Nous avons reçu ce message, fin octobre 2009 :
Bonjour,
Pour l’obtention du diplôme de conseiller en Economie Sociale Familiale (travailleur social), j’ai réalisé un mémoire sur l’accueil familial
Accueil familial
Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois).
des personnes âgées.
M’étant rendue de nombreuses fois sur votre site pour y trouver des informations ou des contacts, je tenais à vous faire parvenir le fruit de mon travail.
Si vous le jugez digne, je vous autorise à le publier sur votre site.
Si vous souhaitez d’autres informations, je me ferais un plaisir de vous les communiquer.
Merci pour toutes les informations que j’ai pu trouver sur votre site, une vrai mine d’or !
Christelle DERRIEN
Au nom de tous ceux qui s’intéressent à l’accueil familial, nous remercions à notre tour Christelle pour son excellent travail, original et basé sur de nombreuses témoignages très "concrets", pris sur le vif.
Nous invitons d’autres étudiants à prolonger ses réflexions en évitant les copier-coller ... et à nous les adresser. Quelques mémoires sur l’accueil de personnes handicapées ou sur les accueils thérapeutiques seront bienvenus !
Courtoisement
Pour l’association Famidac
Étienne Frommelt, Président
Sommaire :
Introduction - Méthodologie
1- LES PERSONNES ÂGÉES
- Généralités concernant les personnes âgées
- Un public difficile à définir
- Le vieillissement
- Les personnes âgées et l’accueil familial social
- Caractéristiques des personnes âgées accueillies
- Le choix de l’accueil familial
2- L’ACCUEIL FAMILIAL SOCIAL
- Cadre général de l’accueil familial social
- Origines de l’accueil familial social
- La réglementation initiale de l’accueil familial social
- La nouvelle réglementation de l’accueil familial social
- Une prise en charge à différents niveaux
- Une facette importante de l’accueil familial social : l’individualité
- L’aspect sanitaire de l’accueil familial social
- La socialisation par l’accueil familial social
- Ce que l’accueil familial apporte aux personnes âgées
- La sécurité du lieu et une présence au quotidien
- La reconnaissance
- Une dimension sentimentale
3- INTERVENTION DU CESF [1] AUPRÈS DES PERSONNES ÂGÉES EN FAMILLE D’ACCUEIL famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" !
- Avant le placement en famille d’accueil
- La promotion de ce mode de prise en charge
- Évaluation des demandes au préalable
- Mise en relation des personnes âgées avec les accueillants
- Pendant le placement
- Le contrôle des familles d’accueil et le suivi des accueillis
- Coordination des intervenants autour de la personne âgée
- La fin du placement
Conclusion - Glossaire - Bibliographie - Annexes
Extraits :
(...)
1.2.2- Le choix de l’accueil familial social
Pour les trois personnes âgées avec lesquelles je me suis entretenue dans le département B, la démarche est sur l’initiative de leur famille. Celles-ci ont connu l’accueil familial par le « bouche à oreille », dans un journal ou, par un professionnel.
Dans le département C, les placements en famille d’accueil sont d’origine diverse. Thérèse à été dirigée par sa curatrice, André a été orienté par l’assistante sociale de son travail et Jean-Luc a été guidé vers l’accueil familial social par les travailleurs sociaux de l’hôpital dans lequel il a été hospitalisé.
Dans le département D, sur les neuf personnes âgées interviewées, six ont connu l’accueil familial par l’intermédiaire de leur famille, une par une assistante sociale de l’hôpital, une par sa tutrice et la dernière connaissait cette activité auparavant.
Mais dans tous les cas, la personne à accueillir doit participer (si elle en est capable) à son placement. Accueillants et accueillis doivent se choisir mutuellement. Si l’un ne convient pas à l’autre, peu importe la cause, l’accueil ne peut être mis en place dans de bonnes conditions. La bonne entente entre les deux parties est primordiale dans ce type de prise en charge. C’est pourquoi, les professionnels de l’accueil familial étudient chaque cas avant de mettre en place un accueil.
Lors de l’interview qu’elle m’a accordée, l’équipe de l’AFS* m’a dit « Il y a des personnes qui ne peuvent pas aller en accueil familial (parce que la dépendance est trop lourde ou qu’elles n’arrivent pas à s’intégrer dans une autre famille, ou parce qu’elles ont besoin d’un cadre plus institutionnel), c’est souvent les échecs que l’on a eus. C’est pour ça que l’on fait une évaluation de la situation avant de mettre en place l’accueil pour pouvoir vérifier que l’accueil est compatible. On rencontre la personne qui demande à être accueillie, puis en fonction de ses besoins et de son caractère, on sélectionne la famille d’accueil qui correspond le mieux. » Dans ce sens, une période d’essai est obligatoirement prévue au début de l’accueil (1 mois renouvelable).
Lorsque je les ai interrogées, le facteur principalement évoqué par les personnes âgées sur leur choix d’aller en famille d’accueil, est qu’elles ne pouvaient plus rester chez elles pour diverses raisons mais qu’elles ne voulaient pas ou ne pouvaient pas aller en maison de retraite.
Aldo m’a dit lors de l’entretien « Je ne voulais pas aller en maison de retraite car les gens paraissent fatigués et ça me fait mal au cœur ».
Denise voulait rester à domicile, mais ses problèmes de vue lui rendait la vie trop compliquée et rester seule à domicile était devenu, pour elle, dangereux. Elle en avait conscience, mais elle refusait d’aller en maison de retraite. Elle a refusé de quitter son domicile, jusqu’à ce que sa fille lui parle de l’accueil familial.
Thérèse, quant à elle, m’a dit « J’ai été pendant deux ans à l’hôpital, j’ai failli mourir, et puis quand ça a été mieux, on m’a dit que je ne pourrai pas rester toute seule […] La curatrice m’a dit que j’étais trop valide pour aller en maison de retraite donc elle m’a proposé l’accueil familial et je m’y fais très bien. »
Pour Suzon, son arrivée en famille d’accueil était due à un facteur financier : « J’ai été en maison de retraite mais c’était trop cher, alors mes enfants m’ont proposé d’aller en famille d’accueil ».
Entre maintien à domicile et hébergements collectifs, l’accueil familial apparaît comme une solution supplémentaire pour la prise en charge des personnes âgées, peu importe leur dépendance.
(...)
2.5- Une prise en charge à différents niveaux
- 2.2.1- Une facette importante de l’accueil familial social : l’individualité.
D’une manière générale, le terme « individuel » révèle ce qui rapporte à l’individu ou bien ce qui est destiné à l’individu, lui seul.
Une prise en charge individuelle correspond donc au suivi d’une personne seule, un suivi en fonction de ses besoins, ses attentes et son mode de vie antérieur.
