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13 - Autorité parentale

Contenu de l’autorité parentale - L’exercice de l’autorité parentale à distance : petites et grandes misères

Avant la loi du 4 juin 1970 relative à l’autorité parentale, on parlait de puissance paternelle. Cette évolution sémantique traduit bien les changements de la société et l’évolution des rapports entre parents et enfants. La puissance paternelle constituait un droit exclusif du père, droit de vie et de mort sur l’enfant jusqu’au 4ème siècle, droit de correction jusqu’en 1935... L’autorité parentale est un droit, mais surtout une mission, une responsabilité à assumer par les deux parents pour "protéger l’enfant dans sa santé, sa sécurité et sa moralité" (article 371-2 du code civil).

Il en découle trois conséquences importantes à retenir, notamment dans le cas du placement d’un enfant. La première est que l’autorité parentale constitue une mission d’ordre public. En droit, cela signifie qu’elle échappe à la volonté des parties et que les parents ne peuvent y renoncer, ni même la déléguer. Seul un jugement peut la modifier. En d’autres termes, le placement de l’enfant ne supprime pas, ne diminue pas en principe l’autorité des parents.

La deuxième conséquence est que l’autorité parentale est aménagée dans l’intérêt de l’enfant (là encore, en principe, car dans la pratique, l’intérêt de l’enfant peut être bafoué). L’autorité parentale appartient au père et à la mère pour protéger l’enfant. C’est pourquoi elle peut être contrôlée par la société en cas de maltraitance, de négligence par exemple.

Enfin, la troisième conséquence s’inscrit dans la logique des deux précédentes. L’éducation revient aux parents, et leur reste acquise malgré la séparation et le placement de l’enfant. Dans ce cas, ils exercent tous les droits compatibles avec la mesure de placement.

Quels sont ces droits ? Quel est le contenu de l’autorité parentale ? Il convient de répondre à cette question avant d’aborder les difficultés d’organisation de l’autorité parentale lorsqu’elle doit s’exercer à distance, notamment dans le cadre de l’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). . Quelles répercussions pour l’enfant au quotidien ? Quelles revendications des assistantes maternelles ? Quels conflits possibles au sein de l’institution ?

Contenu de l’autorité parentale

Le code civil n’a pas dressé une liste des droits et devoirs des parents. Il s’est contenté de citer le droit et devoir de garde, de surveillance et d’éducation. Aussi, pour en brosser un rapide inventaire, peuvent être utilisés les éléments essentiels de l’énumération proposée par Pierre Verdier (1993).

L’autorité parentale s’exerce dans le choix des prénoms (article 57 du code civil), le droit de consentir à l’adoption (articles 347-348 du code civil), le mariage d’un enfant mineur (articles 148 et suivants) et l’émancipation (article 61, loi du 8 janvier 1993).

Si le mariage du mineur et l’émancipation restent des cas relativement marginaux, la question de l’adoption, qui se pose parfois en accueil familial, mérite une attention particulière. En effet, l’adoption plénière modifie totalement le statut de l’enfant, sa filiation et son appartenance familiale. De plus, elle est irrévocable.

On comprend dès lors que le législateur se soit entouré de précautions en ce domaine. L’adoption suppose une demande de l’adoptant, le consentement du détenteur de l’autorité parentale (parents ou conseil de famille), celui du mineur s’il est âgé de plus de 13 ans, et une décision judiciaire. Par consentement des parents, il faut entendre l’accord du père et de la mère, que l’enfant soit légitime ou naturel reconnu. Ce consentement peut être rétracté pendant un délai de deux mois.

Enfin, en cas de désintérêt manifeste des parents, et quoi qu’il en soit de leur refus de consentir à l’adoption, le tribunal peut prononcer l’adoption s’il estime que l’intérêt de l’enfant est en jeu (article 348-6 du code civil).

Dans la pratique, l’adoption est rarement envisagée comme une hypothèse de travail avec les parents. Au contraire, elle représente, pour les enfants grands, l’aboutissement d’une longue période de relations familiales fluctuantes, et est en tant que telle vécue comme le signe d’un échec du maintien des liens. Dans ces circonstances, il est logique que ce droit de consentir à l’adoption soit rarement exercé tant il est confondu dans l’opinion publique avec la notion d’abandon. Pour que ce droit soit positivé, il faudrait un réel changement des mentalités.

