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Famidac, l'association des accueillants familiaux
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Plus humain et moins cher : l’accueil familial

Auteure : Rachel Knaebel, bastamag.net, 29 septembre 2020

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Pourquoi ne pas vivre dans une famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! plutôt que d’aller en établissement quand on devient dépendant ? C’est le pari de l’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). . En ces temps de profonde crise au sein des Ehpad, le système aurait toutes les raisons de se développer… si les accueillants n’avaient pas un statut aussi précaire.

(...) Depuis trente ans déjà, des adultes en situation de handicap ou des personnes âgées peuvent aller vivre au sein de familles d’accueil. Mais ce dispositif peine à se développer, même en temps de désaffection grandissante pour les Ehpad. Il existe entre 9000 et 10 000 accueillants familiaux accueillant familial
accueillants familiaux
Agréés pour prendre en charge à leur domicile des personnes âgées ou handicapées adultes n’appartenant pas à leur propre famille, les accueillants familiaux proposent une alternative aux placements en établissements spécialisés.
aujourd’hui en France, un chiffre qui stagne, voire baisse. « L’accueil familial existe dans la loi depuis longtemps, mais reste méconnu », regrette Belén Alonso, accueillante en Haute-Loire et présidente de l’association Famidac.

Pour devenir accueillant, il faut d’abord faire une demande d’agrément au conseil départemental, pour une, deux ou trois personnes âgées ou en situation de handicap. « Le conseil départemental réalise une enquête sociale. On peut être reçu par des assistantes sociales, des psychologues, des médecins… ils visitent aussi notre maison », précise Belén Alonso. Chaque personne accueillie doit avoir sa propre chambre. « Une fois l’agrément obtenu, pour commencer un accueil, il faut signer un contrat, on doit le faire en trois exemplaires. Le conseil départemental en a un et contrôle ensuite si les choses se passent bien. » Le contrat signé, entre l’accueillant et la personne hébergée ou son représentant en cas de tutelle, est dit « de gré à gré ». En clair : ce n’est pas un contrat de travail [1].

Les accueillants « en dehors du code du travail »

« Notre statut est bancal, biscornu, ce qui fait que peu de personnes se décident à demander l’agrément, analyse l’accueillante. Nous sommes des salariés sous certains côtés, mais pas tout à fait ». Dans les faits, les accueillants familiaux sont un peu comme des assistantes maternelles, qui s’occupent d’enfants parfois à leur domicile, ou des auxiliaires de vie, qui travaillent au domicile d’autres personnes. « Mais nous, nous sommes en dehors du code du travail, sous prétexte qu’il est impossible d’héberger son employeur, alors qu’un employeur peut héberger son employé », explique Étienne Frommelt, secrétaire général de l’association Famidac, qui a été accueillant pendant 22 ans.

Le niveau de salaire n’aide pas non plus à enthousiasmer les aspirants accueillants. La rémunération pour l’accueil d’une personne est d’environ 600 euros nets, soit un demi-Smic. S’y ajoutent des indemnités pour les frais de logement et d’alimentation. Pour Belén Alonso, il faut accueillir trois personnes à plein temps (nuit et jour) pour « avoir un salaire assez correct, de façon aussi à pouvoir se faire remplacer de temps en temps pour pouvoir prendre un peu de repos. Pour les personnes qui bénéficient de l’aide sociale, on ne peut pas dépasser ces niveaux d’un demi-Smic par personne. Quand il s’agit de personnes qui ont suffisamment de revenus, c’est une négociation de gré à gré. »

Sur ces rémunérations, les accueillants paient des cotisations pour la Sécurité sociale, pour la retraite, mais pas pour le chômage. Résultat : « Si une personne accueillie décède, nous n’avons pas le droit à des indemnités chômage, même après 20 ans d’activité. Certains accueillants se retrouvent ainsi d’un coup au RSA », souligne Étienne Frommelt. Après 22 ans d’accueil, l’homme touche aujourd’hui une retraite de 900 euros. « On ne veut pas se plaindre, on ne fait pas ce métier pour l’argent, on le fait pour les personnes qu’on accueille. Mais cela ne peut se développer que si le statut s’améliore. »

Pas de droit au chômage, pas de prime Covid

Les accueillants familiaux demandent depuis des années de cotiser à l’assurance chômage ainsi qu’une revalorisation des rémunérations et des indemnités pour les frais. Car « aujourd’hui, c’est clair qu’on finance avec notre salaire une partie des frais d’entretien », dit Belén Alonso. Deux députées – Josiane Corneloup (LREM) et Mireille Robert (LR) – mènent actuellement une mission parlementaire sur l’accueil familial. « J’ai participé à une visioconférence avec les députées. Nous avons le sentiment qu’on a été écoutés et entendus, mais ça fait au moins 15 ans qu’on a l’impression d’être entendus, et pourtant, rien ne change » (...)

