DONNÉES PHYSIOLOGIQUES ET PRÉALABLES
Cette partie résume http://papidoc.chic-cm.fr/16levetoimarche.html
La plupart des grabataires, dont l’univers se réduit au lit et au fauteuil, le sont de manière imméritée : nous savons analyser les infirmités de la personne âgée mais nous avons beaucoup de mal à nous appuyer sur les capacités qui lui restent. Sans démarche de soins nous ne voyons que les manques et nous faisons preuve de paresse intellectuelle en pensant trop vite qu’« il n’y a rien à faire ».
Si nous nous écartons un peu du schéma gériatrique (guérir la vieillesse) et que nous nous contentons de souhaiter que le processus de vieillissement puisse permettre à la vie de la personne de s’accomplir jusqu’à la mort, nous allons quitter le perfectionnisme technique de la rééducation des adultes jeunes pour résoudre le problème de la personne : nous n’aurons jamais de champion olympique mais toujours un vivant.
Les pertes d’autonomie liées à l’alitement, voire à l’immobilisation au fauteuil, s’installent en quelques jours et évoluent très vite : au grand âge l’équilibre physiologique, est instable et bascule à la moindre brise. Pour pallier ces pertes, les méthodes de prise en charge habituelles en post-opératoire, voire en rééducation de syndromes neurologiques sont d’un perfectionnisme qui tue l’action en gériatrie.
La personne âgée conserve suffisamment d’énergie et de capacités physiques pour aller jusqu’à son dernier jour debout, et assurer de courts déplacements aidés. Or même courts ces trajets ont un rôle majeur sur plusieurs fonctions de l’organisme : sensorielle, musculaire, retour veineux, ossification ; mais aussi image de soi, narcissisme.
Effets de la verticalisation et de la marche :
La marche est une activité capitale : elle sollicite toutes les fonctions de l’organisme. Or l’utilisation des fonctions prévient « le vieillissement immérité, le vieillissement de surcroît ». Rappelons quelques rôles connus, mais oubliés au quotidien : la marche est si banale qu’on la sous-estime, ne lui attribuant aucune vertu « médicale ». Et pourtant, le système osseux, les cartilages, les muscles, les tendons et ligaments, la circulation veineuse, la ventilation respiratoire, le système nerveux périphérique et le système nerveux central bénéficient de la verticalisation et de la marche, même si la marche à lieu à petits pas.
La fixation du calcium se fait par la mise en pression des os :
- Au cours de l’action musculaire obtenue lors de l’exécution des gestes de la vie quotidienne.
- Par l’action de la pesanteur ; l’exemple de la vie en apesanteur dans l’espace est significatif : la perte de masse osseuse atteint parfois 12% chez les cosmonautes ayant séjourné 3 mois dans une station orbitale.
De même les cartilages se nourrissent lors de la verticalisation et de la marche.
La marche entretient le système musculaire : chez le vieillard de plus de 80 ans, la perte de la force musculaire peut atteindre 40 % après une semaine d’immobilisation. ; elle entretient aussi les tendons, ligaments et capsules articulaires : la fibrose d’une partie de ces éléments commence après 48 heures d’immobilisation.
Le retour du sang veineux et l’activité cardiaque sont améliorés par l’effort physique ; de même la fonction respiratoire est favorisée.
Enfin le système nerveux se trouve stimulé dans toutes ses composantes.
Il suit de tout cela que nous pouvons - et devons - verticaliser tous les patients.
LES OBSTACLES À LA MOBILITÉ
La mobilité du sujet âgé est le plus souvent diminuée.
Les pieds :
Les pieds du vieillard sont le siège de multiples altérations.
Les durillons sont des formations de corne liées au frottement de zones plus ou moins déformées ; c’est ce qu’on appelle ordinairement des cors. Ils sont douloureux et gênent la marche. Il faut savoir interroger la personne qui répugne à marcher : on s’apercevra souvent qu’elles ne marchent plus parce qu’elles ont mal aux pieds. On peut enlever les durillons facilement, mais il vaut mieux confier cette tâche à un professionnel (pédicure, médecin...) : un geste un peu trop appuyé peut créer une plaie dont on ne pourra pas prévoir l’évolution.
