Introduction
Au quotidien de l’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). , nous occupons tous des places différentes : assistantes maternelles, pères d’accueil, travailleurs sociaux, secrétaires... Nous jouons la partition qui nous revient sans avoir toujours l’occasion de la confronter à celle de l’autre, et le résultat en devient plus ou moins harmonieux. Mais, qui s’intéresse aux fausses notes : à celles de chacun et à celles de l’ensemble ? Qui peut nous aider à les relever ? Est-ce seulement pour les sanctionner ?... Les enfant n’en font-ils pas les frais à leurs dépens : ceux que nous accueillons, mais aussi nos propres enfants et tout notre entourage familial.
Il ne s’agit pas ici d’examiner toutes les partitions, mais celle jouée par l’assistante maternelle et sa famille. Je vais aborder cette question avec un souci d’objectivité certes, mais avec mon regard d’assistante maternelle. J’essaie d’englober l’ensemble du dispositif du placement familial mais, je parle toujours de ma place, et j’emploie spontanément le "nous" qui signifie assistantes maternelles ou familles d’accueil. Mes lunettes sont ajustées à partir de ce regard, j’essaie de le relativiser mais je ne peux ni l’évincer, ni le nier.
I. Le contexte du placement familial
1. Placement ou accueil : est-il indifférent d’employer l’un ou l’autre ?
Sur le terme placement, le Petit Robert nous dit : "action de placer des objets dans un placard, des convives autour d’une table...". Il s’agit donc d’attribuer une place, fut-elle provisoire. Ce qui nous permet de mettre en évidence deux idées-forces : une notion de lieu, et une notion d’autorité (la personne qui place).
En rapportant ces éléments au placement familial, le lieu provisoire passe par le service employeur, mais il est concrètement représenté, pour l’enfant, par notre espace familial. Et, l’acte d’autorité est posé, en ce qui concerne l’assistance éducative, par un juge des enfants dont le service employeur se fait le relais. Dans le cas de l’accueil provisoire, ce sont les parents eux-mêmes qui posent cet acte.
Quant au terme accueil, il évoque la réception, c’est-à-dire un moment, habité par une présence, qui met du temps à disposition. Donc, là où la notion de placement renvoie à un lieu, celle d’accueil évoque un temps plus ou moins limité. Et, à la notion d’autorité contenue dans le placement s’oppose celle de disponibilité intrinsèque à l’accueil.
Le terme accueil se rapporte davantage à notre fonction d’assistante maternelle (en anglais, assistante maternelle se dit foster mother, littéralement mère d’accueil). Je réserverai donc l’expression placement familial pour les actes autoritaires qui ne relèvent en rien de la fonction d’assistante maternelle, et j’adopterai celui d’accueil familial pour évoquer cette fonction.
Cette distinction n’est pas seulement une question de vocabulaire, elle nous aide à mieux nous positionner dans le dispositif et à saisir notre rôle (présence, disponibilité, durée indéterminée...). La comparaison pourrait être poussée plus loin : à la forme statique de la place s’oppose le dynamisme de l’accueil. En résumé, le terme d’accueil désigne à la fois l’endroit où nous nous situons, et toute la dynamique que l’on peut en attendre.
2. Suppléance ou substitution ?
Le suppléant remplace en l’absence du titulaire, mais il ne prend pas sa place, ou alors il devient titulaire. On reconnaît là, au passage, la fonction de l’assistante maternelle ou de la famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! qui remplace temporairement la famille de l’enfant, sans prendre sa place, sans se substituer à cette famille.
A l’inverse, la substitution est un acte qui tend à évincer l’autre, à prendre définitivement sa place en toutes circonstances. Cependant, une expression est couramment employée : "ce placement est de type substitutif", sous-entendu les parents sont pratiquement absents et la famille d’accueil devient la référence essentielle pour l’enfant. Pourtant, la seule véritable substitution possible est l’adoption. On sort alors du champ de l’accueil familial.
