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L’accueil familial médico-social, alternative à l’internat

Alain ROCCI, chef de service - PFS du Centre d’Accueil Spécialisé de
Forcalquier (04) - texte intégral.

Pages 69 à 75

1. PRÉSENTATION DE LA STRUCTURE

Le placement familial spécialisé fonctionne depuis 1990 pour 58 adultes handicapés adultes handicapés Pour avoir la qualité de personne handicapée au sens de la loi, celle-ci doit avoir

pris en charge par 33 familles (27 « fixes », 4 de relais, 2 de vacances). À l’origine, l’éloignement maximal des familles d’accueil était fixé à 40 kms. Depuis 1996, l’extension du service sur l’ensemble du département se traduit par un regroupement par deux des familles dans une proximité relative, afin de se soutenir ou de rompre un éventuel isolement.

1.1. Approche générale

Le premier point fort est l’aspect spécialisé qui recouvre le suivi de l’équipe pluridisciplinaire, c’est-à-dire qu’à aucun moment l’usager et l’accueillant ne sont seuls ou livrés à eux-mêmes. Il s’agit bien d’un placement en institution, mais sous forme de mini-structures éclatées. La principale variante est que l’encadrement au quotidien est assuré par une famille, avec un fonctionnement donnant la place à chacun des intervenants selon un ordre inhabituel, à savoir d’abord l’usager et l’accueillant, puis l’institution avec son administration, son suivi et accompagnement, son contrôle, et d’autres intervenants possibles.

Le point fort de cette unité réside dans la possibilité offerte aux familles d’accueil de se ressourcer, de consacrer du temps à elles-mêmes, à leurs enfants et amis, à leurs loisirs. À ce niveau de la réflexion, il est apparu nécessaire de mettre en place des « familles relais » associées à un service d’accueil de jour institutionnel. Ces deux éléments permettent aux familles « fixes » une coupure dans la prise en charge.

La loi 10 juillet 1989 donnait la possibilité aux établissements et services habilités de mettre en place de tels dispositifs (à travers l’article 5 titre II). Ceci n’est que le prélude à la conceptualisation d’une prestation qui se devait de répondre à des indications touchant à la fois les utilisateurs, les prestataires, les financeurs sans oublier l’adaptation des moyens ou la réponse aux besoins.

Tous ces éléments pris un à un recèlent un fourmillement de questionnements, de réponses et de sensibilités diverses. Il fallait donc organiser le dispositif.

1.2. Le concept et les buts recherchés

Un adulte handicapé adulte handicapé Pour avoir la qualité de personne handicapée au sens de la loi, celle-ci doit avoir soit un taux d’Incapacité permanente partielle (I.P.P.) égal ou supérieur à 80%, soit un taux d’I.P.P. compris entre 50 et 80 % ET une reconnaissance d’inaptitude au travail. est orienté par la COTOREP à l’âge de 20 ans vers un établissement où il peut passer toute son existence. C’est la constatation de cette réalité, avec la mise en marge qu’elle génère, qui est à l’origine de notre recherche de qualité et d’adaptation institutionnelle.

La question de base pourrait être la suivante : comment rendre à la société ce qui fait partie d’elle-même ? Cette question est posée comme un acte professionnel et de citoyen. Ceci aux fins de s’impliquer encore plus dans la recherche de solutions au problème de l’accueil en milieu ordinaire des personnes adultes handicapées comme d’ailleurs des personnes âgées.

On trouve là notre motivation première : faire vivre la personne handicapée dans la société dont elle fait partie intégrante, et que cette société la voit vivre et assume sa présence en partageant avec elle la vie de la cité. Certes, tous les handicapés ne peuvent prétendre à ce type de vie socialisée, mais pour ceux pour lesquels c’est possible, il s’agit d’un objectif important.

L’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). est un instrument connu et utilisé au cours du temps pour des populations en difficultés, et notre idée a été de l’institutionnaliser à partir de règles adaptées aux utilisateurs et aux divers partenaires.

1.3. Le projet de vie en accueil familial

Il s’articule autour de trois idées fortes :

  • tout d’abord, l’aide à la vie dans tous les instants de la journée, en tenant compte des potentialités et aptitudes de la personne handicapée, en essayant de maintenir les acquis et d’aller vers des acquisitions nouvelles dans la recherche d’une autonomie relative dans le quotidien.