Les plaies sont fréquentes et souvent graves (artérite, diabète). Il faut être très prudent en coupant les ongles, et prévenir le médecin au moindre doute. L’examen des pieds par l’aide à domicile est d’autant plus important que la personne ne peut plus le faire : elle n’est pas assez souple et n’y voit plus assez bien.
Il y a des troubles sensitifs : on observe souvent une diminution de sensibilité de la plante des pieds, que ce soit par vieillissement, diabète, alcoolisme, paralysie... Le sujet âgé ne peut plus alors poser son pied correctement, puisqu’il ne sent plus sur quoi il le pose ni comment il le pose.
Les déformations des pieds augmentent avec l’âge. Pour l’essentiel on observe :
- Des pieds plats, ce qui n’a guère d’importance.
- Des pieds creux plus gênants notamment à cause des douleurs.
- Des désorganisations des orteils qui se rétractent, se chevauchent, forment des oignons (luxation du gros orteil en dedans). La désorganisation des orteils est une cause majeure de perte de la marche, contre laquelle il faut lutter par tous les moyens. Le plus efficace est la prévention : les orteils tiennent dans leur position normale grâce à un équilibre instable, et la moindre rupture d’équilibre impose une correction précoce. D’autre part les conséquences de cette perte de la marche seraient si graves qu’il est obligatoire d’opérer les déformations des orteils, même à un âge avancé.
On peut aider à la préservation des pieds par des moyens simples.
- La mobilisation. Il serait très utile à la fin de la toilette de mobiliser les nombreuses articulations du pied, ce qui permettrait de les assouplir et de limiter les rétractions mais aussi de stimuler la sensibilité souvent défaillante. Il faut aussi insister sur la cheville, qui est souvent bloquée.
- Le chaussage : la chaussure est à la fois une bonne et une mauvaise chose. C’est une bonne chose parce que cela permet de tenir le pied et de lutter contre le froid et les traumatismes. Mais c’est une mauvaise chose parce que la chaussure est un intermédiaire entre le sol et la plante du pied ; si elle n’est pas parfaitement adaptée elle va bouger, et la personne va se retrouver sur un appui instable qui augmente le risque de chute.
La chaussure évite les traumatismes par les cailloux ou les objets coupants, mais dès qu’elle n’est pas là non plus parfaitement adaptée elle risque d’être elle-même un objet traumatisant. Il en résulte que la bonne chaussure est difficile à trouver : si elle tient bien le pied le risque est qu’elle soit trop étroite et le blesse ; si elle est suffisamment ample pour ne pas blesser le pied elle ne le tient plus.
On pourrait presque dire que bien des personnes âgées feraient mieux de marcher pieds nus, ce qui stimulerait leur sensibilité plantaire. Mais les personnes âgées détestent en général marcher pieds nus. Par ailleurs il y a des études qui incitent à penser que globalement la chaussure est plutôt un élément de sécurité.
Il faut noter enfin que de nombreuses personnes âgées utilisent des mules, notamment parce qu’elles sont plus faciles à mettre. Le problème est que la mule n’a aucune fonction de soutien du pied, et qu’elle bouge sans cesse par rapport à la plante. Les mules sont un facteur majeur de chute, notamment dans les escaliers, et il faut absolument les supprimer : tout chaussage doit impérativement prendre le talon, quitte à se procurer un chausse-pied de grande longueur.
- Les semelles : la personne âgée aura souvent besoin de semelles pour calmer les douleurs, pour mettre des zones hors pression, ou pour aider à redresser des orteils en griffe ; ailleurs on proposera des talonnettes pour compenser le fait qu’elle a tendance à se laisser tomber en arrière ; ou encore on découvrira très souvent une inégalité de longueur des membres inférieurs, soit qu’elle suive une chirurgie soit qu’il s’agisse d’une inégalité ancienne méconnue. Le point important est que la semelle est faite pour un pied et une chaussure : les semelles ne peuvent être fabriquées si on ne sait pas dans quelles chaussures elles vont aller.
La prothèse de hanche :
C’est là une situation de plus en plus fréquente. On pose des prothèses pour une fracture du col du fémur (mais pas toujours : cela dépend du type de fracture, d’autres bénéficieront d’un clou). On retiendra quelques points essentiels :
- Les méthodes chirurgicales modernes permettent un appui instantané : la marche doit être reprise le lendemain de la pose de la prothèse.
