La Belgique reste un pays composite, traversé de particularismes, en phase de fédéralisation toujours plus accrue et de différenciation toujours plus prononcée.
Le placement familial pour adultes y est représenté à travers deux grands courants : l’accueil familial
Accueil familial
Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois).
thérapeutique et l’accueil familial social. L’accueil familial thérapeutique
AFT
Accueil Familial Thérapeutique
Des personnes souffrant de troubles mentaux peuvent être prises en charge au domicile de particuliers formés, agréés et employés par des établissements psychiatriques.
reste encore actuellement (mais pour combien de temps ?) un domaine de compétence nationale, relevant du secteur hospitalier, c’est-à-dire des budgets INAMI (assurance-maladie). L’accueil familial social, lui, a été dévolu à la compétence des communautés et régions, ce qui a pour conséquence que coexistent actuellement quatre législations légèrement différentes, issues du même tronc commun (le fonds de soins médico-socio-pédagogiques pour handicapés, appelé également Fonds 81, créé en 1967).
1. L’Accueil Familial Thérapeutique
Dans l’histoire du placement familial, Geel est la référence mondiale de la genèse de l’organisation progressive, au fil des siècles, de l’accueil familial thérapeutique : depuis les pèlerinages médiévaux auprès de Sainte Dymphne, en passant par les colonies d’aliénés, jusqu’à la situation actuelle...
Depuis peu, en 1991 seulement (arrêté royal du 10/04/91), une législation spécifique existe qui définit et organise le placement familial thérapeutique : il s’agit d’une forme d’hospitalisation qui requiert à la fois des soins et un encadrement au domicile des familles d’accueil, mais aussi la nécessité d’un service spécifique au sein de l’hôpital, destiné à l’observation et aux périodes de crises éventuelles, trop lourdes pour les familles d’accueil.
En terme de personnels, des normes spécifiques prévoient l’encadrement suivant pour 30 places : 2 infirmiers à temps plein, 1 aide sanitaire et familiale à temps plein, et enfin 1,5 temps plein pouvant être au choix un licencié ou un gradué paramédical, social, psychologique, pédagogique ou artistique. Ces fonctions sont spécifiques à l’accueil familial thérapeutique et supplémentaires à celles d’un service hospitalier psychiatrique normal.
Un nombre maximum de places a été établi dès la mise en place de la loi, soit 967, ce qui correspondait au nombre de places existantes à l’époque dans les deux seuls hôpitaux pratiquant officiellement l’accueil familial thérapeutique (Geel et Lierneux). Il faut remarquer que, depuis 1991, ces deux hôpitaux voient décroître progressivement le nombre des placements familiaux thérapeutiques (actuellement 600 à Geel et 120 à Lierneux) ; il semblerait qu’un certain nombre de ”places” non utilisées pourraient l’être par d’autres hôpitaux.
Les familles d’accueil sont agréées par une commission spéciale, composée de membres du pouvoir organisateur de l’hôpital. Elles sont indemnisées, mais pas salariées. L’indemnisation varie en fonction de la ”lourdeur” de la prise en charge, des conditions de confort et pédagogiques de l’accueil et de la capacité de l’accueilli à y rendre des services. Le prix va de 550 à 600 FB par mois. L’accueilli doit payer à l’hôpital une facture d’hospitalisation, selon les mêmes critères que tout patient hospitalisé.
En conclusion, ce secteur est mieux reconnu et structuré et reste toujours actif, quoiqu’en décroissance lente dans les deux seuls services agréés pour toute la Belgique. Son avenir ne se conçoit que dans une dispersion plus grande des lieux et donc des pratiques d’accueil familial thérapeutique.
2. L’Accueil Familial Social
Ce secteur recouvre principalement l’accueil familial destiné à des personnes handicapées (enfants et adultes) ; il s’agit principalement de handicap mental léger à modéré.
Cette pratique est régie à l’origine par l’arrêté royal n° 8 (donc commun à tout le territoire) du 10/11/67. Cet arrêté permet l’agrément et la subsidiation de toute une série de structures d’hébergement, de soins et d’occupation de personnes handicapées mentales, physiques ou sensorielles (c’est-à-dire en principe excluant les ”malades mentaux”). C’est ainsi que, à côté des homes, des centres de jour, des semi-internats, des structures d’aide à la vie journalière, ont pu naître plusieurs services de placement familial ; il s’agit chaque fois de petits services, généralement indépendants d’autres structures.