Il s’agit à la fois d’une prise en charge personnelle, notamment à travers l’approche corporelle, l’apprentissage de l’hygiène, la relation à la nourriture, au sommeil, et en même temps des plans plus matériels de la relation avec ses vêtements, ses objets personnels, de l’investissement de son espace de vie personnel, de l’implication dans la vie collective. Ce mode d’action se situe dans le cadre de « soins à donner à la personne » au sens général du terme.

  • ensuite, l’aspect relationnel présent dans les moments de la prise en charge. C’est à l’évidence un point fort dans ce mode d’accueil car l’adulte handicapé a en référence une ou deux personnes avec le plus souvent la relation à des enfants. Ce lien qui se crée inévitablement sur le long terme permet une évolution au jour le jour.

L’usager bénéficie alors de quatre éléments primordiaux : le respect de son rythme, une grande stabilité de vie, une référence d’encadrement limitée, un cadre favorisant l’écoute et l’expression.

Son mode relationnel peut être appréhendé par la personne qui l’accompagne au quotidien, qu’il soit oral, comportemental ou somatique. La confiance qui s’installe avec le temps est essentielle. On ne peut aborder l’aspect relationnel de l’accueil familial sans évoquer en corollaire la charge affective qui s’y rattache. Sans systématiquement envisager une relation affective forte entre accueilli et accueillant, le partage au quotidien, la vie commune basée sur l’aide et l’acceptation, créent des liens au fil des jours. L’accueil familial représente donc, par son ouverture relationnelle, une base stable à l’évolution d’un usager.

  • enfin, le maintien d’un lien social. La personne adulte handicapée est en situation sociale : elle vit dans une maison au milieu d’autres, connaît les voisins, les commerçants du village (beaucoup de résidents vont seul faire de petites courses rituelles), va chercher les enfants à la sortie de l’école et les accompagne aux activités sportives, participe aux fêtes de famille. Elle n’est plus handicapée, mais l’un des membres d’un groupe familial.

Dans cette réalité de fonctionnement, ces trois éléments d’aide à la vie, d’aspect relationnel et affectif, de maintien du lien social, sont très imbriqués au cours de la prise en charge. Ils mettent en évidence deux problématiques : tout d’abord, la correspondance entre le projet d’établissement et le rôle possible joué par une famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! dans un cadre défini prenant en compte les aspects physique, psychique, affectif et social d’un adulte handicapé ; ensuite, ils tracent un cadre général au profil des familles d’accueil par rapport à nos attentes : disponibilité, attention, acceptation, capacité d’intégrer un projet.

1.4. Les règles de fonctionnement

Bien entendu, l’espace de vie proposé par une famille n’est pas suffisant en lui-même et il faut lui donner du sens d’abord par le projet guidant la prise en charge. Quelles sont les exigences et la commande précise du savoir-faire, du savoir-être et donc du quoi et comment faire ?

L’adulte handicapé accueilli est toujours abordé comme une personne à part entière avec sa dignité, mais aussi sa fragilité et son incapacité. Ses désavantages sont vus comme des points à palier, à surmonter, à vaincre. Ils ne doivent pas inhiber l’action ou les initiatives appropriées et ajustées avec les recommandations permanentes de vigilance, de prudence, de sécurité. Ces recommandations exigent une prise de risques mesurée et réfléchie.

Afin de réguler ces actions et interactions, des règles de fonctionnement ont été mises en place. Composées de quatorze fiches, elles se présentent sous forme d’un dossier mis à disposition des familles d’accueil avant leur recrutement et durant la première semaine de contact. S’y adjoint une fiche signalétique sur le placement familial spécialisé. Ce document délimite le service au sein de l’établissement et des diverses unités fonctionnelles, et précise la réglementation et les textes qui régissent cette activité. Ces règles sont données pour lecture et questionnement au moment du premier contact avec le résident lors du stage de sensibilisation.

Le jour du recrutement, marqué par la signature du contrat de travail, il est remis un exemplaire de ces règles de fonctionnement à chaque accueillant. La remise du dossier donne lieu à un échange approfondi sur son mode d’emploi à l’aide de questions et de réponses.