Plusieurs personnes peuvent être accueillies en même temps (trois au maximum) mais cela n’empêche pas la prise en charge individuelle de l’accueil familial, car le petit nombre d’accueillis permet à l’accueillant de connaître les besoins précis de chaque personne et d’y répondre correctement.
La note d’information du 15 juin 2005 explique « Cette limitation, qui vise à préserver le caractère familial de l’accueil doit être comprise dans son sens strict et ne peut faire l’objet d’une dérogation, même temporaire ».
D’après le rapport écrit par Monsieur Bernard de FROMENT « L’accueil familial des personnes âgées et handicapées adultes » , la majorité des agréments délivrés le sont pour une personne (56% des cas) et très peu pour trois accueillis (12% seulement).
Le côté individuel de l’accueil familial social est surtout en opposition avec la prise en charge commune des résidents d’un hébergement collectif. Dans ce type d’hébergement, les résidents doivent se conformer aux règles de l’établissement, règles qui sont communes à tous.
Mme M, travaillait en maison de retraite avant de devenir accueillante familiale. Lorsque je lui ai demandé quelles différences elle faisait entre son travail en maison de retraite et celui qu’elle effectue chez elle, elle m’a répondu « Ça n’a rien à voir. En maison de retraite, il faut fournir. Vous ne pouvez pas vous permettre de passer une demi-heure sur une toilette, il y a beaucoup de toilettes à faire et pas beaucoup de personnel. Certaines personnes n’ont pas besoin qu’on leur parle donc c’est moins grave de ne pas passer de temps avec eux, mais il y en a d’autres qui on besoin de parler et on avait pas le temps, il fallait toujours aller vite, j’en ai eu marre. »
M et Mme La m’ont dit : « En maison de retraite, d’accord, ils ont peut-être plus d’animations que dans une famille d’accueil, mais c’est plus impersonnel. Il n’y a pas ce côté où on les prend un par un et on leur parle, on prend le temps pour la toilette. En famille d’accueil, on vit à leur rythme, tandis qu’en maison de retraite, tu vis au rythme de la maison de retraite. »
Le caractère individuel de l’accueil familial passe également par la manière de vivre au quotidien. C’est à dire que la vie passée des personnes âgées est prise en compte par leur famille d’accueil. Les habitudes de la personne âgée sont conservées dans la mesure du possible (dans la limites où cela convient à l’accueillant familial et sa famille).
Lors d’un entretien, Mme V, accueillante familiale du département B, m’a dit en me décrivant une journée-type : « La personne que j’accueille peut se lever à l’heure qu’elle veut. Lorsqu’elle est fatiguée et qu’elle souhaite dormir plus longtemps, ce n’est pas un problème pour moi, je m’adapte à son rythme. Je suis là pour elle. »
M et Mme La, quant à eux, m’ont fait part de leur volonté de conserver au maximum un lien entre les personnes âgées qu’ils accueillent et leur vie passée. Claude, leur accueilli, m’en a parlé également : « J’ai toujours été à la ferme, ici, je donne à manger aux poules. »
Charles, accueilli dans une autre famille : « Avant j’étais cultivateur, alors (en tant qu’accueilli) je m’occupais dans le jardin. Mais maintenant c’est plus dur, j’ai plus de 90 ans… […] j’allais soigner les moutons aussi »
Mais cela est parfois difficile à réaliser. De ce fait, certains accueillis éprouvent des difficultés à s’intégrer dans leur famille d’accueil. M et Mme La l’ont également vécu : « Théo (une autre personne âgée accueillie), avant, il n’était pas très sociable, il a eu du mal à s’intégrer et maintenant ça va mieux […] Il a eu du mal au début, parce qu’il était habitué à sa vie d’indépendant, et après, ce qui a été difficile c’est le changement de ville parce qu’il y vivait depuis longtemps, il allait faire son tour, etc. ; donc ça à été dur pour lui. »
Accueillant et accueilli(s) sont donc amenés à faire des concessions pour que l’accueil se passe le mieux possible. Dans le cas contraire, le contrat peut être rompu.
Il est difficile de dire si l’accueil familial permet une prise en charge individuelle de personnes âgées ou non, puisque selon les points de vue la réponse est différente. D’un coté, oui, car la famille d’accueil peut répondre aux besoins de chaque personne âgée. Mais de l’autre coté, non, parce que leur mode de vie ne peut pas toujours être maintenu lors de leur arrivée en famille d’accueil.
Parmi les besoins, spécifiques à chacune des personnes accueillies, auxquels les familles d’accueil répondent, un besoin important est à souligner : la santé.
- 2.2.2- L’aspect sanitaire de l’accueil familial social
Le mot « sanitaire » se défini comme « ce qui à rapport à la santé » . La prise en charge sanitaire d’une personne peut donc se traduire par le maintien de sa santé (ou si besoin par l’apport de soins adaptés), de l’hygiène.
Selon le CASF* (article L.441-1), « l’agrément ne peut être accordé que si les conditions d’accueil garantissent la continuité de celui-ci, la protection de la santé, la sécurité et le bien être physique et moral des personnes accueillies. »
D’après le décret n°2004-1542 du 30 décembre 2004, l’accueillant familial doit assurer un accueil répondant à certaines caractéristiques dans le respect des règles d’hygiène et de sécurité.
En pratique, l’accueillant familial doit donc veiller à la santé de son ou ses accueillis. Cela se traduit par plusieurs points à respecter :
Tout d’abord concernant la restauration. L’accueillant familial doit fournir à la personne âgée un certain nombre de repas et collations. Il doit également tenir compte des régimes spécifiques prescrits par le médecin. D’une manière générale, les accueillants familiaux doivent proposer des repas équilibrés à leurs accueillis. Cette notion de diététique peut faire l’objet d’un thème de formation pour les accueillants familiaux ( article R 441-1 du CASF* : « Pour obtenir l’agrément, le candidat doit s’engager à suivre une formation initiale et continue, organisée par le président du conseil général »). Ce thème a été utilisé lors d’une formation dans le département B ; ce qui n’empêche pas les accueillants familiaux des autres départements de se soucier de l’équilibre alimentaire de leur accueillis comme en témoigne Mme B (département C) « Je suis responsable de neuf personnes (sa famille, les trois accueillies et elle-même) donc c’est énorme, faire à manger pour neuf, équilibrer les repas… Je me suis organisée, j’ai des menus. »
L’entretien est également un facteur important dans la veille sanitaire. Cela comprend l’entretien des pièces mises à disposition de l’accueilli si celui si ne peut pas s’en occuper, l’entretien de son linge et du linge de maison.