Il semble en fait que l’accueil familial se situe dans un continuum entre suppléance et substitution. Au départ, dans une certaine suppléance, nous commençons par remplir la fonction de remplacement de la mère de l’enfant ou de ses parents, au quotidien. Puis, petit à petit, selon les circonstances, l’investissement affectif va grandissant, les tâches auprès de l’enfant vont en s’amplifiant. Mais, dans ce continuum, il y a une rupture (limite à ne pas franchir) car, si la famille d’origine est évincée, on sort du champ du placement familial. Ceci introduit le rôle du service en tant que garant de la dimension de suppléance, venant, par son intervention, interdire l’identification totale ou substitution, place de tiers essentielle.
3. Principales difficultés rencontrées par l’enfant déplacé
L’enfant étant au centre des préoccupations même si nous traitons la question par le biais de la fonction d’assistante maternelle, il est utile de situer la problématique de l’enfant déplacé.
Qui dit déplacement dit arrachement, même si aujourd’hui on y met les formes. La situation vécue par l’enfant était certes perturbée mais elle constituait son réseau d’attachement. Même si ce déplacement ne brise pas les liens, il les distend. Les repères sur lesquels, tant bien que mal, il s’appuyait, s’effondrent... Comment, dans ces conditions, peut-il se construire, grandir ?
La séparation déstabilise l’enfant et hypothèque sa confiance en l’adulte. Certes, elle provient essentiellement d’un environnement familial pathogène que l’enfant ressentait, sans doute plus ou moins, mais pour autant, il lui est difficile, si ce n’est impossible, d’en comprendre les raisons. Par conséquent, la blessure est grande. Il ne perçoit qu’une chose : il est puni ! Mais, pourquoi ? Qu’a-t-il donc fait de mal ? Il lui est impossible d’identifier ce mal, donc c’est tout son être qui est mauvais, et s’il est mauvais, personne ne peut l’aimer. Inconsciemment il va rechercher le rejet ! Tous ces éléments se vivent à notre insu à l’intérieur de la famille d’accueil.
Comme le dit Myriam David, "cette nouvelle famille est nécessairement bonne puisque choisie pour remplacer l’autre qui ne peut être que mauvaise". L’enfant place alors cette nouvelle famille sur un piédestal, et ses repères identitaires en sont complètement perturbés.
Dans ces conditions, comment aimer l’une sans rejeter l’autre ? Ainsi, l’enfant se trouve partagé et pris inconsciemment dans un dilemme de lutte pour et contre son appartenance, tantôt à l’une tantôt à l’autre de ces deux familles. Peut-il appartenir aux deux ? En se rapprochant de l’une, ne trahit-il pas l’autre ?
Il se retrouve là au cœur d’un "conflit de loyauté". Comment être loyal avec les deux familles à la fois ? Comment épouser les valeurs de l’une sans trahir celles de l’autre ? On repère là certains conflits qui émergent particulièrement à l’adolescence et nécessitent parfois un placement en foyer pour permettre au jeune de se soustraire à ce tiraillement impossible.
Pendant ce temps-là, pour nous, assistantes maternelles ou familles d’accueil, qu’en est-il ?...
4. Principales difficultés rencontrées par la famille d’accueil
Nous avons posé candidature pour accueillir cet enfant. La famille est prête. Il sera heureux chez nous, vous allez voir ! Nos illusions de départ sont sans doute nécessaires mais, très vite il nous faut composer avec la réalité. Passé le plaisir de la nouveauté, cet "intrus" ressemble parfois au "vilain petit canard" avec qui il faut vivre 24 heures sur 24. Il mobilise l’attention des adultes et surtout la nôtre, mère d’accueil, poussant parfois hors du nid nos propres enfants.
On voit là poindre la jalousie et parfois la déstabilisation de nos enfants.
Or, notre recrutement nous a laissé entendre que nous étions des parents compétents et voilà que tout se déstabilise. Malgré nos efforts, l’enfant accueilli rejoue les perturbations qu’il a connues dans sa famille, et nos propres enfants perdent leurs repères. A ce stade, la collaboration avec les travailleurs sociaux est indispensable, de même que toutes les rencontres de formation, ou groupes de paroles.
Puisque cet enfant vit avec nous continuellement, nous aurions tendance à prendre les décisions le concernant, à glisser vers la complète substitution. Mais il ne dépend pas de nous, son nom en est le témoin (des collègues portent ce nom sur leur boîte aux lettres). Cet enfant est chez nous pour vivre une relation "normale" de famille mais ses racines sont ailleurs. Les relations avec sa famille et les interventions de l’équipe nous rappellent cette appartenance. Nous n’acceptons pas toujours les perturbations du comportement consécutives à ces contacts, et cherchons parfois à en limiter la fréquence, invoquant en toute bonne foi le "bien-être" de l’enfant.