2. LA FAMILLE D’ACCUEIL : UN CONCEPT MULTIFORME

2.1. Définition et mode d’accueil

La famille d’accueil, c’est d’abord un ensemble de personnes et un lieu accueillant qui se définit par sa façon d’être et de recevoir. Pour accompagner le quotidien des adultes handicapés, le fonctionnement socio-familial est spécifié et qualifié par la façon de vivre, les comportements, les modes relationnels. Cela se prolonge au fil des années dans un cadre de technicité et de professionnalisme. L’accueil à domicile de personnes handicapées a sa place sur l’échiquier des professions sociales.

Pour parler des familles d’accueil, il est primordial de préciser que l’accueil est globalement assuré par le jeu complémentaire de trois modes différents : les familles fixes, les familles relais, les familles vacances. Chaque type de familles propose des prestations spécifiques et a une place dans l’organisation du placement familial spécialisé. Nous allons en préciser les caractéristiques.

2.2. Les familles fixes

Elles composent le noyau du placement familial. Leur mission est clairement définie par leur contrat de travail, les règles de fonctionnement et le projet d’accueil individuel. Agents de l’établissement, elles ont en charge une ou plusieurs personnes adultes handicapées, et cela constitue leur unique activité professionnelle. Notre attente principale quant à leur action est que l’usager soit inclus dans la vie familiale, qu’il partage le cadre de vie et les évènements familiaux au quotidien.

On peut distinguer deux types d’accueil :

  • l’accueil chez le particulier : une seule personne est salariée et se verra confier un ou deux résidents, ceci en tenant compte de son choix, des potentialités d’accueil, des contingences logistiques (la loi exige une pièce de 9 m² pour une personne ou 16 m² pour deux résidents du même sexe), et de la constitution de la famille dont le nombre d’enfants présents au domicile. On trouve, dans cette catégorie, des personnes seules ou mariées, le conjoint ayant alors une activité professionnelle, mais étant considéré comme partie prenante de l’accueil ;
  • le couple d’accueillants : le couple est salarié par l’établissement et se consacre totalement à l’accueil des trois adultes handicapés. Le logement de la famille est mis à disposition par l’établissement. Le nombre de trois résidents est la conséquence de la recherche de l’équilibre entre l’apport financier et le souci de préserver une vie familiale. Il est énoncé dans la loi du 10 juillet 1989 et amène une masse de travail qui peut être assumée par un couple avec des enfants.

Le rythme de travail repose sur deux exigences fortes : d’une part donner aux familles fixes des plages de repos régulières, d’autre part avoir un contact avec les résidents. Avec l’expérience, le rythme de trois semaines travaillées pour une semaine de repos a paru présenter un bon équilibre, avec en plus, une fois par an, trois semaines de repos consécutives. Les familles fonctionnent donc sur un tableau de service annuel avec 37 semaines travaillées et 15 semaines sans résidents, de façon régulière.

Le choix d’une organisation préservant des temps de coupure, indispensables face à la lourdeur de la tâche, a comme incidences la mise en place de familles relais et vacances, complémentaires aux familles fixes, et d’un accueil à la journée au sein de l’institution qui assure une prise en charge des résidents et un soutien aux familles d’accueil.

2.3. Les familles relais

Les « familles relais », installées sur le « territoire » de l’établissement sont sans enfant ou avec des enfants déjà élevés. Ces derniers deviennent des auxiliaires de leurs parents en participant à la synergie familiale. La commission interne de recrutement se détermine à partir d’un projet spécifique pour ce type de mission : la visée éducative et sociale est moins marquée car il s’agit d’accueil temporaire accueil temporaire Terme désignant un contrat d’accueil à durée déterminée, avec une date de début et une date de fin, prévoyant une prise en charge à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (de jour ou de nuit). et régulier.

Par ailleurs, ces familles jouent un rôle très important dans l’observation des comportements et attitudes des adultes accueillis. Leur mobilité et la régularité de l’accueil permettent d’évaluer les potentialités d’intégration, et de noter les acquis face à des situations concrètes telles l’hygiène, les tâches familiales, l’occupationnel, la maîtrise des espaces et la mémoire des lieux, l’adaptabilité à des situations nouvelles et inhabituelles.

Cette mission contribue à la vigilance, et alimente les débats sur chacun des résidents en y apportant des points de vue différents qui représentent un complément pour l’équipe.