Les professionnels de l’accueil familial des différents départements incitent les familles d’accueil à faire participer leurs accueillis aux taches ménagères, mais ce n’est pas fait par tous les accueillants. Mme T m’a dit : « Chez moi, je ne les fais pas travailler, […] Ils sont là, ils ne font pas le ménage. S’ils veulent m’aider, d’accord, mais sinon, ils font ce qu’ils veulent … mais pas de bêtises ! » Par contre, Mme Lr les fait participer « Le ménage dans leur chambre, je ne le fais pas. Le linge repassé, c’est à eux de le ranger. » Les capacités physiques des accueillis sont également prises en compte sur ce point.
Au sujet de l’hygiène quotidienne de l’accueilli, lorsque la personne âgée n’est plus apte à faire seule des actes quotidiens (toilette, élimination, habillage…), l’accueillant familial doit l’aider ou bien doit veiller à ce que la personne se lave. C’est le cas de Mme La qui a rencontré un problème à ce niveau : « Le pire avec Théo c’était l’hygiène. Il ne se lavait jamais. J’ai mis quatre an pour qu’il prenne une douche tous les jours ».
Cette aide supplémentaire fournie à la personne âgée se fait en contrepartie d’une rémunération supplémentaire, c’est ce qui est appelé « indemnité en cas de sujétions particulières sujétions particulières L’indemnité en cas de sujétions particulières est, le cas échéant, justifiée par la disponibilité supplémentaire de l’accueillant liée à l’état de santé de la personne accueillie. ». Ce coût est évalué en fonction du GIR* de l’accueilli.
Dans certaines familles, l’hygiène corporelle de la personne (toilette…) est assurée par une personne extérieure à la famille, telle une auxiliaire de vie sociale. C’est le cas pour une accueillante familiale interviewée dans la vidéo « Famille d’accueil, d’abord c’est un art… » . J’ai rencontré cette situation uniquement pour une ancienne accueillie de Mme Lu : « J’avais une infirmière pour lui faire sa toilette parce que cette personne là, j’aurais pas pu faire » (l’accueillie était complètement grabataire).
L’accueillant familial doit également veiller sur la santé même de l’accueilli et prévenir des problèmes éventuels par des visites chez les médecins spécialistes (ophtalmologue, cardiologue, dentistes…). Il doit le conduire à ses rendez-vous médicaux s’il ne peut s’y rendre seul, veiller à ce qu’il prenne ses médicaments s’il en a, etc.
Mme B accueille trois femmes. Pour elle, il est important qu’elles soient suivies par un gynécologue « Moi, au printemps, je les emmène toutes chez le gynécologue pour un examen complet. Si je m’en occupe, je m’en occupe correctement. Je n’ai pas envie qui leur arrive un pépin ; je n’ai pas envie, par exemple, que du jour au lendemain on découvre que Marie Noëlle (accueillie en situation de handicap, vieillissante) ait un cancer du sein… »
La prise en charge sanitaire est différente dans chaque famille en fonction des besoins des accueillis. Et lorsqu’il y a plusieurs accueillis dans une famille leur prise en charge par l’accueillant n’est pas la même. Mme Ca, accueillante familiale avec laquelle je me suis entretenue illustre très bien cela. Elle décrit une journée type comme cela : « Le matin, Chantal (une accueillie en situation de handicap), se lève en même temps que mon mari et moi. Je leur prépare leur petit déjeuner. Après Aldo (un accueilli en situation de handicap, âgé) se lève et déjeune ainsi que Lucie (la troisième accueillie, âgée). Après le petit déjeuner, j’aide Lucie à faire sa toilette et à s’habiller, les deux autres se débrouillent seuls.[…]Lors des repas, je dois veiller à ce que Aldo prenne ses médicaments[…] »
Pour des soins plus spécifiques dont pourraient avoir besoin les personnes âgées (traitements des escarres, soins de kinésithérapie, injection d’insuline ou autres), les accueillants familiaux doivent faire appel à des professionnels et ne peuvent se charger eux-même de ces tâches sauf si elles en ont les compétences du fait de leur profession antérieure, ce qui est le cas de Mme F : « J’ai travaillé 20 ans en milieu hospitalier […] Le matin, pendant que Suzette mange, je vais faire la piqûre de Suzon puis celle de Gaby. Elles sont diabétiques. »
Que se soit directement ou par l’intermédiaire de professionnels médicaux ou paramédicaux, les familles d’accueil interviewées veillent toujours à la santé des personnes qu’elles accueillent même si la prise en charge n’est pas le même pour chaque personne âgée accueillie.
Un point négatif apparaît concernant l’aspect sanitaire de l’accueil familial : les accueillants familiaux ne sont pas forcément informés de l’état de santé de leur accueilli au début de l’accueil.
Mme Lr m’en a parlé : « On nous dit jamais trop ce qu’ils ont les gens quand on nous les place, le dossier médical il suit pas, on nous le donne pas. Ça nous regarde peut-être pas, mais moi je pense que si on nous en disait un peu plus sur ce qu’ils ont, ça pourrait nous aider dans notre travail, comment voulez-vous qu’on s’occupe bien d’une personne si on sait pas ce qui va pas ? ».
Mme C, professionnelle du département D m’en a également parlé : « Les familles d’accueil ne sont pas toujours au courant des pathologies des personnes qu’elles vont accueillir. En fait tout dépend qui présente l’accueilli […] elles sont assez malmenées à ce niveau là, c vrai. Au début elles ne sont pas forcément au courant de tout, elles apprennent au fur et à mesure de l’accueil. »
L’accueil familial permet donc aux personnes âgées de bénéficier d’une prise en charge sanitaire adaptée, dans la mesure où leur accueillants sont informés des problèmes éventuels qu’elles ont.
L’accueil familial n’a pas qu’un rôle à jouer concernant la santé des accueillis, il y a également des effets sur leur socialisation.
- 2.2.3- La socialisation par l’accueil familial social
« Social » désigne ce qui « concerne la société » . La prise en charge sociale d’une personne se rattache à la place que cette dernière a dans la société dans laquelle elle vit, au sein d’un groupe.
Le décret n°2004-1542 du 30 décembre 2004 relatif au contrat type prévu à l’article L. 442-1 du CASF* annonce que « […] En recevant la personne au sein de son foyer, il (l’accueillant) s’efforce de la faire participer à la vie quotidienne de sa famille mais aussi de l’aider à : […] Maintenir et développer ses activités sociales, […] lui permettre de recevoir de la visite, préserver l’intimité de ces visites, dans un respect mutuel vis-à-vis de l’accueillant et des autres accueillis ».
L’aspect social de l’accueil familial social est complexe. Il ne s’agit pas forcément d’aller à l’extérieur (le déplacement est parfois complexe pour les personnes âgées) et d’avoir une socialisation large. L’essentiel de cet aspect repose sur le caractère familial de l’accueil.