Hormis les cas précités, c’est surtout dans le quotidien, dans le choix des modes de vie, que peut le mieux s’exprimer l’autorité parentale puisqu’elle concerne la garde de l’enfant. Depuis la loi du 22 juillet 1987 relative à l’exercice conjoint de l’autorité parentale, la garde en est un attribut indissociable.

Ceci signifie que le tiers, chez lequel la résidence d’un enfant peut être fixée par le juge des affaires familiales en cas de divorce, ou par le service de l’aide sociale à l’enfance en cas d’accueil provisoire, n’est jamais le gardien. Dans l’histoire des assistantes maternelles, longtemps appelées "gardiennes", cette réalité est parfois difficile à admettre, notamment pour celles qui se laisseraient entraîner vers le désir de se substituer à des parents défaillants.

Cependant, en dissociant les notions de "gardien de droit" et de "gardien de fait", il apparaît pour certains magistrats que les assistantes maternelles doivent être considérées comme les gardiens de fait des mineurs qu’elles accueillent, quand bien même ce serait le service qui les emploie qui serait gardien de droit.

A ce titre, elles doivent se voir reconnu leur droit à agir devant le juge des enfants si elles considèrent qu’une mesure de protection doit être prise pour l’enfant. Elles doivent également être reconnues parties à l’instance dans le procès d’assistance éducative, avec tous les droits que cela implique : droit d’agir, d’être entendues, d’utiliser les voies de recours de l’appel et du pourvoi en cassation.

Cette réalité du droit de garde est parfois aussi difficile à comprendre pour le mineur non émancipé qui est sensé être domicilié chez ses père et mère (article 108-2 du code civil). C’est donc leur adresse qui doit figurer sur sa carte d’identité, et non celle du foyer ou de l’assistante maternelle s’il a été confié à l’aide sociale à l’enfance ou à un service d’accueil familial.
Dans le même ordre d’idées, l’enfant devra, pour toute sortie du territoire national, obtenir l’autorisation de l’un ou l’autre de ses parents, et ce indépendamment de la fréquence des liens entretenus.

Enfin, la surveillance appartient aux titulaires de l’autorité parentale, sauf restrictions par mesures judiciaires, assistance éducative, délégation, déchéance. Le choix des relations de l’enfant doit être contrôlé par les parents, et ce contrôle est peu limité en la matière, sauf par la loi du 4 juin 1970 (article 371-4 du code civil) protégeant les rapports entre enfants et grands-parents, voire en cas de situations exceptionnelles protégeant les rapports entre familles d’accueil et enfants, sur décision du tribunal.

Ainsi, même en cas de placement, les parents devraient pouvoir exprimer leur avis sur les relations de leur enfant. Comme ils devraient pouvoir assurer son éducation (article 375 du code civil) sauf si les conditions de celle-ci apparaissent gravement compromises, choisir sa religion, veiller à sa santé en donnant l’autorisation d’opérer (décret du 14 janvier 1974), authentifier tout contrat de travail dès lors que l’enfant est mineur (articles 211-4 et 211-5 du code du travail).

Cet inventaire des droits et devoirs des parents permet de mieux saisir la complexité lors des mesures éducatives. Le principe énoncé à l’article 375-7 du code civil assure "que les père et mère dont l’enfant a donné lieu à une mesure d’assistance éducative, conservent sur lui leur autorité parentale et exercent les attributs qui ne sont pas incompatibles avec l’application de la mesure". Jusqu’en 1984, les enfants placés étaient assimilés aux pupilles de l’Etat, ce qui laissait présager la dérive possible du non respect de la place des parents.

Aujourd’hui où l’on parle davantage de collaboration, de partenariat, la situation a-t-elle réellement évolué ? Comment peut-on exercer l’autorité parentale à distance ? Quelle dissymétrie est ainsi posée entre les intervenants auprès de l’enfant ? Quels décalages peuvent être repérés entre les textes de lois et le quotidien des pratiques ?