Les familles relais confient dans la journée les résidents au service d’accueil de jour avec lequel elles travaillent en complémentarité. Elles assurent les temps familiaux et les week-ends et sont souvent assimilées à une mini-structure. Chaque semaine, elles accueillent un groupe de cinq résidents. Pour le suivi régulier, elles ont en charge quinze adultes handicapés. Cette mission est gérée par quatre familles relais, logées à l’intérieur du périmètre de l’établissement.

Les lieux de vie ont été conçus par l’établissement en tenant compte de la charge d’accueil conséquente et de la mission des familles relais.

2.4. Les familles vacances

La réflexion sur le temps de repos des familles d’accueil et de leurs remplaçants a abouti à promouvoir « les vacances » des accueillis au même titre que celles des accueillants. C’est ainsi que l’idée de suppléer les familles relais par des familles vacances fut concrétisée.

Le principe est de donner un temps de vacances dans un lieu conçu pour cela au sein du dispositif. Deux familles d’accueil vacances ont été recrutées. Elles sont et restent des accueillants dont les lieux et les « outils » sont appropriés à une pratique vacancière. Chacun des adultes handicapés placés dans le service va ainsi passer trois semaines dans l’année dans l’un des deux lieux aménagés pour cela.

Notre attente repose sur la même idée d’observation face à l’hygiène, la participation aux tâches quotidiennes, l’occupationnel, le relationnel, mais avec la particularité d’un espace nouveau, d’un rythme de vie et de centres d’intérêts différents du reste de l’année.

2.5. Précisions administratives

Les familles sont liées à l’établissement par un contrat de droit privé à durée indéterminée. Le contenu de ce contrat interne tient compte de la nature de la prestation et prévoit une rémunération spécifique, dans l’attente de textes précisant la nature juridique dont relèverait l’accueil des adultes lourdement handicapés prévu par l’article 5 de la loi n° 475 du 10 juillet 1989.

Le lien juridique est contenu dans les termes du présent contrat et relève de la responsabilité contractuelle (Code civil – 3° relatif aux obligations, contrat…). Le statut public de l’établissement est déterminant en matière de procédure judiciaire. Ainsi la prestation contractée relève du droit privé. La rémunération est prévue dans le contrat.

3. L’INSTRUMENTALISATION DU SYSTÈME

3.1. L’accueil de jour

Dans la recherche de la mise en place d’un placement pour adultes handicapés hors établissement mais en bénéficiant de la logistique institutionnelle, le concept et la cohérence imposent l’existence d’un service d’accueil de jour. Il représente, en complémentarité avec les familles, l’autre pierre angulaire du fonctionnement.

Situé au sein de l’institution dans les locaux d’une ferme restaurée, il accueille cinq jours par semaine les quinze résidents dont les familles sont en repos. Ainsi, à travers un roulement de quatre semaines types, l’équipe entretient des relations et peut observer tous les adultes handicapés placés. C’est là que se joue l’aspect évolution, accompagnement, soutien et régulation.

Il est également l’endroit où se planifie et se gère l’ensemble du dispositif. Enfin, il représente un lieu de ressources où les familles d’accueil savent pouvoir exposer leurs problèmes. L’accueil de jour apporte au service la complémentarité indispensable à son fonctionnement de service spécialisé.

Par sa technique d’aide, d’accompagnement et de régulation, il renforce le « S » de P.F.S. Le mot spécialisé exprime une exigence professionnelle réfléchie et concrète. En effet, les rôles et missions confiés à cette structure sont d’une importance capitale pour la crédibilité de l’en- semble du système. Un dosage approprié a présidé à la composition de ce service, en recherchant la collaboration de plusieurs qualifications différentes, à savoir des éducateurs spécialisés, des aides médico-psychologiques, et des éducateurs techniques.

Le chiffre de soixante usagers permet, à travers une répartition en quatre groupes de quinze résidents, le passage sur l’accueil de jour de tous les usagers sur un mois (quinze par semaine).

3.2. La procédure de soutien

Cette fonction est attribuée à une professionnelle qualifiée en éducation spécialisée et surtout bien expérimentée dans ce type de prestation. Elle a, auprès des familles d’accueil, un rôle d’écoute très rapprochée. Il ne s’agit ici ni d’une hiérarchisation, ni d’un contrôle. Il faut souvent rappeler ces principes afin de ne pas céder à la tentation facile venant des familles d’accueil qui serait celle de se déposséder d’une légitimité en confiant ses problèmes à celui qui va les résoudre ou les prendre en charge.