En effet, la famille est le premier agent de socialisation d’un individu. Le travail est aussi un agent de socialisation mais, depuis leur retraite, les personnes âgées ne peuvent plus se reposer sur cet agent pour maintenir un réseau social. La maladie, le décès ou tout simplement l’éloignement ne permettent pas non plus à ces personnes de rester en lien avec leurs groupes de pairs (famille ou amis…).
C’est pourquoi, la personne âgée doit être intégrée à la vie familiale de son accueillant(e). C’est un des points du décret du 30 décembre 2004 :« La personne accueillie à libre accès aux pièces communes […] les repas sont partagés de manière conviviale dans la mesure où l’état de santé de la personne accueillie le permet et si elle le souhaite ». Elle doit pouvoir trouver sa place au sein de la famille d’accueil, même si ce n’est pas sa vraie famille. Tout comme l’accueillant familial doit trouver sa place auprès de la personne âgée accueillie sans prendre la place de sa famille. C’est ce que Mme M explique à la famille des personnes qu’elle accueille « […] Je ne suis pas là pour prendre leur place, mais il faut quand même que je me fasse la mienne. »
D’une manière générale, les accueillis sont considérés comme des membres de la famille. Mme Lr a gardé ses petites filles et accueillie un homme pendant une dizaine d’années. Il a vu ses petites filles grandir, ce qui a créé un lien.
Mais cette intégration dans la famille doit tout de même se faire dans une certaine limite. Mme B m’en a expliqué les raisons : « J’ai ma famille, j’ai les trois accueillies qui font partie de la famille mais je ne mélange pas les deux. J’ai quand même mis des limites. Au départ j’ai tout donné, par exemple avec Célia (la première personne qu’elle a accueillie et qui était handicapée) c’était affectif. Elle me prenait pour sa mère et quand l’accueil s’est fini (la pathologie de Célia était trop lourde) j’ai eu beaucoup de peine parce que je me suis dis que c’était un échec […] Du coup, pour pas être triste maintenant je garde mes distances. ».
Dans la mesure du possible, la personne âgée est placée dans une famille qui habite au plus près de là où elle habitait auparavant, afin de maintenir au maximum les liens sociaux qu’elle a pu créer au fil du temps avec son voisinage ou sa famille. Mme B habite près du foyer où le fils de Thérèse est hébergé : « Elle va voir son fils dans un ESAT (Établissement et Service d’Aide par le Travail) tous les jeudis. Moi j’essaye de ne pas casser ce lien, ils ne s’entendent pas du tout mais le lien est important, elle est toujours contente de le voir ».
Les caractéristiques des familles dans lesquelles les personnes âgées sont accueillies doivent être prises en compte. Certaines ont des enfants ou des petits enfants qu’elles gardent ou qui les visitent régulièrement. Les rapports intergénérationnels peuvent être très enrichissants mais aussi source d’épuisement lorsque les enfants sont très toniques. Il faut donc en prendre compte lors de la mise en place d’un accueil.
C’est le cas de plusieurs familles d’accueil que j’ai rencontrées, dans tous les départements. Mme V a quatre jeunes enfants dont un en bas âge (2 ans). Lors de notre entretien, elle m’a dit : « Il y a constamment du mouvement dans la maison, parfois les enfants jouent à des jeux de société avec Denise. La plus jeune de mes filles aime beaucoup regarder la télé sur ses genoux. Quand je vois qu’elle (l’accueillie) est fatiguée, je demande à mes enfants de la laisser tranquille ou bien elle va se reposer dans sa chambre[…] ».
Mme B a également quatre enfants qui ont entre 5 ans et 21 ans : « (l’accueil) ils y participent aussi. Par exemple Marie-Noëlle (personne handicapée vieillissante) elle a du mal à marcher, et si je suis occupée avec Marie-France ou Thérèse, je peux demander à mon fils s’il peut accompagner Marie-Noëlle à tel ou tel endroit. Mais le plus gros du travail, c’est moi qui m’en occupe ». Chez M et Mme La : « Les petits enfants, c’est des repères, Raymonde sait très bien qu’on les a du lundi au vendredi, donc là elle est un peu perturbée parce que c’est les vacances. »
L’accueil familial ne permet pas forcément de pouvoir sortir beaucoup. Cela dépend de la mobilité des personnes âgées accueillies. Certaines familles, ou même les accueillis seuls, sortent régulièrement se promener, vont en course, etc. Pour d’autres, les sorties sont plus rares. Par exemple, Mme Le peut rarement sortir avec ses accueillis : « Lucienne ne sort jamais et ne veut pas sortir. Charles sort de moins en moins depuis quelques temps, il a du mal à rester debout longtemps ».
Certains cas sont plus complexes : lorsqu’une famille d’accueil vit avec des personnes âgées valides et d’autres qui marchent difficilement. La personne la moins mobile limite les sorties des autres accueillis valides. C’est le cas chez Mme F : « Avant Gaby, on allait parfois à la cafèt mais depuis qu’on l’a, c’est rare. Pour la mettre dans la voiture c’est compliqué, avant on sortait plus. »
Les visites sont tout de même assez fréquentes : les accueillis ont le droit de recevoir leur famille ou amis (à condition d’en informer leurs accueillants) ou bien d’aller chez eux, de même pour la famille d’accueil qui peut être amenée à recevoir de la famille ou des amis, ou bien être invitée à l’extérieur. Dans ce cas là, deux solutions sont possibles. Soit la famille d’accueil sort et fait appel à son remplaçant (son nom doit être mentionné dans le contrat d’accueil), soit les accueillis sortent avec la famille.
En famille d’accueil, la socialisation des personnes âgées accueillies est maintenue par des visites, des sorties ou plus simplement par la vie de famille que leur offrent les accueillants.
Afin de mieux percevoir les effets que l’accueil familial peut avoir sur les personnes âgées, je me suis adressée directement à elles.
2.6- Ce que l’accueil familial social apporte aux personnes âgées
Lors des entretiens, j’ai demandé aux personnes âgées ce que leur apporte l’accueil familial. André et Jean-Luc n’ont pas été très expressifs sur ce sujet. Je pense que du fait de leur handicap, ils n’y ont jamais réfléchi et qu’ils ne se rendent peut-être pas compte de ce que ça peut leur apporter. De même pour Suzon qui paraissait désorientée à certains moments de l’entretien. Les autres personnes âgées interviewées ont pu me répondre à ce sujet et j’ai classé leurs réponses en trois catégories.
- 2.3.1- La sécurité du lieu et une présence au quotidien
Pour Marise, ce que l’accueil familial lui apporte le plus concerne le cadre de vie : « J’aime bien être là, je suis plus tranquille. »
Denise, qui est une personne autonome malgré ses problèmes de vue, m’a répondu : « Ca ne m’apporte pas grand chose, enfin si, de la compagnie, mais j’aime pas trop qu’on soit trop sur moi, elle me surprotège (en parlant de l’accueillante familiale) ». Cette personne âgée était habituée à vivre seule et elle admet mal le fait de perdre la vue, accepter de se faire aider au quotidien induis qu’elle accepte la perte de son autonomie, c’est pourquoi elle a une vision assez négative de l’accueil familial.