- La prothèse de hanche ne se rééduque pas : la rééducation consiste à lever le patient et à le faire marcher. Il n’y a pas lieu de faire venir le kinésithérapeute. En pratique on le fait parce que les autres intervenants n’ont pas le temps, mais ce n’est pas techniquement justifié.
- Une douleur de prothèse de hanche est toujours anormale : on peut tolérer quelques douleurs dans les jours qui suivent mais une prothèse qui serait douloureuse plus d’une quinzaine de jours nécessiterait un réexamen médical.
- On n’utilise pas sa prothèse n’importe comment. Le risque principal est la luxation, qui se produit quand on met la cuisse en rotation interne et en adduction. Cela signifie que la personne est autorisée à écarter les jambes mais pas à les croiser. En particulier on se lève du lit en descendant du côté de la prothèse, mais on y monte de l’autre côté.
- Après chirurgie de hanche il est fréquent de voir un malade dont la rééducation n’a pas été parfaite (d’ailleurs cette rééducation est maintenant de plus en plus courte, et même pour certains inutile). Dans ce cas les muscles affaiblis sont le plus souvent ceux qui permettent de tourner le pied en dehors, ce qui conduit à des douleurs mais aussi à des chutes, le pied du côté malade venant buter contre le pied du côté sain. Il faut toujours veiller à ce que les pointes des pieds soient bien tournées vers l’avant.
Les autres problèmes de membres inférieurs :
Bien entendu il existe de nombreux autres troubles, notamment l’arthrose des genoux, peut-être la plus douloureuse et la plus difficile à corriger. Mais il faut insister sur les déficits musculaires. Ces déficits viennent de deux grandes causes : la dénutrition, contre laquelle il faut absolument lutter vigoureusement (c’est tout l’intérêt d’une alimentation riche, et notamment des charcuteries dont la personne âgée est souvent friande), et le défaut d’utilisation, qui nécessite une permanente stimulation à la marche.
Le déficit musculaire, la peur de tomber, les rétractions tendineuses se conjuguent pour aboutir à une démarche en flexum : la hanche est fléchie de quelques degrés, et le genou également, ce qui se voit très bien de profil et donne au sujet l’impression que s’il tombe il va tomber de moins haut. Mais il suffit de faire l’essai pour constater que cette démarche est très fatigante : il est beaucoup plus économique de marcher en verrouillant les genoux.
L’hémiplégie :
L’hémiplégie est naturellement une autre source de handicap moteur. La paralysie engendre un trouble évident de la mobilité. Souvent le sujet ne contrôle plus son mouvement et fait des pas trop courts ou trop longs, ce qui le met en danger de perdre l’équilibre. Il a souvent du mal à redresser le pied, ce qui l’amène à buter contre la marche d’escalier ou le seuil de la porte.
A l’inverse de la prothèse de hanche il a souvent le pied tourné vers l’extérieur, et bute contre les meubles. Il a souvent perdu la sensibilité de la plante du pied, et ne sent pas les irrégularités du sol. Quelquefois la paralysie fait qu’il ne se souvient plus de la moitié paralysée ; il ne pense donc pas à la faire travailler et peut même oublier qu’il est paralysé, se lever et tomber. Tout ceci doit être connu et surveillé. Mais les possibilités de l’hémiplégique sont souvent plus importantes qu’il ne le croit, que sa famille ne le croit, et même que les soignants ne le croient. Il est souvent possible de lever, voire de faire marcher un hémiplégique, pourvu qu’on le soutienne (même si c’est avec deux aides).
La gravité des chutes est plus importante :
- Le sujet risque de se faire mal, et ce d’autant plus que sa paralysie lui fait perdre les réflexes qui amortissent la chute).
- La fracture peut passer inaperçue, car la paralysie peut s’accompagner de perte de la sensibilité ; d’autre part la paralysie s’accompagne d’une décalcification et d’une fragilité osseuse.
- Mais encore le fait de tomber peut lui faire perdre toute confiance en lui. Le problème est que si on l’entoure trop il perdra aussi la confiance...