Si nous entretenons un leurre quant à l’appartenance de l’enfant, les conséquences peuvent être graves. Soit la violence du conflit créé par cette ambiguïté peut faire exploser le placement avec un profond sentiment d’échec et une grande culpabilité pour nous et pour l’enfant, soit la décision de l’achèvement de la mesure peut tomber comme un "couperet" (rapt) et la rupture qui s’en suit provoquer une intense sensation de perte, voire de trahison. Il nous faut une grande vigilance qui ne doit pas pour autant faire obstacle à un certain attachement. Sans affection, comment l’enfant peut-il se reconnaître comme être aimable, digne de grandir ?
Dans un tel climat d’affection, il n’est pas toujours facile de justifier que nous sommes payées pour cette tâche. L’amour et l’argent sont deux notions souvent perçues comme antagoniques. "Être payée pour aimer" fait naître un sentiment de culpabilité qui, chez nous, est amplifié par la proximité quotidienne entre la fonction éducative et notre fonction familiale.
Pourtant, il me semble que l’argent contribue à clarifier notre position en rappelant l’aspect provisoire de notre fonction et en nous situant dans la suppléance. Le sociologue V. De Gaulejac a écrit : "Les assistantes maternelles sont payées effectivement à défaut de pouvoir être payées de retour affectivement".
L’accueil familial aurait donc pour fonction de panser les plaies qui ont engendré le placement. Mais le déplacement ouvre une plaie supplémentaire, celle de la séparation. Alors, la famille d’accueil a également pour mission de panser cette nouvelle plaie, par l’affection et l’attention prodiguées à l’enfant. Nous devons cependant être vigilantes à ne pas nous empresser de la refermer car ce serait là une éviction de sa famille. On voit poindre le problème de la trahison qu’elle engendrerait et le rôle fondamental du service.
Cette difficulté pourrait se résumer en une phrase : la famille d’accueil a pour mission de panser la plaie de la séparation en y laissant la place de la réconciliation.
Ainsi, l’activité d’assistante maternelle, avec la collaboration plus ou moins active de tous les membres de la famille, répond à une mission précise.
Dans ces conditions, notre activité s’apparente-t-elle à une profession ou à une tâche de mère au foyer qui mobilise l’ensemble de la famille d’accueil ? S’inscrit-elle dans une continuité familiale ou dans une démarche professionnelle ?
Je vais essayer de mettre en évidence combien ces deux composantes sont l’essence même, voire la sève, de notre fonction.
II. Assistante maternelle : une fonction professionnelle
Au fil de ma recherche, j’ai dégagé six éléments-clés susceptibles de contribuer à la définition d’une profession. Je vais donc essayer d’analyser l’activité d’assistante maternelle au regard de ces six paramètres.
1. Rémunération
Bien que définie par les textes (minimum 1/2 SMIC par enfant), la rémunération ne constitue souvent qu’un salaire d’appoint. En effet, plus de la moitié des collègues ne se voient confier qu’un seul enfant. De plus, il est souvent exigé que le couple possède d’autres ressources que celles de l’accueil afin d’être moins vulnérable au départ des enfants. Donc, le revenu qui en découle est modeste, preuve en est que les frais engagés pour l’accueil donnent droit à une déduction fiscale importante.
Ceci nous renvoie à la question de la proximité entre l’amour et l’argent évoquée dans les paradoxes de la fonction d’assistante maternelle. C’est parfois difficile au quotidien, parce que probablement se mesure là une différence notoire avec nos propres enfants.
2. Idéal de Service
"La primauté donnée à la recherche du profit n’est pas légitime pour le professionnel".
Une candidature motivée par le seul intérêt financier ne serait probablement pas retenue, et la profession est très souvent vécue par les assistantes maternelles comme une mission : "si je prends un enfant maintenant, je veux l’emmener jusqu’au bout".