Pour Gabrielle : « D’être en famille d’accueil me permet d’être en famille, de pas être seule. »
Ginette à choisi d’aller en famille d’accueil suite à des soucis de santé : « Je me suis occupée de mes parents jusqu’à leur mort. Après la mort de mon père, je me suis cassé le col du fémur et j’ai eu d’autres opérations pour d’autres problèmes. J’étais dépressive, je me suis retrouvée seule dans un pavillon donc, qui dit pavillon dit : marche, jardin, arbre, pelouse… Je pouvais pas rester. J’étais seule, je me suis pas mariée et donc quand j’étais hospitalisée l’assistante sociale de l’hôpital m’a parlé de l’accueil familial. »
Evelyne, a une déficience mentale légère. Elle n’est pas capable de vivre seule : « Quand on m’a dit que j’irais en famille d’accueil, moi ça m’a pas du tout dérangée. Je me suis dit : vaut mieux ça que de rester toute seule chez moi ».
Pour Lucienne, l’accueil familial permet de rompre la solitude : « Ça me rassure d’être dans une famille d’accueil, je suis pas toute seule, y’a un peu de va et viens »
Charles aime également la compagnie qu’il trouve dans sa famille d’accueil : « Ici c’est la famille, on est tous ensemble. Là, quand on a fini de manger, on discute un peu et on fait ce qu’on veut, on rigole et on discute. »
L’accueil familial offre aux accueillis une présence constante tout au long de la journée, leur permettant ainsi de ne pas être isolés. Ceci leur assure une sécurité certaine car au moindre problème, leur accueillant est présent pour intervenir.
Grâce aux témoignages que j’ai recueillis auprès des personnes âgées, j’ai remarqué que l’accueil familial apportait aussi d’autres éléments aux accueillis.
- 2.3.2- La reconnaissance
Lucie, âgée de 100 ans, m’a répondu « On me considère comme quelqu’un. Je me sens bien dans cette famille. Avant, j’étais dans une maison de retraite, j’ai fait une dépression
Dépression
Savez-vous vraiment ce que c’est que la dépression ? Ce chien noir va rendre les choses beaucoup plus claires pour vous... A voir ici en vidéo.
, j’ai essayé plusieurs fois de… (Elle fait le geste de se suicider), et puis, je suis arrivée là, ça à tout changé ! Maintenant je peux écrire de nouveau. » Chaque jour elle écrit au moins une ligne dans son journal et à la façon dont elle me parlait j’ai vu qu’elle en était très fière et que cela comptait beaucoup pour elle.
L’accueillante familial de Gabrielle m’a fait part des progrès qu’elle a fait depuis son arrivée en famille d’accueil : « Gaby, elle est arrivée, elle ne marchait pas, mais maintenant elle marche ! Même si elle est encore fragile, je l’accompagne avec son déambulateur et elle marche. Elle est arrivée en fauteuil roulant. Depuis qu’elle est à la maison, un kiné vient et la fait marcher à son bras. Là, elle a un peu peur quand elle marche, sinon elle marcherait encore mieux. »
Le temps que les familles d’accueil prennent avec leurs accueillis leur permet de récupérer certaines capacités.
Pour Thérèse, l’accueil familial est important car : « Vous pouvez discuter, compter sur quelqu’un. Vous pouvez vous confier…[…] Et puis on est plus libre. Là j’ai pris des vacances toute seule pendant trois semaines et je ne crois pas qu’en maison de retraite on m’aurait autorisé à partir toute seule… et puis au niveau ambiance, c’est pas pareil… »
M et Mme La, accueillent une personne âgée (que je n’ai pas pu interviewer car elle n’était pas cohérente) : « Elle a la visite de ses anciens patrons (elle était gouvernante dans une famille) mais ça, ça me déplait parce que[…] elle reprend sa place de soumission quand ils viennent. Tandis que là elle a une place de personne, elle vit en tant que personne, alors qu’avant c’était une place de chose… »
Les personnes âgées accueillies prennent en général une place dans leur famille d’accueil, elles font partie intégrante de la famille bien que certains accueillants tiennent à maintenir des distances. Dans tous les cas, les accueillis sont reconnus tant que personnes à part entière. De plus, cela leur permet parfois de récupérer certaines capacités (comme Lucie et Gabrielle).
Une autre dimension de l’accueil familial m’est apparue à travers les témoignages des accueillis.
- 2.3.3- Une dimension sentimentale
Aldo, m’a surtout parlé de la famille d’accueil dans laquelle il est placé : « C’est une bonne famille, elle est gentille, je suis très satisfait, je ne peux pas me plaindre ».
Pour Monique l’aspect familial est primordial : « C’est familial, on est en famille ici on va voir leur famille aussi ».
Pour Claude, la place des sentiments est très importante : « Oh ! J’aime mieux être en famille d’accueil, ici on est plus tranquille. Je les connaissais avant d’être accueilli. Je venais déjà manger chez eux tous les midis, et quand ils ont déménagé, je leur ai dit que je voulais venir avec eux, c’est là que j’ai été accueilli ».
Plusieurs accueillantes familiales m’ont fait part de leur attachement aux personnes qu’elles ont accueillies et qu’elles accueillent et des difficultés que cela pouvait entraîner, surtout lorsque l’accueil se termine. L’aspect sentimental de l’accueil familial n’apparaît pas dans les textes de loi, mais c’est ce qui rend l’accueil familial si riche et si complexe en même temps. En effet, il n’est pas possible de contrôler l’apport sentimental qu’un accueillant offre à son accueilli.
D’un côté, on demande aux accueillants de ne pas trop s’investir émotionnellement avec la personne âgée, alors que de l’autre, l’accueilli doit pouvoir trouver sa place au sein de la famille d’accueil et s’y intégrer. Chaque accueillant doit trouver le juste milieu qui permet au l’accueilli de se sentir bien et qui lui permet de se sentir bien lui-même dans toutes circonstances.
Mis à part les aides quotidiennes qu’un accueillant familial peut apporter à son ou ses accueillis (repas, toilette, entretien du linge ou du logement, etc.), l’accueil familial apporte également : l’écoute, le soutien, la sécurité et le bonheur.
En ce sens, l’accueil familial permet, en plus d’une prise en charge sur le plan sanitaire et social, de bénéficier d’un cadre de vie familial avec tout ce que cela implique : la sécurité, des liens, et de l’affection.