La maladie de Parkinson :
La maladie de Parkinson n’est pas une paralysie : les nerfs et les muscles sont normaux. C’est un trouble de l’organisation du mouvement. Notamment il arrive souvent que le sujet ne soit plus capable de commencer ses gestes, comme s’il manquait le starter ; par contre une fois commencé le geste se poursuit normalement.
Beaucoup de parkinsoniens connaissent des trucs pour démarrer : par exemple ils ne savent pas commencer à marcher de manière volontaire, mais ils peuvent le faire de manière réflexe, s’il sont devant un obstacle. Tel malade mettait sa canne devant son pied, fabriquant ainsi un obstacle artificiel ; il pouvait alors marcher et n’avait plus qu’à retirer sa canne... Le problème du parkinsonien est ainsi celui de l’adaptation et du réglage. Quand il veut se mettre à marcher il a du mal à démarrer, puis il se met en marche et a souvent du mal à s’arrêter ; les pas sont petits, rapides, les bras ne font plus office de balancier, il y a des arrêts brutaux et dangereux au moment de franchir une porte...
Bref le parkinsonien peut et doit marcher, mais il est dangereux de le laisser le faire seul.
LES TRANSFERTS
On appelle transfert le fait de passer d’une position à une autre. Il y a deux types de transferts :
Le transfert couché - assis :
Il s’agit de passer de la position horizontale à la position assise au bord du lit. Ce transfert permet d’aller du lit au fauteuil, mais aussi de préparer la sortie du lit pour se mettre debout.
Chez le sujet âgé ce transfert peut être gêné par des vertiges, souvent liés à une baisse de tension. Il faut donc être patient et laisse au cœur du malade le temps de s’adapter au changement de position ; il faut aussi le faire boire.
La technique du transfert est très importante. Il faut respecter trois impératifs :
- Le malade doit être en sécurité : il faut veiller à ce qu’il ne tombe pas du lit, soit quand on le tourne soit quand il est placé au bord du lit. Outre son intérêt évident, il est indispensable que le patient ressente qu’il est en sécurité, sinon il risque d’avoir des réactions de défense, la plus nuisible étant la rétropulsion dont on parlera plus loin.
- L’intervenant doit être en sécurité : il faut qu’il soit à l’aise pour travailler, qu’il connaisse les techniques lui permettant d’économiser son dos, notamment les techniques de glissé.
- La manipulation ne doit pas être traumatisante : il faut faire attention aux peaux fragiles que la moindre prise un peu appuyée va léser, au point qu’il sera nécessaire de manipuler le patient avec un drap ; on a trop souvent tendance à essayer de lever le malade en saisissant un poignet et en tirant dessus. C’est particulièrement dangereux, compte tenu de la fragilité des membres supérieurs chez la personne âgée. Le risque est la lésion de l’épaule, plus rarement du poignet ou du coude.
Quand on veut transférer un patient du lit au fauteuil il faut se préparer, surtout si on est seul. La position du fauteuil est fondamentale : il faut réfléchir à l’endroit où on le met pour que le trajet à accomplir par le patient soit le plus court possible mais sans gêner l’intervenant. Il ne faut pas oublier enfin que les fauteuils roulants ont des systèmes de verrouillage des roues ; on doit toujours les verrouiller avant tout transfert.
Le transfert assis - debout :
Le transfert assis - debout réalise la verticalisation du patient. Il va poser les mêmes problèmes de baisse temporaire de la tension artérielle. Mais il y aura en plus un problème de muscles : les muscles des cuisses notamment fondent en quelques jours de lit.
Il faut donc se méfier des jambes qui fléchissent sous le poids du sujet, et insister pour que les jambes soient toujours bien tendues et les genoux bien verrouillés.
L’équilibre obtenu est alors souvent instable : le patient a du mal à trouver ses appuis et à se tenir dans cette nouvelle position, il faut donc être particulièrement vigilant ; les choses s’arrangent très souvent dans le secondes qui suivent. Tout comme le transfert couché - assis, le transfert assis - debout doit être préparé : on doit avoir mis en place les sécurités qui permettront d’éviter un traumatisme grave si les choses se passent mal ; pas question par exemple de lever seul un patient trop lourd.