L’exercice de l’autorité parentale à distance : petites et grandes misères

On sait, dans les familles divorcées et recomposées, combien il est déjà difficile pour le parent non-gardien d’exercer sa fonction parentale, même en dehors de tout litige ou de toute défaillance personnelle. L’éloignement crée de fait un risque majeur de non-exercice de l’autorité parentale.

Qu’en est-il pour les parents des enfants placés ? Si aucune étude statistique globale n’existe sur leur situation, on peut néanmoins repérer les obstacles rencontrés : distance géographique, imprégnation dans l’éducation transmise par la famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! , disqualification sociale et personnelle des parents, habitudes de services tendant à exclure les parents du champ décisionnel, difficultés à interpeller des parents considérés comme défaillants...

La liste serait longue des entraves réelles ou fictives à l’exercice de l’autorité parentale. Seule la vigilance du service de placement peut garantir aux parents une réelle participation à la vie de leur enfant. Très souvent, l’exercice de l’autorité parentale par les parents se résume à des aspects purement formels : apposer une signature sur les bulletins scolaires, les diverses autorisations...

La forme est respectée, mais non le sens et l’esprit de la loi. En effet, dans la quotidienneté du placement, les valeurs éducatives transmises, les liens avec le système scolaire, le choix des relations de l’enfant, restent l’apanage des familles d’accueil.

Un simple exemple, celui de la scolarité des enfants, suffit à évoquer l’écart entre le texte et les pratiques. Certes, dans la plupart des cas, les parents sont informés des résultats scolaires de leur enfant, mais ils seront beaucoup plus rarement conviés aux réunions avec les enseignants. S’il semble normal que l’éducateur et/ou l’assistante maternelle y soient présents, il apparaît moins fréquent d’y associer les parents. Dès lors, il n’est pas rare d’entendre des revendications en terme de substitution telle l’idée d’une "délégation" de signature des bulletins scolaires par les assistantes maternelles.

Pour justifier un tel dérapage contraire à la loi, on met en avant le désintérêt des parents, et surtout l’intérêt de l’enfant. Stigmatisé, confronté au regard des autres, l’enfant placé est parfois en difficulté dans sa vie scolaire. La moindre activité d’éveil en dehors de l’école requiert l’autorisation signée des parents, et donc la procédure habituelle : transmission de la demande de l’assistante maternelle à l’éducateur, jusqu’aux parents, et retour de l’autorisation. Dans cette situation d’attente, l’envie émerge un jour de court-circuiter le maillon le plus faible, celui situé le plus loin de l’enfant.

Entre le respect de l’autorité parentale et le désir de répondre au plus vite aux besoins de l’enfant, tout se joue selon les priorités de chacun. L’autorité parentale peut dès lors devenir une réalité ou une coquille vide, selon les politiques de service.

L’autorité parentale, au-delà des droits et des devoirs, est, à n’en pas douter, le champ d’une lutte où appropriation de l’enfant, facilité des décisions à prendre, manque de moyens pour interpeller autant qu’il le faudrait les parents défaillants, se conjuguent pour oublier les termes de la loi, et parfois l’intérêt de l’enfant.

bibliographie

Fulchiron H. "Pérenniser le couple parental, l’exemple de la loi du 22 juillet 1987", in Autorité, responsabilité parentale et protection de l’enfant,
Confrontations Européennes Régionales, Ed Chronique Sociale, 1992

Verdier P. "L’autorité parentale, le droit en plus", Bayard, 1993

Verdier P. "Lexicode de l’aide sociale à l’enfance", collection travail social, Bayard, 1995

Verdier P. "Guide de l’aide sociale à l’enfance", collection travail social, Bayard, 1995

L’accueil familial en revue, n° 2, septembre 1996, édition IPI

P.-S.

Avertissement : ce qui précède n’est qu’un des nombreux chapitres du Guide de l’accueil familial, publié en 2000 aux Éditions Dunod, Les textes réglementaires ayant évolué, certaines références aux contrats, rémunérations, lois... ne peuvent servir que de traces ou de repères « historiques ».