3. Identification et appartenance
L’exercice de l’activité répond à l’appellation précise d’assistante maternelle, mais elle n’est pas différenciée de l’accueil à la journée. Comment nous présentons-nous : assistante maternelle, famille d’accueil, assistante maternelle en accueil familial ? L’appellation existe, mais elle n’est pas suffisamment pertinente car elle ne permet pas une réelle reconnaissance professionnelle.
Quant à l’appartenance à une entreprise, elle est plus ou moins évidente. Selon que nous recherchons une situation professionnelle ou une activité au foyer, notre attitude est très différente. Mais, qui dit membre d’une entreprise dit employeur à qui il faut rendre des comptes, qu’ils soient d’ordre financier ou liés à notre vie quotidienne avec l’enfant. Autant d’aspects qui ne sont pas toujours évidents, probablement du fait de la proximité de notre fonction avec la fonction familiale, d’autant que notre activité est exercée au sein même de notre foyer.
Pour certaines, la recherche de relations professionnelles peut passer par le biais d’associations. C’est aussi le rôle des formations. Un besoin commence alors à s’exprimer : rencontrer régulièrement d’autres assistantes maternelles pour confronter nos pratiques et vaincre l’isolement dans lequel nous cantonne l’exercice de cette profession.
Concernant les perspectives de carrière, le problème est posé par la proximité entre la fonction parentale qui est une étape de la vie, et celle d’assistante maternelle qui veut se prolonger jusqu’à la retraite. Cela nécessite une grande capacité d’adaptation pour vivre de nouvelles situations dans des rapports différents. Certaines créent des rapports de grands-parents avec les jeunes accueillis. D’autres, par le biais de la formation, trouveront des moyens de reclassement professionnel. Espérons que l’obligation de formation contribuera à apporter des solutions.
4. Nature de la tâche
Cette tâche est décrite comme une tâche de mère de famille (effet de miroir, apprentissage de la vie, attention au quotidien, confiance, dialogue...), mais nécessitant des compétences particulières : observer, comprendre, travailler en équipe, se remettre en cause, s’effacer...
Ce point demanderait un long développement.
5. Autonomie et Complémentarité
Le partenariat est ébauché dans les textes : "L’assistante maternelle doit être consultée lorsqu’il y a des décisions importantes à prendre pour l’enfant". En réalité, une illusion d’autonomie est entretenue par l’exercice de l’activité au sein de la famille, une autonomie nécessaire, (on ne va pas interroger le travailleur social pour chaque petit fait).
Mais la complémentarité avec les différents membres de l’équipe est essentielle : relations avec la famille de l’enfant, prises de décisions... Une communication permanente est indispensable. Une articulation qui nécessite une analyse approfondie pour définir les rôles et tâches de chacun des partenaires.
6. Formation
"Une véritable formation professionnelle s’ancre sur la pratique." A ce sujet, le législateur n’est pas en porte à faux, mais dans la réalité, les situations sont très disparates. Le souci d’une formation de qualité progresse cependant, mais les moyens sont très insuffisants.
Comment peut-on appréhender en 120 heures une fonction aussi complexe ? Il nous faut réfléchir à de réelles sources d’informations et de formations complémentaires. Par exemple, existe-t-il beaucoup d’ouvrages de base accessibles à une majorité d’assistantes maternelles ?
En conclusion, notre activité s’inscrit bien dans une démarche professionnelle mais certaines questions demandent réflexion :
- la proximité entre l’amour et l’argent avec tout ce qu’elle engendre comme difficultés,
- le rôle spécifique de l’assistante maternelle au sein de l’équipe des professionnels,
- un travail sur la communication,
- la formation qui n’en est qu’à ses balbutiements.
L’objectif étant, pour nous, de rompre l’isolement et de trouver notre place car, comment l’enfant peut-il trouver la sienne si nous ne trouvons pas la nôtre ?
III. Assistante maternelle : une fonction familiale
Pour le législateur, "la famille d’accueil est constituée de l’ensemble des personnes qui vivent au domicile de l’assistante maternelle".
La question qui nous intéresse se situe plus particulièrement dans les fonctions essentielles d’une famille. Je les ai réparties selon trois axes.
1. La Sécurité Affective
L’engagement affectif de la famille d’accueil est l’aboutissement d’une longue période de préparation et d’attente. Au fil du temps, chacun fait sa place à l’intérieur de la famille, une relation privilégiée s’installe, des liens affectifs se nouent.