Le confinement a mis en lumière la précarité du métier. N’étant pas des auxiliaires de vie, les accueillants n’étaient pas inclus dans les annonces présidentielles sur les primes Covid accordées aux aides à domicile. Certains départements ont choisi d’attribuer des primes aux accueillants, sur leur propre budget, d’autres pas. Quelques-uns ont tout simplement « adressé des lettres de remerciements pour la mobilisation ou l’implication… », note l’Institut de formation, de recherche et d’évaluation des pratiques médico-sociales (Ifrep, qui publie des analyses et études sur les accueillants familiaux).

Les professionnels qui font de l’accueil dit « séquentiel séquentiel
séquentiels
Les accueils séquentiels sont des accueils intermittents, dont la périodicité est librement déterminée - exemples : un weekend tous les mois, en semaine hors weekend, etc.
Contrairement à l’accueil temporaire ponctuel (à durée déterminée, de date à date), l’accueil séquentiel est une formule très souple pouvant faire l’objet d’un contrat d’accueil à durée indéterminée (sans date de fin).
 »
en ont particulièrement bavé suite à l’épidémie. Ils accueillent à leur domicile des personnes pour périodes courtes mais à intervalles réguliers, par exemple pour que des adultes en situation de handicap qui vivent en foyer puissent en sortir de temps en temps. Avec le confinement, ils se sont retrouvés sans travail, donc sans aucun revenu. (...)

Faire le métier « de façon un peu plus humaine »

Dans ces conditions, des accueillants craignent que loin de se développer, le dispositif disparaisse lentement. C’est le cas de Valérie Soiyai, accueillante dans le Maine-et-Loire. « Le nombre d’accueillants baisse. Un accueillant qui part à la retraite n’est pas remplacé, il n’y a pas de renouveau. Sur mon département, on serait 65 accueillants, avec une moyenne d’âge de 55 ans. Les plus jeunes, qui ont autour de 40 ans, ne tiennent pas longtemps parce que c’est trop mal rémunéré. » Elle-même n’héberge plus aujourd’hui que deux adultes en situation de handicap, qui travaillent à l’extérieur la journée. Et elle cogère depuis un an un garage avec son époux.

Pourtant, pour des professionnels du médico-social, l’activité peut représenter une alternative au travail dans des institutions souvent sous-dotées en personnel et aux conditions de travail de plus en plus difficiles. « De nombreuses personnes arrivent à l’accueil avec une carrière dans le médico-social derrière elles, des aides-soignantes, des auxiliaires de vie, des infirmières… qui décident de faire leur métier de façon un peu plus humaine », témoigne Belén Alonso. « Elles travaillaient dans une structure, un foyer, n’appréciaient pas forcément ce qu’il se passait dans l’établissement et veulent ensuite faire leur métier autrement », dit aussi Valérie Soiyai.

Pour Étienne Frommelt, il y a tout à gagner dans le développement du dispositif : « L’accueil familial coûte moins cher que les établissements. En terme d’investissement, c’est zéro euro pour l’État. Et les gens vivent plus longtemps en accueil familial qu’en établissement. Quand ils arrivent dans une famille, ils rebondissent. » Ils peuvent par exemple continuer à réaliser des activités du quotidien, comme chez les Provôt, où « les personnes se lèvent à l’heure qu’elles souhaitent, rapporte Marie. Lili, qui est sur un début d’Alzheimer, vit sa vie. Elle fait par exemple elle-même son lit. Quand Thérèse est arrivée, elle aussi participait aux tâches domestiques. Elle pliait le linge, mettait le couvert, désherbait, sortait… Aujourd’hui, elle ne peut plus. La seule chose qu’elle fait toujours, c’est éplucher les pommes de terre. Mais il faut qu’elles soient belles ! »

Rachel Knaebel

P.-S.

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Notes

[1Seuls les accueillants familiaux thérapeutiques sont salariés, mais eux ne travaillent qu’avec des secteur de psychiatrie d’hôpitaux public, dont ils sont employés.