Bienvenue chez vous et nous !
Héberger un parent âgé, un ami handicapé, un frère malade, une cousine convalescente... est une coutume qui se perd. Par manque de temps, par manque d’argent, par manque d’envie parfois. Pourtant, tout le monde n’a pas perdu cette habitude solidaire. Certains en ont même fait leur métier. Et même pour de parfaits étrangers. Bienvenue chez les accueillants familiaux
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Agréés pour prendre en charge à leur domicile des personnes âgées ou handicapées adultes n’appartenant pas à leur propre famille, les accueillants familiaux proposent une alternative aux placements en établissements spécialisés.
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- Gilles, qui a toujours vécu chez sa mère, retrouve un cadre familial rassurant chez les Domergue. Photo Zoé Busca.
C’est une jolie ferme artésienne réaménagée à la frontière du Ternois et du Béthunois... Ici vivent Rosette et Jean-Michel Domergue, la petite cinquantaine, ancienne aide-soignante à domicile et ancien cadre-infirmier à l’hôpital. Le couple habite avec la maman de Rosette, mais aussi en compagnie de Gilles* et Antoine*, adultes handicapés adultes handicapés Pour avoir la qualité de personne handicapée au sens de la loi, celle-ci doit avoir soit un taux d’Incapacité permanente partielle (I.P.P.) égal ou supérieur à 80%, soit un taux d’I.P.P. compris entre 50 et 80 % ET une reconnaissance d’inaptitude au travail. mentaux, et Claudine*, une vieille dame de 85 ans.
Règles de vivre ensemble
Agréés comme famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! de-puis deux ans par le Conseil général, les Domergue prennent ainsi soin, en pension complète à leur domicile, de personnes âgées et handicapées. Ce statut signifie une entière disponibilité pour leurs pensionnaires. 24h/24, 7j/7. Bien sûr, comme dans tout métier, les accueillants familiaux ont la possibilité de se faire remplacer pour souffler [1]. Et puis, chez les Domergue, il y a des horaires et des règles de vivre ensemble à respecter.
« Nous sommes plutôt à cheval sur les horaires », précise Jean-Michel. « On prend le petit déjeuner à 9h, par exemple. Le dîner est vers 18h et à 19h Rosette et moi avons fini notre journée. C’est important de séparer le travail et la vie privée ».
Dans le même esprit, accueillants et accueillis définissent des espaces collectifs et des espaces personnels. Ainsi, alors que Jean-Michel nous reçoit dans une pièce « privée », Gilles hésite au seuil de la porte avant d’être invité à entrer. « Cela permet de vivre les uns avec les autres en préservant nos intimités ». Dans la maison, chacun a sa chambre.
Projet de vie
Un autre critère, tout particulièrement important aux yeux de Rosette et Jean-Michel, c’est le « projet de vie » : « Nous ne faisons pas de gardiennage ; chaque pensionnaire doit avoir un projet de vie. D’abord on le détermine ensemble et puis on cherche comment le réaliser. Antoine, par exemple, a déjà atteint les objectifs de son projet ».
Antoine, en effet, est le plus ancien pensionnaire des Domergue. Arrivé il y a deux ans, il était alors « en perdition ». Vie difficile. Alcool. Médicaments. Aujourd’hui, c’est lui qui s’occupe du jardin et de la basse-cour. Avec fierté. « Voyez, tout ce terrain-là, c’est pour les poules et les canards. Dans la cabane, il y a des lapins. On les nourrit avec du bio... » Au départ plutôt gêné par l’appareil photo, Antoine est maintenant rayonnant, un énorme lapin dans les bras.
Gilles, lui, sourit tout le temps, un peu timide. « Ma mère est trop âgée », explique-t-il. Celle-ci ne pouvant plus s’occuper de lui, Gilles vit donc aujourd’hui, à 55 ans, chez les Domergue, où il semble avoir trouvé ses marques.
Plus près du soin
Mais l’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). , pour Rosette et Jean-Michel Domergue, c’est aussi des coups durs. Une dame de 90 ans hébergée d’urgence. Des familles ayant l’impression d’abandonner leurs proches. Des personnes en fin de vie qui s’en vont. Des urgences la nuit. Des hospitalisations...