3- INTERVENTION DU CESF AUPRÈS DES PERSONNES ÂGÉES EN FAMILLE D’ACCUEIL
Le CESF peut intervenir auprès des personnes âgées à différents moments de l’accueil. Il peut prendre sa place dans divers types de structures : le Conseil Général, les Centres Locaux d’Information et de Coordination (CLIC), voire même dans les associations de famille d’accueil.
- 3.4- Avant le placement en famille d’accueil
- 3.1.4- La promotion de ce mode de prise en charge
Le développement de l’accueil familial est inscrit dans le schéma départemental gérontologique de divers départements, en fonction des besoins de la population.
Afin d’aider au développement de ce mode de prise en charge, le CESF peut susciter le recrutement de nouvelles familles s’il y a plus de demandes de la part des personnes âgées que d’accueillants.
A l’inverse, s’il y a plus d’accueillants que de personnes âgées qui demandent à être accueillies, il peut mener une action d’information sur cette activité afin de la faire découvrir au grand public. Pour cela, il est important que le CESF élabore un réseau partenarial stable et qu’il le développe.
S’il est employé dans un CLIC, le CESF peut orienter les personnes âgées ou leur famille vers ce mode de prise en charge en fonction de leurs besoins, leurs désirs et en fonction des possibilités d’accueil.
Dans les départements que j’ai pu étudier, l’accueil familial était à la charge des services du Conseil Général et non du CLIC. Un service spécifique à l’accueil familial social était mis en place dans chacun d’eux. Dans les départements B, C et D, l’équipe est pluridisciplinaire : travailleurs sociaux et infirmières et/ou psychologues.
- 3.1.5- Évaluation des demandes au préalable
Le CESF peut être amené à évaluer la situation des personnes ou couples souhaitant être agrémentés (conditions d’hébergement, motivations de l’accueillant pour l’exercice de cette activité…). L’évaluation se fait en collaboration avec les membres de l’équipe en charge de l’accueil familial.
C’est ce que m’expliquais Mme C, psychologue du département D : « En général c’est l’intervenante de secteur qui se rend dans la famille. Ensuite, il y a une visite du médecin du service et de la psychologue. C’est systématique pour toutes les premières demandes. » Cela permet d’avoir une évaluation complète de la famille d’accueil.
De même, l’évaluation permet à l’équipe de rencontrer la famille d’accueil, d’apprendre à la connaître, pour, par la suite, évaluer la compatibilité entre accueillants et personnes âgées qui demandent à être accueillies.
Le CESF peut également évaluer la demande des personnes âgées (ou de leur famille) pour savoir si l’accueil familial est le mode de prise en charge adapté à la personne âgée. L’accueil familial ne convient pas à tout le monde, du fait de leur dépendance, de leur caractère… Le placement d’une personne en famille d’accueil, si elle le refuse, est souvent suivi par un échec de ce placement.
Les professionnelles du département C que j’ai interviewées m’ont dit : « Il y a des personnes qui ne peuvent pas aller en accueil familial, c’est souvent les échecs qu’on a. On a eu des échecs parce qu’on voit au bout de quelques mois que ce n’est pas l’accueil familial qui leur faut, que leur cas dépend plus d’une institution. Il y en a, ça leur donnait trop d’autonomie et pas assez de limites… Ça ne convient pas à tout le monde. »
C’est pour éviter ces situations que l’évaluation préalable de la personne âgée est importante. De même, la personne âgée doit être préparée. « Préparer la personne accueillie consiste à l’aider à accepter de changer de cadre de vie, c’est-à-dire à faire le deuil de capacités perdues […] et à penser à la place qu’elle pourra occuper dans une vie familiale d’étrangers, c’est-à-dire à faire également le deuil d’une prise en charge intrafamiliale » .
- 3.1.6- Mise en relation des personnes âgées avec les accueillants
Mme C, professionnelle du département D m’a dit : « Il est possible d’accueillir tous profils, il faut juste que la famille d’accueil soit compatible. »
Placer une personne âgée dans une famille ne se fait pas au hasard. Le facteur humain sur lequel repose l’accueil familial ne doit pas être négligé. Accueillants et accueillis ont leur mode de vie et dans la mesure du possible, il faut qu’ils aient un mode de vie similaire pour pouvoir vivre ensemble dans une bonne entente.
Le CESF doit, pour cela, réfléchir aux possibilités d’accueil qui se présentent à lui, en fonction de la personnalité des deux parties et de la disponibilité des accueillants. Une concertation avec l’équipe est préférable.
D’après Jean-Claude CEBULA : « Les attentes des familles d’accueil sont plus ou moins bien exprimées lors de leur sélection, ce qui permet de se faire une idée de l’accueilli qu’elles idéalisent. »
Une fois le choix établi, la personne âgée et la famille d’accueil doivent se rencontrer. Le CESF peut être présent à ce moment pour faciliter les échanges, d’autant plus que des éléments concernant le contrat peuvent déjà être abordés à la première rencontre.
La présence d’une tierce personne, tout au long de la mise en place du contrat, est importante, car elle permet d’éviter des conflits futurs en cas de désaccord.
Une période d’essai d’un mois renouvelable est prévue dans le contrat. A l’issue de cette période, l’accueillant mais aussi l’accueilli doivent se prononcer sur la suite qu’ils souhaitent donner à cet accueil. Si l’essai à été concluant, l’accueil suit son cours mais s’il est apparu des difficultés, le CESF doit alors chercher à en connaître les causes, et éventuellement proposer des solutions. La période d’essai peut alors être reconduite ou l’accueil peut se finir ainsi.
- 3.5- Pendant le placement
- 3.2.4- Le contrôle des familles d’accueil et le suivi des accueillis
En théorie, le Président du Conseil Général organise le contrôle des accueillants familiaux, de leurs remplaçants ainsi que le suivi social et médico-social des personnes accueillies. D’après le CASF*, article L441-1 et R 441-1 : « Le candidat à l’agrément doit accepter que soient effectuées à son domicile toutes les visites et actions nécessaires à assurer un suivi social et médico-social des personnes accueillies ».
En pratique, il est difficile de distinguer les deux. Le contrôle porte généralement sur la vérification du respect des conditions d’agrément et sur les conditions d’accueil tant matérielles que morales ou sanitaire. Le suivi aborde l’aspect relationnel et personnel de l’accueil.
Dans les départements étudiés, le suivi des accueillis et le contrôle des accueillants se déroule de différentes manières. Par exemple, dans le département B, une infirmière est chargée du suivi médical des personnes âgées et l’assistante sociale assure le contrôle de la famille. Dans le département D, ce sont les intervenantes de secteur (deux infirmières et une assistante sociale) qui garantissent le suivi des familles d’accueil et leurs accueillis.