La sécurité affective suppose la solidarité entre les membres de la famille ; elle s’étend souvent largement, l’entourage aussi prenant en compte cet enfant accueilli en marquant un anniversaire par exemple. Cette solidarité se prolonge également au-delà du contrat.
2. L’aspect éducatif.
Il s’agit de l’accompagnement dans l’apprentissage au quotidien de tous les actes de la vie. Il semble que cette facette soit assez évidente lorsque nous évoquons notre fonction, surtout lorsque nous nous situons clairement dans l’univers de la suppléance tel que je l’ai évoqué.
Cependant, cet aspect nécessite une prise de conscience de nos valeurs de référence pour pouvoir les relativiser, les proposer sans les imposer, et ainsi éviter au jeune de se trouver dans une position de trahison par rapport à sa propre famille. Car, l’enfant se retrouve au confluent de plusieurs systèmes de valeurs : le nôtre, celui du milieu d’origine, ceux du travailleur social...
3. L’aspect Oedipien ou sexué
Il s’agit de la différenciation sexuelle, de la reconnaissance de l’autre dans toute sa personne. Dans le climat de confiance que nous essayons d’établir dans la famille d’accueil, l’enfant comprend qu’il est respectable dans son corps, dans sa différence... Cet aspect est essentiel au regard des maltraitances de tous ordres que beaucoup ont subies avant le placement.
Je ne peux pas m’abstenir de relever ici l’importance du père d’accueil. Elle se traduit à l’égard de la fillette par une attitude de respect et le renvoi d’une image d’être aimable. Le garçon, lui, trouve là l’adulte qui détient une nécessaire autorité et auquel il peut se mesurer et s’identifier. Le père d’accueil joue ainsi le rôle de tiers nécessaire à la relation mère-enfant. Enfin, c’est l’image d’un couple parental qui se respecte.
L’activité d’assistante maternelle s’ancre véritablement sur la famille, elle met tout le monde en mouvement, c’est une aventure où le registre émotionnel est fortement sollicité. Il semble essentiel que ces résonances puissent être parlées pour être dédramatisées.
Je n’ai pas fait le tour de tous les aspects familiaux de l’accueil, je n’en ai cité que quelques-uns, non pas comme modèles, mais comme pistes pour amorcer une réflexion qui peut s’orienter vers différents axes : l’intimité de la famille d’accueil, la façon dont on se fait nommer par les enfants ou dont on en parle à l’extérieur, ou encore le ou les départs de l’enfant avec toutes les résonances qui sont en jeu du fait de la place vide qu’il laisse et tous les ressentiments qui en découlent...
Conclusion
La distinction entre accueil et placement permet de positionner la fonction d’assistante maternelle. La différence entre suppléance et substitution en précise les limites, en introduisant la place du tiers occupée par le travailleur social représentant le service.
Après avoir mis en évidence comment notre fonction s’ancre simultanément sur la profession et sur la famille, je voudrais proposer trois pistes de réflexion :
- Beaucoup des interrogations et problèmes que nous rencontrons au quotidien s’expliquent par la difficulté à nous situer simultanément dans le familial et dans le professionnel. J’ai remarqué que lorsqu’un malaise apparaît, il s’explique fréquemment par une difficulté à appréhender simultanément les deux ancrages de notre fonction. Les tensions ou incompréhensions entre les différents partenaires s’originent souvent dans la non prise en compte de cette double appartenance, chacun des protagonistes n’envisageant qu’un des aspects et s’y cantonnant.
- Je l’ai évoqué à plusieurs reprises, la communication est au centre de notre fonction. Ce sujet mériterait sûrement de s’y attarder, et pourrait faire partie des thèmes de formation.
- "Le repérage de nos affects", c’est-à-dire des endroits où notre implication affective ne nous permet pas d’être le meilleur conseiller pour l’enfant, est selon moi essentiel. Lorsque nous arrivons à les repérer, il est plus facile de déléguer les prises de décisions, et surtout de les accepter avec sérénité. La relation avec l’enfant n’en devient que plus saine et libérée. Ce qui me permet de dire que, contrairement à certaines idées reçues, une formation réussie n’empêche pas de travailler avec le cœur, elle le libère...