Extrait du jugement en ligne sur www.legifrance.gouv.fr
Conseil d’Etat statuant au contentieux
N° 267305
Inédit au recueil Lebon
3EME SOUS-SECTION JUGEANT SEULE
M. Martin Laprade, président
M. Edouard Crépey, rapporteur
M. Séners, commissaire du gouvernement
SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, avocats
lecture du mercredi 8 décembre 2004
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 mai et 17 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, représenté par le président du conseil général, domicilié en cette qualité à l’hôtel du département, à Marseille (13000) ; le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’ordonnance du 19 avril 2004 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, à la demande de Mme Marianne X, a suspendu l’exécution de l’arrêté du 4 février 2004 du président du conseil général des Bouches-du-Rhône lui retirant l’agrément qui lui avait été accordé, en application des articles L. 441-1 à L. 443-12 du code de l’action sociale et des familles, en vue de l’accueil à domicile et à titre onéreux de personnes âgées ou handicapées ;
2°) de mettre à la charge de Mme X la somme de 5 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’action sociale et des familles ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Edouard Crépey, Auditeur,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme X,
- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 441-1 du code de l’action sociale et des familles : Pour accueillir habituellement à son domicile, à titre onéreux, des personnes âgées ou handicapées adultes n’appartenant pas à sa famille jusqu’au quatrième degré inclus (...), une personne ou un couple doit, au préalable, faire l’objet d’un agrément, renouvelable, par le président du conseil général de son département de résidence qui en instruit la demande (...)./ La décision d’agrément fixe, dans la limite de trois, le nombre de personnes pouvant être accueillies./ L’agrément ne peut être accordé que si les conditions d’accueil garantissent la continuité de celui-ci, la protection de la santé, la sécurité et le bien-être physique et moral des personnes accueillies, si les accueillants se sont engagés à suivre une formation initiale et continue et si un suivi social et médico-social de celles-ci peut être assuré. Tout refus d’agrément est motivé (...) ; qu’il résulte de l’article L. 441-2 du même code que le président du conseil général organise le contrôle des accueillants familiaux
accueillant familial
accueillants familiaux
Agréés pour prendre en charge à leur domicile des personnes âgées ou handicapées adultes n’appartenant pas à leur propre famille, les accueillants familiaux proposent une alternative aux placements en établissements spécialisés.
et le suivi social et médico-social des personnes accueillies, que si les conditions mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 441-1 précitées cessent d’être remplies, il enjoint l’accueillant familial d’y remédier dans un délai fixé par le décret mentionné au même article, puis, le cas échéant, retire l’agrément après avis de la commission consultative et que, en cas d’urgence, il peut retirer l’agrément sans injonction préalable
injonction préalable
commission consultative.
(...) En cas d’urgence, l’agrément peut être retiré sans injonction préalable ni consultation de la commission précédemment mentionnée.
ni consultation de la commission ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un arrêté du 4 février 2004, le président du conseil général du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE a retiré l’agrément délivré le 21 octobre 1999 à Mme X pour l’accueil à domicile et à titre onéreux de personnes âgées ou handicapées, en raison de plusieurs manquements à ses obligations ;
Considérant que si Mme X conteste une partie des faits qui lui sont reprochés, elle reconnaît avoir accueilli une quatrième personne, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 441-1 précité rappelées dans l’agrément qui lui a été accordé ; qu’en estimant que ce seul manquement n’était pas de nature à justifier légalement le retrait d’agrément, et en jugeant que, par suite, les moyens invoqués par Mme X étaient propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté litigieux, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de sa requête, le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE est fondé, pour ce motif, à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;
Considérant, que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, par application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
Considérant que, pour demander la suspension de l’arrêté du 4 février 2004 lui retirant son agrément, Mme X soutient que cet arrêté a été pris à l’issue d’une procédure irrégulière, qu’il n’est pas suffisamment motivé, que son signataire n’avait pas compétence pour le prendre, qu’il est fondé sur des manquements et dysfonctionnements qui ne sont pas établis et qu’il est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation ;
Considérant qu’en l’état de l’instruction, aucun de ces moyens n’est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de Mme X la somme que le DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE la somme que Mme X demande au même titre ;
D E C I D E :
Article 1er : L’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille en date du 19 avril 2004 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par Mme X devant le juge des référés du tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions du DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées par Mme X devant le Conseil d’Etat sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DES BOUCHES-DU-RHONE, à Mme Marianne X et au ministre des solidarités, de la santé et de la famille.