Le service recherche des familles d’accueil dans son aire géographique (généralement la province), les sélectionne, en assure la guidance et les indemnise (pas de famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! salariée). Le montant de l’indemnisation varie de 600 à 750 FB (en fonction de l’âge et de la lourdeur du handicap). La personne accueillie doit verser au service une part contributive qui varie selon ses revenus (au maximum : 1.008 FB par mois).
Ces modalités financières sont très différentes d’une région à l’autre : en effet, il est patent que la région flamande a volontairement voulu développer ce type de prise en charge en favorisant les conditions financières, aussi bien du côté des familles d’accueil (indemnisation plus importante) que du côté des personnes accueillies (garantie d’argent de poche plus important ; octroi d’une allocation d’insertion socioculturelle ; part contributive réduite).
La région wallonne, elle, tout comme la communauté germanophone, continue à appliquer au placement familial quasiment les mêmes modalités financières que celles en vigueur pour les homes d’hébergement, ce qui ne favorise pas le développement des accueils familiaux. Enfin, en région bruxelloise, les modalités financières se situent actuellement à peu près entre celles des autres régions.
Une enquête du Groupe de Recherche Européen en Placement Familial, branche Wallonie-Bruxelles, réalisée en 1996 (basée sur la situation de 1995), faisait état de la répartition suivante du nombre de placements d’enfants handicapés et d’adultes en famille d’accueil :
- Flandres 639 placements dans 10 services
- Wallonie 56 placements dans 4 services
- Bruxelles 30 placements dans 1 service
soit un total de 725 placements dans 15 services
La législation de base prévoyait comme normes de personnels les fonctions suivantes, pour 30 personnes placées en famille d’accueil : un directeur à temps plein, une secrétaire à temps plein, une assistante sociale à temps plein, un psychologue à mi-temps, et un psychiatre à raison de 6 heures par semaine.
Suite à la communautarisation, de légères différences sont apparues là aussi. Ainsi, en région wallonne, on a supprimé le poste du psychiatre et renforcé la fonction d’assistante sociale en diminuant la fonction secrétariat.
Une difficulté de ce secteur est effectivement son peu de poids en terme de nombre de personnes prises en charge, par rapport à l’importance des prises en charge de type collectif (homes et structures d’hébergement pour handicapés). La législation du placement familial a d’ailleurs été greffée sur celle des homes, non seulement en termes de parts contributives, mais également en termes de normes générales de fonctionnement (officiellement, les services de placement familial sont tenus de respecter les mêmes normes d’hygiène et de salubrité de logement que celles des homes ; idem pour les normes de sécurité en termes d’incendie...). Le placement familial reste quelque chose d’hybride en termes de législation, et donc également en termes de pratiques de travail de la part des services.
Cependant, un avantage de cette législation lacunaire est la grande autonomie de fonctionnement des équipes psychosociales qui élaborent elles-mêmes (au prix d’incessants tâtonnements...) leurs normes de fonctionnement : modalités de recrutement des familles d’accueil, normes d’agrément de ces familles d’accueil, modalités de guidance, conditions minimales de maintien, modalités de fin d’accueil, nombre de personnes accueillies par famille... Cette grande autonomie est aussi un risque de pratiques minimalistes, voire de dérives. Mais il nous semble que ce n’est pas le cas actuellement, grâce au rôle de partage d’informations et de rencontres entre services qu’assurent actuellement deux fédérations, le GREPFA et son homologue flamand.
A côté de l’accueil familial pour handicapés, on peut citer pour mémoire l’accueil familial pour personnes âgées (une expérience a échoué à Anvers en 1993-94 ; un autre projet vivote à Namur) et l’accueil familial pour toxicomanes sevrés (un service pilote a commencé à Bruxelles depuis trois ans environ). Dans ces deux domaines, il n’existe pas de législation. Dans ce contexte, il y a peu d’espoir de voir prochainement se développer en Belgique ces formes alternatives de prises en charge.