La nature de cette mission est bien d’accompagner l’accueillant dans sa charge, de l’aider à entrevoir lui-même les solutions et surtout d’en parler le plus naturellement possible. Ce naturel, dans une relation rapprochée voire individualisée, ne doit pas être chargé de confidentialité ou de complicité.

La mission est claire : la personne accompagnante n’est pas une confidente, mais une professionnelle sur qui repose la charge d’aider, de comprendre et d’analyser les situations. Elle a la possibilité de prendre du recul, de vérifier les trajectoires et l’authenticité des faits. Elle peut et doit alerter en cas de déviance, dérive ou perturbations chroniques. La sincérité dans la démarche est garante de la mission. Elle doit éviter toute tentation de se transformer en porte-parole des accueillants. Le principe fondamental de sa mission est, et restera le mieux-être des personnes handicapées à travers l’action et la qualité de la prestation des familles d’accueil.

Afin de circonscrire au mieux la mission confiée, il sera utilisé un outil permanent : le projet individualisé. Il s’agit ici d’un document réalisé en partenariat avec chaque accueillant ou chaque couple et pour chacun des accueillis. Il s’articule autour d’une grille à deux pôles :

  • le premier recèle les informations sur les potentialités, les manques, les difficultés, les handicaps de chaque personne placée, le tout selon une codification simplifiée pour donner le même sens à tous les acteurs ;
  • le second pôle apporte des propositions d’action, c’est-à-dire « l’AGIR » de chaque intervenant.

Notre A.G.I.R. identifie les différents thèmes d’actions à mettre en place :

A = Apprentissage : acquis possibles, nécessaires,
G = Garantir les acquis, les affiner, les compléter,
I = Intervenir, soutenir une démarche de sollicitation,
R = Régression : rappeler, répéter, bref faire repousser et retarder la régression.

Ce projet n’est pas figé et doit être actualisé tous les ans. Par ce moyen et à travers cet outil, il est donné à la personne chargée de la mission de soutien des familles d’accueil un cadre précis d’intervention. Le lieu de travail se situe à l’écart du service de l’accueil de jour et des lieux d’habitation des familles, ceci pour garder une intimité, une distance et donc éviter toute approche fusionnelle qui réduirait le champ d’intervention. L’éducatrice en charge de cette fonction apporte à l’équipe des évaluations éducatives et pédagogiques pour chacun des usagers à l’intérieur des familles d’accueil.

3.3. Le contrôle sur site

La mission confiée à l’établissement d’accueil des personnes handicapées oblige non seulement à la théorisation de la prise en charge et de sa pratique, mais aussi à être pragmatique face aux risques de tous genres. L’histoire de l’accueil des personnes fragiles et sans défenses est riche de déviances, dérives, malfaisances et maltraitances.

L’accompagnement va se faire avec l’évaluation et l’action. Ces approches ne se télescopent pas car chacun agit dans sa sphère propre. Certes, nous devons être vigilants et agir toujours dans l’intérêt de ceux qui nous sont confiés, mais un garde-fou est plus qu’indispensable : c’est une obligation.

Les courts séjours en établissement peuvent nous apprendre bien des choses sur l’évolution des adultes handicapés. Conçus partiellement pour cela, ils ne sont cependant pas suffisants en matière de protection et de surveillance. La notion d’un certain « contrôle » est présente. Ainsi faut-il appréhender l’accompagnement comme une surveillance de tout moment, mais aussi comme une garantie qui labelliserait le type d’accueil.

Aussi, il est certain que les visites sur sites successives non « entachées » donnant lieu à un retour écrit positif, daté et signé par les deux composantes portent en elles un crédit important qui valorise la prestation fournie et devient un référentiel. Celui-ci peut, en cas de nécessité, être utilisé au bénéfice de l’accueillant si des problèmes ou des difficultés surviennent dans le futur.