Le contrôle des accueillants est important car toutes les familles d’accueil ne s’impliquent pas de la même manière dans leur activité. Il peut arriver que des familles d’accueil soient maltraitantes. Evelyne en a fait l’expérience : « J’ai été dans une famille d’accueil avant mais « zéro », il fallait pas sortir, il fallait pas parler aux gens, fallait que je soit enfermée du matin au soir, j’avais pas le droit de parler au gens. J’ai mangé toute une semaine dans ma chambre et quand ils partaient, ils m’enfermaient. J’avais pas le droit de téléphoner. J’ai pas voulu rester. »
Je ne sais pas exactement comment l’accueil dans cette famille a pris fin, mais le contrôle des accueillants permet d’éviter ce genre de situations. Lors des visites, les professionnels peuvent s’entretenir avec les accueillis, sans que l’accueillant soit à côté, les problèmes éventuels émergent donc ainsi. Si la sécurité et le bien être de la personne accueillie ne sont plus garantis, l’agrément des accueillants familiaux peut ne pas être renouvelé ou même supprimé.
A l’inverse, le suivi des familles d’accueil permet également aux accueillants familiaux de bénéficier de conseils si besoins et d’être soutenus lorsque l’accueil est difficile à vivre : soit parce que la personne devient de plus en plus dépendante, soit parce que la personne devient (ou se révèle) désagréable voire méchante et violente, ou encore parce que l’accueilli cause du tort aux accueillants. (Il est arrivé qu’une personne âgée accueillie raconte des mensonges à propos de sa famille d’accueil aux voisins de celle-ci, la mettant dans l’embarras).
Si l’accueil devient trop pesant pour la famille d’accueil, il est possible de mettre fin au contrat, en respectant le préavis de deux mois.
Lors de notre entretien, Mme T m’a expliqué : « Le Conseil Général contrôle tout, ils viennent presque une fois par mois, c’est rassurant, on a des conseils. […] Quand j’ai un souci avec les accueillis je les appelle et tout de suite ils viennent voir ce qui va pas. »
Mme Le éprouve quelques difficultés avec une des ses accueillies, elle en a parlé à Mme Po, l’intervenante de secteur qui suit l’accueil : « Ça fait quatre ans que j’ai Ginette mais je vais être honnête, elle est rude. C’est une éternelle insatisfaite, y’a rien qui va. […] J’en ai discuté avec Mme Po […] Elle m’a expliqué que Ginette, elle ne fait que ça (se plaindre). Elle a tourné dans plusieurs familles d’accueil, au bout d’un moment elle veut le changement. Elle m’a dit d’essayer de faire avec, donc je fais avec ».
L’accompagnement des accueillants et de leur(s) accueilli(s) permet de savoir comment s’organise la vie générale lors de l’accueil et ainsi de déceler des problèmes éventuels sur lesquels, le CESF peut intervenir.
- 3.2.5- Coordination des intervenants autour de la personne âgée
Le CESF peut avoir la mission de coordonner les relations entre la famille d’accueil, la personne âgée et l’intervenant extérieur quand il y en a un (infirmière, auxiliaire de vie sociale, tuteur…) : définir les horaires de venue et les missions de chacun, pour que chaque intervenant exerce sa profession dans la limite du champ d’intervention de l’autre.
Lorsqu’il y a des problèmes d’entente entre, d’un côté les accueillants, de l’autre les personnes âgées et enfin la famille des accueillis, le CESF peut intervenir en tant que médiateur pour améliorer la compréhension entre les parties et dénouer les situations conflictuelles. Cela peut permettre dans certains cas d’éviter qu’un accueil se termine.
Par exemple, Mme M : « Il y a eu des conflits c’est parce que le fils d’une de mes accueillies ne voulait pas me déclarer aux URSSAF, j’ai attendu cinq mois avant d’être déclarée, le Conseil Général était au courant, ils lui ont envoyé des courriers etc., mais au bout de cinq mois, quand il n’y avait toujours rien, j’ai envoyé un courrier aux URSSAF et de son côté, le Conseil Général aussi. »
L’union entre les accueillants, les accueillis et leur famille est très importante pour que l’accueil se déroule dans de bonnes conditions. Pour bien s’occuper de la personne âgée, l’accueillant familial doit se sentir bien et une entente cordiale avec la famille de la personne accueillie va dans ce sens. Mme M, suite au problème qu’elle à rencontré avec le fils d’une de ses accueillies elle m’a fait part des conséquences : « […] La grand-mère n’était pas bien, elle qui était déjà perturbée, elle l’est encore plus maintenant ! »
De bons rapports entre l’accueillant et la famille initiale de l’accueilli permettent à la personne âgée de se sentir à l’aise avec la famille d’accueil et cela peut également atténuer le sentiment de culpabilité que la famille des accueillis ressent parfois à l’idée de placer leur aïeul dans une autre famille que la leur.
Ce n’est pas le cas dans tous les départements mais les professionnels qui gèrent l’accueil familial (et dont peut faire partie un CESF) s’occupent des remplacements des accueillants familiaux lorsque ceux-ci prennent des vacances. Soit, ils les placent dans d’autres familles d’accueil temporairement, soit, s’il n’y a pas de famille d’accueil disponible, ils les placent dans des institutions adaptées si leur famille naturelle ne peut pas les accueillir le temps de vacances.
Dans le département D, les professionnels de l’accueil familial ne gèrent pas les remplacements ce qui peut être difficile à organiser pour un accueillant. En effet, placer leur(s) accueilli(s) dans une autre famille d’accueil est compliqué car elles n’ont pas souvent de contact entre elles et pour placer la personne âgée dans une institution, il faut souvent en faire la demande longtemps à l’avance. C’est un des points négatifs que Mme F a souligné, lors de notre entrevue : « Je pense qu’il serait bien qu’il soit créée une maison, pour quand on prend nos vacances, où on puisse mettre nos mamies. Une maison d’accueil pour les personnes accueillies. Parce que c’est pas évident. Moi je m’y suis prise tôt pour la maison de retraite, mais les prix c’est exorbitant et puis les enfants ne les prennent pas. »
Mme B, une accueillante de ce département, n’a pas ce problème : « Les remplacements sont gérés par la tutrice de Marise si c’est long ou ma sœur vient si c’est pour pas longtemps ».
Les remplacements occasionnels (de courte durée) des familles d’accueil ne sont pas gérés par les professionnels de l’accueil familial mais par les accueillants eux-même. Les remplaçants potentiels doivent être inscrits dans le contrat d’accueil, ainsi que leurs coordonnées pour que le CESF puisse les rencontrer au besoin. Il s’agit en général de parents proches ou de voisins ou bien d’amis des accueillants familiaux.
Mme Lg m’a donné son avis sur ce point : « C’est très compliqué de se faire remplacer, en général on demande à la famille ou à des amis, mais bon, le Conseil Général devrait faire quelque chose pour ça. »
D’après l’entretien que j’ai eu avec Mme B, professionnelle du PAFA*, les travailleurs sociaux peuvent également intervenir dans d’autres domaines concernant l’accueil familial.