LES DÉPLACEMENTS
On appelle déplacement le fait pour un sujet de marcher (ou d’utiliser son fauteuil roulant). Cette activité peut être parasitée par plusieurs phénomènes.
La rétropulsion :
C’est le mécanisme le plus important à connaître. Il se compose de deux éléments :
- Le principal système responsable de l’équilibre est situé dans les oreilles. Lorsque le patient reste couché ce système se dérègle en quelques jours, et il n’indique plus la verticale. Le patient a l’impression d’être vertical quand il est penché en arrière.
- Le sujet âgé a peur de tomber sur la face ; il tend donc à prendre son équilibre sur les talons.
La rétropulsion est très facile à repérer :
- Quand le patient est couché il a le cou en extension.
- Quand il est assis il a la tête en arrière, le torse complètement déjeté, les jambes tendues, il appuie au fauteuil sur la nuque et le bas des fesses, le dos n’est pas contre le dossier, les jambes sont tendues ; en somme il est droit mais il a perdu le sens de la verticale. Bien entendu cette position n’est pas confortable, il ne peut regarder que le plafond, il glisse du fauteuil.
- Quand il est debout, il porte son poids sur les talons et retombe sur le siège.
La lutte contre la rétropulsion est essentielle :
- Il faut éviter à tout prix de laisser le malade au lit. Toutes les occasions sont bonnes de le verticaliser : la toilette au lit doit disparaître au profit d’une toilette assise. Les repas doivent être pris assis au bord du lit (ce qui évite les fausses routes).
- Quand il est assis il faut que le siège n’aggrave pas la rétropulsion. C’est le cas notamment des bons fauteuils qui permettent au sujet d’être confortablement assis, c’est à dire de se laisser aller à la rétropulsion et de perdre leur tonus vertébral. Si on veut que le sujet garde sa verticalité il faut qu’il y ait un effort. Un bon siège a un dossier strictement vertical : la minime inclinaison des fauteuils spécialisés suffit à déclencher la rétropulsion. De même il faut que le patient ait les pieds au sol (ou sur un marchepied et les cuisses strictement horizontales. Enfin le fait de l’attacher sur son siège lui fournit un appui grâce auquel il va pouvoir enclencher le mécanisme de la rétropulsion.
- Quand il est debout et qu’on veut le faire marcher, il faut observer comment il réagit au contact de l’aidant : très souvent on le fait marcher en se mettant face à lui et en prenant ses mains ; on verra vite qu’alors il a tendance à tirer sur les mains de l’aidant, ce qui aggrave la rétropulsion ; mais si on se met derrière lui et qu’on le pousse, il va s’appuyer sur l’aidant en aggraver aussi la rétropulsion. Il n’y a pas d’autre solution, du moins quand on le peut, que de se mettre de côté, de tenir le coude du malade et d’essayer d’avoir une position neutre, qui ne tire ni ne pousse.
Les défauts de la marche :
Tout le monde doit se mettre à faire marcher le sujet âgé : si on ne compte que sur le kinésithérapeute il ne pourra pas assurer une présence suffisante. Il s’ensuit que ce sont les aides à domicile qui feront l’essentiel du travail. Elles ne le feront que si elles en ont les moyens. Il faut donc qu’elles connaissent les défauts de la marche.
- Le flexum : c’est une attitude par laquelle le patient, qui a peur de tomber, se met à fléchir les hanches et les genoux. C’est une attitude très fatigante, et il faut la corriger en lui rappelant qu’il doit tendre les jambes. Cela ne pourra se faire qu’avec l’aide du kinésithérapeute.
- La longueur du pas : le sujet âgé marche à petits pas, il faut corriger ce défaut : faire un pas est un déséquilibre, plus il y a de pas plus il y a de chutes.
- L’élévation du pas : le vieillard traîne les pieds, ce qui multiplie les risques d’accrochage et de chute ; il faut là aussi corriger.
- Le croisement des pieds : il reconnaît de multiples raisons, mais l’une des plus importantes est la faiblesse des muscles fessiers, dont le rôle est notamment de tourner le pied en dehors ; lorsque ces muscles ne peuvent remplir leur rôle les jambes ont tendance à se croiser, avec un risque de chute évidemment majeur. Une solution est alors d’inverser les chaussons le droit à gauche et le gauche à droite : cela peut suffire à gagner les quelques centimètres qui vont permettre d’éviter la chute.