Malgré tout, le couple semble avoir trouvé sa voie. Peut-être en raison de tout cela d’ailleurs. « Mon souci, c’était de me rapprocher des soins », explique Jean-Michel. « J’ai travaillé 31 ans à l’hôpital. Mais, après la réforme hospitalière, ce n’était plus de mon goût. Je trouvais qu’il n’y avait pas d’adéquation avec le soin ».
Il a alors quitté son emploi et lancé une demande d’agrément auprès du Conseil général. « J’ai commencé seul et puis ma femme m’a rejoint. Mes collègues voyaient cela comme une régression sociale, mais pour moi c’est une renaissance professionnelle et humaine ».
Progrès à venir
Reste maintenant, pour les accueillants familiaux, à défendre leur métier. « C’est encore loin d’être aussi statué que les nourrice agréées ! » En effet, bien qu’ayant fait la preuve de son utilité sociale, l’accueil familial est pour l’heure en avance sur la législation. Si le prix de la prestation est défini officiellement, il reste peu valorisé.
Selon l’association Famidac, il faut au moins deux pensionnaires pour garantir l’équivalent d’un SMIC. D’autre part, il y a encore des lacunes, concernant les remplaçants par exemple.
Compte-tenu de l’actualité - vieillissement de la population, maisons de retraite surchargées, perte du lien social, paupérisation des personnes âgées - l’accueil familial a tendance à se développer. Mais sans doute se développerait-il plus vite si l’Etat tenait plus compte de ces contraintes et s’il était plus promu !
Car tout le monde y gagnerait. La collectivité d’abord : « C’est beaucoup, beaucoup moins cher que les maisons de retraite ! Dans le coin, même les maisons les moins chères reviennent au moins à 3 ou 400 € de plus que l’accueil familial ! » Enfin, pour les pensionnaires eux-mêmes, âgés ou handicapés, cette solution offre un cadre familial bien plus agréable.
Zoé Busca
L’accueillant
Locataire ou propriétaire, vous pouvez demander un agrément au Conseil général pour devenir accueillant familial. Cet agrément vous donne le droit d’héberger à titre onéreux, un adulte handicapé adulte handicapé Pour avoir la qualité de personne handicapée au sens de la loi, celle-ci doit avoir soit un taux d’Incapacité permanente partielle (I.P.P.) égal ou supérieur à 80%, soit un taux d’I.P.P. compris entre 50 et 80 % ET une reconnaissance d’inaptitude au travail. , une personne âgée, un malade ou un convalescent. Vous pouvez accueillir jusqu’à trois personnes. L’agrément n’est possible qu’au-delà du 4e degré de parenté entre accueillant et accueilli.
L’accueillant doit garantir le logement de ses pensionnaires dans une chambre indépendante, mais aussi tout ou partie de leur prise en charge matérielle, morale ou relationnelle : nourriture, soins (sauf infirmiers), activités, accompagnement, courses, linge, ménage...
L’accueillant perçoit un salaire pour chaque pensionnaire dont il s’occupe : environ 750 €, un peu plus selon le niveau de dépendance de la personne et jusqu’à 400 € supplémentaires si la personne est en fin de vie). L’accueillant perçoit également un loyer (environ 180 €) et un remboursement des frais (dans les 500 €).
L’accueilli
La personne accueillie bénéficie d’un environnement familial et d’un soutien médico-social, mais peut aussi bénéficier de l’allocation logement à caractère social ou l’aide personnalisée au logement, ainsi que de la prise en charge par l’aide sociale en cas de ressources insuffisantes (APA ou AAH).
Pour une personne financièrement aidée par le département, cela ne change donc nullement ses dépenses. Pour trouver une famille d’accueil, vous pouvez vous adresser à votre Conseil général, à l’association Famidac ou chercher dans les petites annonces.
Conditions pour l’agrément
- Mettre à la disposition de chaque personne une chambre indépendante d’au moins 9m² (16m² pour 2 personnes), avec un poste d’eau potable à proximité immédiate et un moyen de chauffage adapté.
- Accepter les visites de contrôle de votre Conseil général et le suivi médico-social du pensionnaire.
- Passer un contrat écrit avec la personne accueillie ou son tuteur, en informer immédiatement le Conseil général.
- N’accepter de la personne accueillie ni don, ni testament.
- Assurer une présence permanente ou garantir son remplacement en cas d’absence. À tout moment, les pensionnaires doivent pouvoir solliciter l’assistance d’une personne disponible et compétente.
* Les prénoms des pensionnaires ont été changés pour préserver leur intimité.