- 3.2.6- La formation des accueillants familiaux
La durée et le contenu des formations ne sont pas précisés. Chaque département s’organise à sa façon mais elles sont obligatoires pour que l’agrément soit renouvelé. D’après la DGAS*, la formation initiale doit permettre au futur accueillant d’ « acquérir les bases minimales nécessaires à l’exercice de son activité », elle s’apparente à une information, et une mise à niveau sur la définition et les besoins des personnes âgées et handicapées. La formation continue est basée sur des cessions thématiques.
Le CESF a pour fonction d’organiser les formations des accueillants familiaux. Il doit tout d’abord repérer les thèmes de formations qui seraient les plus bénéfiques pour les familles d’accueil en fonction des besoins que ces dernières expriment. Ensuite, il doit rechercher les organismes de formation qui peuvent intervenir sur les différents thèmes sélectionnés et définir les groupes d’accueillants. Les cessions peuvent, en fonction des départements, se dérouler dans différentes villes pour faciliter le déplacement des accueillants familiaux (d’autant plus si le département est étendu).
Dans le département B, la professionnelle m’a informé que : « La formation initiale se déroule en deux parties : pendant cinq demi-journées, la famille d’accueil doit se rendre dans une maison de retraite pour prendre en charge des personnes âgées du levé au déjeuner, accompagnée d’une aide soignante, afin d’acquérir les règles de base (techniques de manutention, toilette et repas). La deuxième partie se déroule en deux jours et demi dans un foyer occupationnel (pour personnes handicapées). »
Mme T, une accueillante du département C, m’a parlé de la formation qu’elle a suivie : « C’est toute une journée. Le directeur, il vient et il nous parle : il nous dit ce qu’il faut faire en cas de problème, comment réagir… Il y a aussi un groupe de paroles avec la psychologue pour donner des conseils. Tout le monde doit raconter comment ça se passe chez elle, comment elle réagit en cas de pépin ou en cas de décès, tous ces problèmes là. Chacune essaie de répondre à ces questions. Mais avec la fréquence des visites y’a pas de problèmes, on est bien suivi, chaque famille a ses problèmes propres et on les règle au fur et à mesure. »
Dans le département D, la formation initiale dure 60 heures, réparties sur une semaine (???). Un organisme extérieur intervient mais pour l’instant les professionnels de l’accueil familial ne sont pas totalement satisfaits des organismes qui sont intervenus (car les formations sont trop scolaires). Les avis que j’ai pu recueillir auprès des diverses accueillants familiaux sont mitigés.
Mme F et Mme Lg ont le même avis : les groupes de paroles les intéressent mais pas les thèmes de formation. Mme F m’a dit : « Moi j’ai pas trouvé ça (elle fait la moue)… Enfin si c’est bien parce que ça nous permet de faire connaissance mais ça s’arrête là. Après entre ce qu’on dit et ce qu’on fait c’est différent. Quand on nous dit : Quand y’a une mamie qui tombe, vous la faite mettre à genoux pour la relever… Moi je vois pas Suzon à genoux pour la relever. »
D’après Mme Lg : « Très bien l’échange avec les autres familles d’accueil, par contre les infos sur les soins palliatifs, la manutention et comment communiquer avec la famille des accueillis c’est bof parce que chaque personne est différente alors ce n’est pas trop applicable. »
Par contre, Mme Le a été tout a fait satisfaite par la formation : « On a des contacts avec d’autres familles d’accueil ce qui nous permet de nous rendre compte qu’il y a quand même d’autres familles qui font ça aussi. Ça nous avait permis de parler de ce qu’on découvre en faisant ce métier là, savoir pourquoi les autres ont choisi ce métier là, donc c’était intéressant. Puis on avait eu aussi une période où on nous avait appris à manipuler les gens. J’ai trouvé ça super bien, parce que c’est vrai que, quand une personne âgée tombe, il faut savoir la relever sans se blesser et sans la blesser, et ça j’avais trouvé ça bien. Comment faire pour habiller une personne qui est alitée… Moi, j’ai bien aimé. »
Le CESF a donc un rôle important à jouer tout au long de la durée de l’accueil, mais il peut également intervenir lorsque ce dernier se termine.
- 3.6- La fin du placement
Il peut y avoir diverses raisons à la fin d’un accueil. La personne âgée peut en être à l’origine, si elle ne se sent pas à son aise dans la famille ou si elle souhaite changer de cadre de vie, mais cela est assez rare. La fin d’un accueil peut aussi arriver sur l’initiative de la famille de la personne âgée accueillie, pour des raisons de distances, de désaccord avec les accueillants ou bien à l’origine de ces derniers si la prise en charge de la personne âgée devient trop compliquée à gérer.
Dans un premier temps, le CESF peut, nous l’avons vu précédemment, servir de médiateur pour régler le mal-être ou le conflit.
Si cela n’est pas suffisant et que l’accueil doit se terminer, il doit alors intervenir pour préparer la fin de l’accueil, et éviter les ruptures brutales (changement de lieu d’habitation, changement de rythme et de mode de vie…). Plusieurs alternatives sont possibles en ce qui concerne la prise en charge de la personne âgée à la fin de l’accueil. Soit la personne âgée est placée dans une autre famille d’accueil (dans le cas où ce sont des désaccords qui ont provoqué la fin de l’accueil) et le CESF doit rechercher un accueillant familial qui correspondrait à la personne âgée, comme lors d’un premier placement.
Soit la personne âgée doit être placée dans une institution. Dans ce cas, le CESF a un travail préparatoire à effectuer. Tout d’abord, informer la famille et la personne âgée des différents établissements existants et conseiller le plus adapté au niveau d’autonomie de la personne âgée. Ensuite aider la famille à préparer la personne âgée à son entrée en établissement : visites des lieux, contact avec les employés de l’établissement et si possible accueil temporaire accueil temporaire Terme désignant un contrat d’accueil à durée déterminée, avec une date de début et une date de fin, prévoyant une prise en charge à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (de jour ou de nuit). dans l’établissement déterminé, pour tester.
L’accueil d’une personne âgée peut se terminer lors de son décès, qu’il s’agisse d’une mort naturelle ou bien d’une maladie. Dans tous les cas, c’est une épreuve à laquelle l’accueillant doit être préparé, car elle est parfois dure à surmonter. Cela peut faire l’objet d’un thème de formation défini par le CESF mais au moment du décès, ce n’est plus de son domaine, dans ce cas, il peut orienter la famille d’accueil vers le psychologue du service, s’il y en a un ou un psychologue extérieur au Conseil Général.
(...) fin des extraits (...)