- Les recherches d’appui : le sujet âgé a tendance à rechercher le secours des chaises (qui tombent), du fourneau (qui brûle), des murs (qui glissent) des armoires (qui sont trop loin). Toutes ces recherches sont dangereuses, et il faut obtenir qu’il ait suffisamment confiance en lui pour y renoncer.
Il faut être particulièrement attentif aux troubles visuels : le fait de perdre la vue expose à de nombreux dangers. Sans examiner le cas des aveugles, on devra faire très attention aux petits obstacles, qui peuvent causer de grandes chutes. C’est le cas des descentes de lit ou des lames de parquet qui dépassent, d’autant plus que souvent la personne âgée perd la sensibilité de la plante des pieds.
Il faut se donner les moyens d’éclairer en permanence le couloir par lequel la nuit la personne âgée va aux toilettes, et ne pas hésiter à acheter une chaise percée (sur ordonnance). Il ne faudra pas oublier l’importance des troubles visuels. Ils sont naturellement renforcés par la tendance du patient à regarder vers le sol, par crainte de manquer un obstacle mais aussi à cause des troubles vertébraux.
Les escaliers :
Les escaliers sont évidemment une épreuve redoutable pour la personne âgée. Les rhumatismes en tous genres (et notamment l’arthrose) peuvent interdire la montée des marches, ce qui fait que le vieillard renonce à utiliser les étages.
Cependant il y a des solutions : il faut savoir se demander si on ne pourrait pas améliorer la situation en mettant une ou deux rampes, il faut savoir que la douleur de l’arthrose est sensible aux médicaments, il faut savoir aussi que la chirurgie de l’arthrose peut désormais être proposée à n’importe quel âge.
LES AIDES À LA MARCHE
Il existe de nombreuses aides à la marche :
- La canne. C’est la plus simple. Il ne jamais oublier qu’elle s’utilise du côté sain, du moins chaque fois que c’est possible. D’autre part la canne est toujours trop longue : tout comme les membres inférieurs doivent être tendus pour être efficaces, une canne bien ajustée doit être tenue bras presque tendu. Beaucoup de personnes âgées ne prennent la canne que pour se rassurer. En réalité elles ne s’appuient pas dessus. Cela ne veut pas dire qu’elles ne servent à rien : elles permettent au patient de repérer l’environnement et agissent comme un nouvel organe sensoriel ; mais il faut y faire attention : les personnes âgées risquent alors de se prendre les pieds dans une canne inutile.
- La canne tripode : c’est une canne qui tient au sol par trois pointes ; son gros avantage est qu’elle tient toute seule, ce qui la rend très avantageuse chez le sujet paralysé.
- Le déambulateur : c’est un cadre à quatre pieds qui permet au sujet de marcher en le tenant devant lui, un peu comme une chaise qu’il prendrait par le dossier. Il permet un bon équilibre. Il existe trois modèles : le cadre fixe, que le sujet déplace en le soulevant, et qui a l’avantage d’être très stable ; le cadre déformable, que le sujet peut faire glisser, mais qui est plus instable ; le cadre à roulettes, qui a les avantages des deux précédents, mais reste un peu plus instable que le cadre fixe.
- Le fauteuil roulant, enfin.
Ces diverses aides s’achètent ou se louent sur prescription médicale. Pour les cadres et les fauteuils, il faut penser à la largeur des portes et aux marches...
MARCHER POUR ALLER OÙ
C’est là le problème essentiel. Car le but poursuivi est double :
Il y a d’abord un objectif de rééducation. On fait marcher le sujet âgé pour qu’il en garde l’habitude, pour lutter contre la décalcification, pour faire circuler le sang, pour éviter la fonte des muscles, etc.
Mais il ne faut pas oublier que marcher doit rester un plaisir. La vieille dame à qui on a réussi à faire faire le tour de sa table de cuisine n’a rien gagné : le but est de lui permettre de faire le tour de son jardin. Il importe ici de rester modeste : cet objectif est rarement atteint...