elle ne soit pas rémunérée pour ceux-ci, et sous réserve que restent garanties les conditions de santé, de sécurité et d’épanouissement. L’exercice d’une autre profession n’est pas un obstacle à l’agrément. L’article 7 du décret du 29/10/36 permet à l’assistante maternelle d’exercer plusieurs métiers et de travailler pour plusieurs employeurs. Le décret du 14/10/94 oblige cependant l’assistante maternelle employée par l’aide sociale à l’enfance à obtenir l’accord du service, mais il s’agit aussi d’un critère d’emploi et non d’agrément. Un département qui n’accorderait l’agrément qu’à des personnes sans emploi le ferait illégalement.

Plusieurs personnes d’un même domicile peuvent être agréées, chacune pour un nombre d’enfants pouvant aller jusqu’à trois, et toujours à condition que soient respectées les garanties prévues. Il peut s’agir du conjoint, de parents ou de quiconque partage l’habitation. Le célibat, un veuvage ou un divorce ne constituent nullement des critères de refus ou de retrait d’agrément.

Des services retirent l’agrément à une assistante maternelle qui n’exerce pas. En soi, le fait de ne pas accueillir d’enfant ne justifie en rien ce retrait. Cependant, l’obligation de formation provoque ici un vide juridique. C’est l’employeur qui finance la formation. L’assistante maternelle sans emploi qui ne serait pas en mesure de présenter d’attestation de formation, lors du renouvellement d’agrément, se le verrait refuser. La question se pose surtout pour les assistantes maternelles qui sont au chômage et n’ont pas pu suivre tout ou partie de la formation dans les délais prévus. Par contre, pour les assistantes maternelles dispensées de la formation ou pour celles qui l’ont suivie, l’absence d’emploi, même volontaire, ne peut justifier le retrait ou le non-renouvellement de l’agrément.

Certains services accordent l’agrément en limitant d’autorité le nombre et l’âge des mineurs susceptibles d’être accueillis. Ils ne peuvent le faire qu’en justifiant en quoi un nombre supérieur ou un âge différent ne permettraient pas le respect des critères d’agrément.

D’autres refusent une extension d’agrément au prétexte qu’un enfant déjà accueilli a besoin de tous les soins de l’assistante maternelle. Cette restriction peut constituer un critère d’emploi (à condition que des majorations de salaire compensent éventuellement des charges de travail qui empêchent d’exercer auprès de plusieurs enfants), mais pas un motif de refus. Seuls pourraient intervenir alors des raisons liées à l’état du logement.

Parfois, il est aussi considéré que le salaire de l’assistante maternelle ne doit pas constituer le revenu principal du foyer, et l’agrément est refusé pour cette raison. Une telle attitude témoigne combien cette profession est parfois considérée comme une activité secondaire, voire subalterne. Elle n’a aucun fondement juridique.

La loi de 1992 a étendu à tout le pays la validité de l’agrément, sous réserve que l’assistante maternelle en avise le président du conseil général concerné. Certains services procèdent à une nouvelle enquête d’agrément. En soi, cela n’a rien d’anormal. Mais elle ne peut aboutir à un retrait ou à une limitation de l’agrément que si les nouvelles conditions d’habitat ne correspondent plus aux exigences prévues.

Des retraits d’agrément sont parfois entrepris lors de graves conflits opposant un service et une assistante maternelle à propos de son attitude vis à vis de l’enfant accueilli. Là encore, il faut que le service s’appuie sur des garanties devenues insuffisantes au vu des critères d’agrément et non qu’il limite ses motifs à la façon dont l’emploi est exercé. Encore doit-il s’assurer que ce n’est pas par défaut de l’accompagnement professionnel prévu à l’article 123.9 que la situation a dégénéré depuis l’agrément et l’emploi. Un employeur peut, pour de graves motifs professionnels, considérer qu’il ne peut plus travailler avec une assistante maternelle. Un autre peut parfaitement avoir besoin de ses services. Depuis le décret d’octobre 1994, des mesures de sanction sont applicables aux assistantes maternelles employées par l’aide sociale à l’enfance. Il y est rarement fait recours pour justifier une suppression d’emploi, voire d’agrément. Aucune jurisprudence n’a encore permis de vérifier la légalité de cette attitude. Elle présente d’ailleurs de graves inconvénients. D’abord, la raison n’est pas caractérisée, parfois elle n’est même pas dite. Ensuite, l’assistante maternelle est privée des moyens de défense prévus en cas de sanction. Enfin, cela jette le trouble parmi les assistantes maternelles employées par le service qui peuvent craindre une même conséquence si elles ont avec lui quelque divergence somme toute normale. Elles ne peuvent alors plus travailler en confiance avec les équipes.

Nous avons vu plus haut les questions d’âge et de disposition des locaux. J’ajoute que les textes ne mentionnant pas d’âge minimum ou maximum, c’est à tort qu’il est parfois procédé au refus ou au retrait de l’agrément d’une personne qui est à la retraite. Elle peut d’ailleurs, et c’est particulier à cette profession, cumuler emploi d’assistante maternelle et indemnités de retraite.

Nous ne pouvons énumérer ici toutes les situations possibles. Les termes de la loi, aussi précis soient-ils, ne peuvent prévoir tous les effets de son application. Or, les notions de santé, de sécurité et d’épanouissement qui servent de critères à l’agrément sont très larges. Il me semble qu’il faut les interpréter en référence à une situation éducative en famille ordinaire, c’est à dire qu’ils sont à peu près applicables à tout le monde. Une fois de plus, c’est la qualité des formations et de l’accompagnement qui doit permettre de faire en sorte que les personnes agréées offrent les qualités et attitudes requises.

Dans tous les cas, un refus ou un retrait d’agrément doivent être dûment motivés. C’est à dire que l’administration doit les justifier par écrit, par lettre recommandée lettre recommandée Le courrier recommandé peut être remplacé par une "Lettre remise en main propre en deux exemplaires contre décharge". Lors de sa remise, le destinataire doit écrire « Lettre reçue en main propre le (date de remise) », et signer. avec avis de réception, et selon des termes qui mentionnent en quoi la situation ne répond pas ou plus aux critères prévus par les textes, et seulement ceux-là.