Ces rencontres sont actives car elles interviennent dans un cadre d’employeur à employés. En effet, à l’encontre de la personne chargée d’accompagner qui n’est pas astreinte à établir des rapports sur ses relations avec les accueillants (sauf en cas d’alerte), l’accompagnant sur sites établit des rapports circonstanciés selon une grille conçue à cet effet par le chef de service. Ces rapports lui sont remis et il en fera l’usage qu’il convient, dont celui d’agir sur une composante financière identifiée comme « prime sur la valeur de la prestation » : elle s’inspire de la prime de service octroyée aux autres personnels du service public, et est une des composantes minimes du salaire, liée à la bonne application du projet d’accueil individuel. Un manquement grave dans la prise en charge des résidents peut conduire à sa suspension ponctuelle.

Cependant, l’usage de ce dispositif est tempéré et ne peut s’appliquer qu’après toutes les autres dispositions (soutien, aide, entretien, puis avertissement). La personne chargée des visites sur sites les programme à sa guise selon des règles pré-établies et selon un schéma qui tient compte des jours de la semaine et des heures de visites. Elle peut aussi agir sur commande du chef de service. Elle est totalement déchargée des résidents, afin de ne pas confondre sa mission avec celle de ses collègues. Cette désimplication est volontairement recherchée pour donner tout son sens au mot accompagnement et contrôle sur site.

Le profil de poste a été longuement réfléchi afin de circonscrire les missions de ce travail vécu comme difficile mais nécessaire à la pérennisation du service. Les comptes-rendus sont pour l’équipe la vision du vécu réel à l’intérieur de chacune des familles.

3.4. La formation des familles d’accueil

Les familles d’accueil représentent à l’origine un personnel non formé. Eu égard à la loi et à notre souci institutionnel, l’utilité de la formation s’imposait dans la mise en place d’une méthode d’accueil faisant appel à des non-professionnels. Elle constituait le passage obligé dans la réalisation d’une nouvelle mission et a pris, au fil des ans, des formes diverses liées à l’évolution des agents et la recherche d’une plus grande professionnalisation.

Nous avons commencé par une formation institutionnelle dite de sensibilisation étant donné le niveau scolaire et les parcours hétérogènes des familles, qui a duré cent vingt heures réparties sur cinq mois. Elle a été menée par des professionnels de l’établissement sur des thèmes relevant de leur champ de compétence : le psychiatre (le patient), le psychologue (l’être), le cadre socio-éducatif (le quotidien), la surveillante (les soins), le directeur (le droit des usagers).

Le deuxième niveau de formation a été constitué par le passage du diplôme de premier secours par toutes les familles.

Le dernier programme de formation mis en place était plus ambitieux. Il s’agissait de proposer un cursus permettant d’une part une qualification et une meilleure connaissance de la fonction d’accueillant, et d’autre part un moyen de se recycler en cas d’usure dans leur fonction. Le contenu, la sélection et la sanction furent sérieusement étudiés sous ces deux angles.

Le choix s’est finalement porté sur le Certificat d’Aptitude à la Fonction d’Aide à Domicile (décret du 30 novembre 1988), avec un module supplémentaire sanctionné par une certification pour l’accueil à domicile des personnes adultes handicapées. Les partenaires de ce dispositif étaient l’établissement (promoteur), l’IRTS PACA (formateur), la DRASS PACA (autorité responsable), le Conseil Général des Alpes-de-Haute-Provence (pour ses familles d’accueil), les CCAS locaux, l’ANFH (financeur du plan de formation approvisionné durant plusieurs années par l’établissement).

Le deuxième « A » du sigle CAFAD a été voulu comme signifiant Aide à domicile et Accueil à domicile. En janvier 1998, la première promotion a concerné vingt agents, une deuxième en avril 1999 en a réuni quinze autres ainsi qu’une troisième en avril 2000 pour quinze familles d’accueil.

En plus de répondre à l’obligation légale, les différents cycles de formation étaient ouverts vers une information sur les pratiques, une actualisation des connaissances en matière de prise en charge des adultes handicapés, une prise en compte du bien-être psychique des résidents.

Bien évidemment, la base législative de référence est la loi du 10 juillet 1989. L’émergence de la loi du 17 janvier 2002 et ses décrets d’application amèneront un nécessaire ajustement.

P.-S.

Contact : Centre d’accueil spécialisé, Quartier Beaudine - BP 20 - 04301 Forcalquier Cedex - Tél. 04.92.70.73.17